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20 juillet 2025
LE DÉBAT QUI AGITE LA TOILE
Quand Boubacar Boris Diop et Souleymane Bachir Diagne pointent leur désaccord par articles interposés, les internautes sénégalais retiennent leur souffle et apprécient la qualité des échanges
Tout est partie d'un hommage publié il y a 20 ans par le philosophe sénégalais, Souleymane Bachir Diagne, sur Cheikh Anta Diop intitulé ''In the Den of the Alchemist'' (Dans l'antre de l'Alchimiste) et republié par une revue sud-africaine.
A la lecture de cette publication, Boubacar Boris Diop, écrivain à succès et journaliste sénégalais de renom, publie une tribune intitulée : "Bachir, tu permets" dans lequel il dénonce la description par Souleymane Bachir Diagne d'un Cheikh Anta Diop "solitaire et quasi halluciné qui n'en finit pas de se demander pourquoi diable le réel refuse de se plier à ses injonctions".
"L'exercice est délicat mais Bachir, se gardant de toute hostilité manifeste, sait s'imposer une distance ironique. Cela ne l'empêche ni de se laisser surprendre par des accès de tendresse ni de frôler par moments le dénigrement pur et simple", écrit l'auteur de Murambi, le livre des ossements.
En réponse, le philosophe et enseignant à l'université de Colombia, Souleymane Bachir Diagne, publie une tribune intitulée « L'or et la boue »
Dans ce texte, il accuse son compatriote d'être animé de "la pire des mauvaises fois et d'une pincée de cynisme" et s'interroge :
"Pourquoi faire passer un vieil article de plus de vingt ans pour une récente interview ?Transformer un hommage en attaque ?Trafiquer une phrase qui dit que le vrai créateur du laboratoire ce ne sont pas les directeurs qui ont présidé à sa naissance mais l'homme qui en a fait un « lieu de légende » pour lui faire dire le contraire ?".
Ces joutes verbales entre deux intellectuels de renom ont tenu en haleine les internautes sénégalais qui n'ont pas manqué de les commenter.
par Oumou Wane
NE TERGIVERSONS PAS !
Le voile est désormais interdit dans les murs de l’Institution Sainte Jeanne d’Arc de Dakar. Bien nous en fasse !
Ce n’est pas parce que le Sénégal est un pays laïque de par sa constitution, qu’on ne peut pas y parler de religion, l’enseigner et en partager les valeurs. Or, c’est bien de nos valeurs religieuses qu’il s’agit dans la polémique qui agite la société sénégalaise à propos de l’interdiction du voile à Sainte Jeanne D’Arc, une école catholique renommée de Dakar.
Je ne vous apprends rien en vous disant que l'islam est la religion prédominante au Sénégal, où les musulmans sont estimés à plus de 90 % de la population et affiliés dans leur immense majorité au soufisme, ni en vous rappelant que l’on pratique ici une religion traditionnellement tolérante et respectueuse envers les autres cultes.
Pour ceux qui voyagent au Sénégal, ils n’auront pratiquement jamais aperçu aucune burka. Au contraire, la femme sénégalaise est très coquette et ne cherche pas du tout à masquer sa beauté. Le Sénégal, Dieu merci, n’a jamais été un pays d’islam particulièrement « bruyant », à l’image de certains de ses voisins et sa pratique religieuse ne représente aucun danger pour nos institutions et nos citoyens.
Au passage, je voudrais ici saluer le courage de nos intellectuels et éditorialistes, qui contre les aboyeurs haineux des réseaux sociaux, tirent la sonnette d’alarme pour défendre ce modèle d’« islam à la sénégalaise », qui s’impose au reste du monde à l’image de sa jeune expérience démocratique.
Dans cet établissement donc, qui a refusé d'admettre en cours des élèves musulmanes portant le voile, nous sommes d’abord en droit de se demander, pourquoi ces familles musulmanes ont choisi cette école catholique pour y scolariser leurs enfants ? Pourquoi ?
Mais sur le cœur du sujet, que dire de plus et de mieux que Serigne Modou Bousso Dieng, coordonnateur de la Confédération internationale des familles religieuses, qui déclare que ceux qui protestent contre l’interdiction du voile à l’Institution Sainte Jeanne d’Arc de Dakar, « ont tort et font tort aussi à l’Islam ». Le responsable religieux de Touba ajoute sur les ondes de la RFM : « Cette affaire de voile n’est pas une affaire de religion mais une question de liberté ». Et de continuer sans aucune ambiguïté : « A part les règles qui régissent le fonctionnement de nos écoles de manière générale, il y a des établissements qui ont leurs particularités. C’est le cas de l’institut Al Azhar qui enseigne les préceptes de l’Islam (prières, le Coran, la vie et l’œuvre du Prophète PLS…). Donc, s’il se trouve qu’il y a aussi une école catholique qui a les mêmes particularités, les parents d’élèves de confession musulmane doivent quitter cet établissement et aller voir ailleurs ». « C’est aussi simple que ça », tranche-t-il.
Loin de moi l’idée de critiquer une femme pour la façon qu’elle a choisie de s’habiller ou de pratiquer sa religion, mais enfin, s’agissant de jeunes filles, quand ce n’est pas d’enfants, quelle est la part du discernement et celle de l’endoctrinement ? Il suffit d’entendre le témoignage de l’une de ces élèves : « Ils nous ont amené dans une salle avec toutes les voilées, qui étaient là depuis le matin. On ne savait pas ce qu’on avait fait. Je me sentais rejetée, rabaissée par mon école, ma seconde famille, qui m’a rejeté pour qui je suis. On ne va pas céder, on ne va pas baisser les bras. Je mène ce combat pour ma religion, l’islam. » Il suffit de comprendre ce cri à la persécution « religieuse » pour se rendre compte de la volonté d’attiser le conflit inter-religieux.
Car que voulez-vous, même dans un pays à dominante musulmane dont la pratique religieuse incite à s’ouvrir aux autres et à vivre ensemble dans la diversité culturelle, la laïcité peut être soumise à rude épreuve.
La tendance générale dans le monde est au repli identitaire et à la crispation, au communautarisme borné ou au fondamentalisme religieux, remettant en cause la liberté individuelle ou l’égalité homme femme.
Malheureusement, ce sont souvent les plus démunis et les plus fragilisés qui se réfugient dans ces fausses certitudes.
Le Sénégal qui représente la porte saharienne de la pénétration islamique en Afrique noire a un rôle déterminant à jouer quant aux dispositifs sociaux de prise en charge de la misère.
Pour le reste du monde, l’occident dont la France a déjà par le passé, envoyé aux antipodes des navires pour sauver des "boat people" ! Comment expliquer qu’il ne fait rien de déterminant face à des gens qui fuient aujourd'hui pareillement la faim, la souffrance ou la mort sur un bateau de fortune en Méditerranée ? Là aussi nait le terreau de ces nouvelles idéologies racistes, discriminantes et identitaires.
Mais je me perds dans ma dissertation, trêve de conjectures, retournons à l’école. Le voile est désormais interdit dans les murs de l’Institution Sainte Jeanne d’Arc de Dakar. Bien nous en fasse ! Quelles que soient les déclarations politiciennes pour mettre en difficulté le régime et les propres marges de manœuvre de l’Etat pour faire avancer ce débat, qu’on se le dise, la société civile est là et ne tergiversera pas !
par Ibrahima Sene
LA CONTROVERSE AU TOUR DU CHOIX DU CHEF DE L'OPPOSITION
Il est utopique de vouloir recopier au Sénégal cette forme de cohabitation entre le pouvoir et l'opposition en dehors de l'Assemblée nationale, qui est le "chef de l'opposition"
Les gens parlent du choix du "chef de l'opposition" comme s'il n'y avait pas de jurisprudence dans ce domaine au Sénégal. L'on ne devrait pas oublier que c'est avec Abdoulaye Wade que le "chef de l'opposition" a été institué, et que le choix fut impossible entre Tanor, qui avait plus de suffrage aux Législatives, et Niass, qui avait plus de députés. Il n'a pas été possible d'avoir un consensus dans l'opposition d'alors, pour décider du choix de l'un d'entre eux. Le président Wade ne pouvant pas constitutionnellement choisir l'un d'entre eux, la fonction de "chef de l'opposition" n' a jamais été occupée.
Aujourd'hui, c'est rebelote ! Qui choisir entre Idrissa ayant le plus grand suffrage à l'élection présidentielle que le PDS a boycottée, et Wade qui seul dispose de groupe parlementaire parmi les partis d'opposition ?
Cette arlésienne résulte du fait que la trajectoire politique de l'opposition au Sénégal est unique en Afrique et s'est structurée autour de partis politiques qui ont produit des hommes d'envergure nationale et internationale ; et qui se sont toujours affrontés dans l'opposition. Cela rend impossible de dégager en leur sein, un chef de façon consensuelle. Tandis qu'ailleurs en Afrique, la trajectoire de l'opposition a produit un "homme fort" face au pouvoir.
Donc il est utopique de vouloir recopier au Sénégal cette forme de cohabitation entre le pouvoir et l'opposition en dehors de l'Assemblée nationale, qui est le "chef de l'opposition".
Au Sénégal, cette cohabitation entre le pouvoir et l'opposition se fera, ou bien au sein de l'Assemblée nationale autour de groupes parlementaires, on bien ne se fera pas. D'où la nécessité d'une plus grande démocratisation de l'accès à l'Assemblée nationale par l'instauration d'un scrutin proportionnel supérieur au scrutin majoritaire, à l'image du Conseil Département où ses deux scrutins sont respectivement 55% et 45%..
Le Sénégal a dépassé le stade où un " bipartisme" pouvait renforcer le processus démocratique. Depuis la première alternance en 2000, notre pays s'est résolument inscrit dans un système multi-partisan, dont la cohabitation harmonieuse ne peut se produire que dans l'Assemblée nationale. dans le cadre de groupes parlementaires par affinités politiques, et/ idéologiques.
Il est donc inadmissible de continuer à accepter que l'Union européenne, par l’intermédiaire de la Société civile, fasse reculer notre processus démocratique, vers les 70 et 90 d'avant alternance.
QUERELLE D’INTELLECTUELS
Bachir Diagne, tu permets’’ ? “Je vous en prie’’. Ainsi aurait pu commencer les échanges contradictoires entre Boubacar Boris Diop et Souleymane Bachir Diagne, s’ils étaient l’un en face de l’autre autour d’une table.
L’on a assisté, ces derniers jours, à un échange des plus fructueux entre deux intellectuels sénégalais. Un débat comme on aimerait plus en voir dans l’espace public. Ça a volé haut, très haut, entre le philosophe Souleymane Bachir Diagne et l’écrivain Boubacar Boris Diop. A la base, une divergence, ou ce qui semble l’être, sur des théories thèses de Cheikh Anta Diop.
“Bachir Diagne, tu permets’’ ? “Je vous en prie’’. Ainsi aurait pu commencer les échanges contradictoires entre Boubacar Boris Diop et Souleymane Bachir Diagne, s’ils étaient l’un en face de l’autre autour d’une table. Il n’empêche que le débat est ouvert et beaucoup de gens n’ont que cela à la bouche. Tout est parti d’un texte de l’écrivain publié sur le site “www.seneplus.com’’.
Adepte ou disciple de Cheikh Anta Diop, Boubacar Boris Diop n’a pas aimé une partie d’un “entretien’’ que le philosophe a accordé à une revue. “En avril 2018, le philosophe Souleymane Bachir Diagne publiait dans la revue ‘Chimurenga’ de Cape Town un article en anglais intitulé “In the Den of the Alchemist’’. “L’antre’’ en question, c’est le laboratoire de carbone 14 de l’Ifan où “l’Alchimiste’’ - Cheikh Anta Diop – solitaire et quasi halluciné, n’en finit pas de se demander pourquoi diable le réel refuse de se plier à ses injonctions’’.
Dans sa réponse intitulée “L’or et la boue’’, M. Diagne soutient que ce texte date d’il y a 20 ans et n’est pas une interview comme l’a “supposé’’ l’écrivain. “Il y a plus de vingt ans, les responsables d’une exposition consacrée au “laboratoire” sous toutes ses formes me demandaient d’écrire une contribution pour le catalogue qui allait accompagner l’événement. Je saisis l’occasion et la liberté qui m’était laissée par les commanditaires d’écrire sur ce que je voulais pour proposer un hommage au travail du professeur Cheikh Anta Diop dans le laboratoire de carbone 14 qu’il a rendu célèbre. Ce texte, que j’ai écrit en anglais, s’intitule “A Laboratory to transmute lead into gold. The legend of the center of low nuclear energies of the Institut Fondamental d’Afrique noire”. Ce qui se traduit ainsi : “Un laboratoire pour transmuter le plomb en or. La légende du centre des basses énergies de l’Institut fondamental d’Afrique noire (…) l’avait perdu de vue, lorsqu’il y a quelques mois, des collègues de Cape Town, en Afrique du Sud, m’ont dit vouloir le republier. J’ai donné mon autorisation et leur revue ‘Chimurenga’ a publié mon vieil hommage.
Mon titre originel était long, la revue a opté pour un nouveau titre : “In the den of the Alchemist”. Traduction : “Dans le cabinet de l’alchimiste”’’, écrit M. Diagne dans sa réponse. Pour lui, “ l’auteur de “Tu permets Bachir” ne sait pas l’anglais et ne comprend pas ce qu’il croit lire’’. Il explique les choses ainsi parce qu’il ne comprend pas que son texte, qui fut un hommage à Cheikh Anta Diop, soit vu comme une attaque contre ce dernier par Boubacar Boris Diop. Il ne comprend pas que ce dernier soutienne qu’il dénie à Cheikh Anta Diop la paternité du laboratoire carbone 14.
Pour M. Diagne, dans le texte originel, il est écrit : “Diop a transformé un laboratoire tout à fait ordinaire pour datation de carbone 14 tel qu’il avait été créé par Théodore Monod avant d’être complètement terminé par Vincent Monteil en un lieu de légende, un véritable cabinet d’alchimiste.’’ Ce qui semble avoir énervé le philosophe. “Vous prenez la pire des mauvaises fois, vous ajoutez une pincée de cynisme’’, l’accuse-t-il.
Quoi qu’il en soit, l’écrivain n’a pas du tout aimé cette ironie faite par Bachir Diagne dans la “supposée interview’’. “Voici, pour ceux qui ne l’auraient pas lu, ce qu’il y déclare : “J’ai deux petits coups de griffe en passant contre Cheikh Anta Diop : premièrement, je me moque un peu de lui avec les mathématiques, parce que ce n’est pas si compliqué de traduire la relativité en wolof ! Deuxièmement, il est beaucoup plus jacobin et français qu’il ne le croit, parce qu’il veut une langue unique. Cela n’a pas de sens d’avoir une langue d’unification : pourquoi le projet devrait-il être un projet qui imite l’Etat-Nation, c’est-à-dire être homogène avec une seule langue, de manière centralisée ?”
On peut s’étonner de voir tourner ainsi en dérision, soixante-cinq ans après la publication de ‘Nations nègres et culture’, les efforts de Cheikh Anta Diop pour démontrer l’égale capacité d’abstraction de toutes les langues du monde, y compris du wolof’’, se désole le Grand Prix littéraire d’Afrique noire. Il ajoute dans la même veine : “Diop a simplement voulu prouver, par ces traductions tous azimuts – ’La Marseillaise’, un résumé de la théorie de la relativité d’Einstein, un extrait d’Homère, etc. - que, très précisément, ‘‘ce n’est pas si compliqué que cela’’, pour reprendre l’expression un rien sarcastique de Bachir Diagne. Il est curieux que le sens de cet exercice lui ait échappé ; il s’agissait, pour le grand savant, de dire, sans puérile fanfaronnade, aux jeunes chercheurs africains : “Si j’ai réussi à traduire en wolof tel texte supposé être d’une farouche abstraction, c’est parce qu’il n’y a rien de plus facile. Faites-le vous-mêmes dans vos propres langues !’’
Le moins que l’on puisse dire donc, c’est qu’en s’essayant pour une fois à l’humour, Souleymane Bachir Diagne a enfoncé une porte ouverte. Aurait-il voulu suggérer que la belle réputation de Cheikh Anta Diop est largement surfaite qu’il ne s’y serait pas pris autrement’’.
“Langue unique’’, “jacobinisme’’ “’Etat-Nation’’
Pour Boubacar Boris Diop, le philosophe ne connaît pas assez le parrain de l’université de Dakar. D’ailleurs, c’est le seul texte qu’il lui connait et qui parle de Cheikh Anta Diop. Ce que réfute totalement Souleymane Bachir Diagne.
D’abord, avance-t-il : “Pourquoi dire que la traduction de la théorie de la relativité dans toute langue, en wolof en particulier, n’est pas aussi compliquée que la complexité et le caractère abstrait de la théorie le laisserait supposer ? Autrement dit, pourquoi est-il plus compliqué de traduire de la poésie que des sciences formelles ? La raison pour laquelle la difficulté de traduire est fonction directe du contenu empirique de ce qu’on traduit est qu’un formalisme logique est sa propre langue et se traduit tout seul. Quand vous traduisez une démonstration, vous ne traduisez pas le langage des signes dans lequel cette démonstration se conduit, mais le métalangage, le commentaire en langue naturelle qui accompagne la procédure. Vous traduirez “on en déduit que”, “si je pose…”, “alors il vient…” et non pas le déroulement de l’argument qui se passe dans un système de signes universels’’.
Ainsi, ajoute-t-il, “une démonstration formelle conduite par une langue ourdoue au tableau sera comprise par tous ceux qui assistent à celle-ci sans connaître cette langue, pourvu qu’ils comprennent les procédures formelles écrites au tableau. Pourquoi donc dire que plus la théorie est abstraite et réalisée dans la langue formulaire, moins il est compliqué de la traduire ? Parce que c’est vrai. Faut-il donc s’interdire de dire ce que l’on tient pour vrai sur la traduction des systèmes formels ?
Derechef, avons-nous affaire à une religion ?’’. Par ailleurs, Boubacar Boris Diop note une divergence de vue entre le philosophe et Cheikh Anta Diop sur le choix d’une langue unique. Pour lui, il est “infondé’’ d’attribuer cette pensée à l’auteur de “Nation nègre et culture’’. “Le principal grief que l’on pourrait faire à Bachir, c’est de nous avoir servi quasi mot pour mot une resucée des spéculations insidieuses et insignifiantes d’un certain Fauvelle (“langue unique’’, “jacobinisme’’ “’Etat-Nation’’), ces propos si vains, en fait, que personne n’a jamais cru devoir les relever.
Qu’un penseur aussi respecté – et à juste titre – que Bachir Diagne leur donne ainsi une seconde jeunesse laisse tout de même perplexe. Comme quoi, à force de vouloir mettre les sourieurs de son côté, on peut se retrouver dans la situation de l’arroseur arrosé’’. Sur ce point également, le philosophe a apporté sa réponse. “Alors qu’ils partagent tous les deux la même ferveur panafricaniste d’un nécessaire remembrement de l’Afrique, Ngugi Wa Thiong’o insiste pour dire que ce remembrement se fera dans le pluralisme linguistique, l’unité se faisant par la traduction, quand Cheikh Anta Diop insiste sur la nécessité du choix d’une langue d’unification. Les deux positions se défendent dans une discussion honnête et celle qui considère une langue comme instrument d’unification est, en effet, la définition du jacobinisme. Je penche, pour ma part, pour le remembrement sur la base du pluralisme linguistique et d’une philosophie de la traduction. Penser ainsi est commettre quelque crime de lèse-majesté ?’’, se demande M. Diagne.
Après cette réponse du philosophe, ceux qui suivent les échanges et en apprennent sûrement beaucoup attendent la réplique de M Diop. Heureusement que les deux intellectuels, même si de la douce violence se sent dans les propos pour qui sait lire, sont conscients qu’ils ne peuvent ne pas souffrir de contradictions. “Le fait que l’on ne soit pas de l’avis de tel ou tel penseur ne saurait bien évidemment avoir rien d’anormal ou de choquant’’, écrit Boubacar Boris Diop. Alors que Souleymane Bachir Diagne soutient : “Le fait que l’on ne soit pas de l’avis de tel ou tel penseur ne saurait bien évidemment avoir rien d’anormal ou de choquant.’’
AU GHANA, LE FRANÇAIS A LE VENT EN POUPE
La langue de Molière était peu parlée dans ce pays anglophone, jusqu’à l’arrivée à sa tête du très francophile président Nana Afuko-Addo
Le Monde Afrique |
Dylan Gamba |
Publication 11/09/2019
Dans le hall, les dernières traces de travaux rappellent l’été laborieux. Il a fallu faire vite pour que l’établissement s’étoffe en quelques mois d’un troisième étage. Mais il n’en fallait pas moins pour intégrer la longue liste des inscrits au lycée français Jacques-Prévert. Situé à East Legon, un quartier très couru d’Accra, l’institution, présente dans la capitale ghanéenne depuis 1960, est installée dans ses locaux actuels depuis 2010.« 654 élèves sont présents à cette rentrée, contre 603 en 2018 », confirme David Ballieu, le proviseur. Une augmentation de 8 %.
Au début des années 2010, le lycée français s’était pourtant habitué à vivre à chaque rentrée une érosion de son effectif jusqu’à tomber en 2016 à 560 élèves. « C’était sans doute dû à la stabilisation de la situation politique en Côte d’Ivoire avec le départ de nombreux expatriés. Aussi peut-être à un déficit de notoriété. Mais, depuis plusieurs années, nous avons augmenté notre budget communication », poursuit David Ballieu.
Des résultats sont déjà perceptibles puisque les Ghanéens sont de plus en plus nombreux à vouloir envoyer là leurs enfants. « A cette rentrée en maternelle, les nationaux représentent 38 % des effectifs. C’est un pourcentage en hausse par rapport aux années précédentes et une bonne nouvelle car les enfants suivent généralement l’ensemble de leur scolarité au sein de l’établissement », se réjouit David Ballieu. « La bourgeoisie du pays répond à l’appel du chef de l’Etat », ajoute le proviseur de cet établissement, où est inscrite la petite-fille du président ghanéen.
Le président, Nana Akufo-Addo, francophone qui a vécu dans les années 1970 à Paris en tant qu’avocat, pousse à l’enseignement du français. Dans un discours au Sommet de la Francophonie, en 2018, le chef de l’Etat, arrivé un an auparavant au pouvoir, avait déclaré que le « but est de vivre, un jour, dans un Ghana bilingue, avec le français et l’anglais ». Un but lointain, certes, mais la situation géographique du Ghana est singulière.
Coquette somme
Ancienne colonie britannique, ce pays d’Afrique de l’Ouest, est une terre anglophone, entourée de trois pays francophones : Burkina Faso au nord, Côte d’Ivoire à l’ouest et Togo à l’est. Et malgré cette proximité et le fait que l’enseignement du français soit obligatoire jusqu’au collège, seul 3 % de la population ghanéenne parle la langue de Molière, alors que, comme l’observe Patricia Amarteifio, professeure d’anglais qui en est à sa quinzième année au sein de l’institution, « les Ghanéens aiment beaucoup le français, au-delà de la politique. Lorsque je dis que je parle cette langue, les gens me répondent qu’ils aimeraient aussi la maîtriser », témoigne-t-elle.
Mais seuls les plus riches ont les moyens d’offrir à leurs enfants une éducation dans une telle institution puisqu’il faut débourser pour une année de maternelle 4 800 euros et jusqu’à 8 100 euros pour une année de lycée. Une coquette somme quand le salaire mensuel dans le pays se situe autour de 160 euros.
« Le français offre la possibilité de communiquer avec d’autres personnes et de socialiser davantage », témoigne Kwaku, un élève de 16 ans, dans un français parfait. Le jeune Ghanéen, qui a étudié en France pendant dix ans à Puteaux, espère y retourner pour y suivre un cursus d’études supérieures. De son côté Julia, 17 ans, qui a vécu plusieurs années au Togo et en Tanzanie du fait des affectations de son père, est elle aussi inscrite au lycée Jacques-Prévert depuis trois ans. Elle y voit « un avantage », « quelque chose en plus », confie la jeune fille, qui se destine à des études de marketing.
Cet engouement pour la langue française se fait aussi sentir du côté de l’Alliance française. Située non loin de l’Aéroport international d’Accra, cette institution, qui a pour but de « promouvoir la langue française, la diversité culturelle et de favoriser les échanges culturels », voit également ses demandes augmenter au fil des ans. « Nous avions 537 élèves en 2018, nous en avons 642 cette année »,avance Habibatou Cissé de l’Alliance. Et l’intérêt pour la culture française est souvent suscité par l’apprentissage de la langue.
«IDY N’OSE PAS INCARNER LE CHEF DE L’OPPOSITION DEVANT LE PDS»
Dans cet entretien, l’actualité de l’Assemblée nationale et la question du statut de l’opposition sont à la loupe du médecin Toussaint Manga
A première vue, il peut paraître timide. Mais avec Toussaint Manga, méfiez vous des apparences. Pour son premier saut à l’Assemblée nationale, le vieux Moustapha Niasse se souviendra longtemps de ce jeune du Pds qui a déchiré devant lui le projet de loi sur le parrainage. L’Assemblée nationale en vacances, le Secrétaire général de l’Union des jeunesses travaillistes et libérales (Ujtl) change de cible : Oumar Sarr et compagnie. Avec sa fougue et sa rage, le député libéral cogne les frondeurs, déroute leur stratégie et tire sur leur démarche. L’opposition présente au dialogue politique en a également pris pour son grade. Dans cet entretien, l’actualité de l’Assemblée nationale et la question du statut de l’opposition sont à la loupe du médecin Toussaint Manga.
Que vous inspire la crise que traverse le Pds ?
Ce n’est pas une nouveauté. Le parti dans son histoire a toujours vécu avec des frondes. Certains responsables sont contre les directives du frère Secrétaire général Me Abdoulaye Wade. Mais cela ne peut empêcher le bon fonctionnement du Parti démocratique sénégalais qui est très organisé. Il y a le Secrétaire général du parti, les fédérations, les structures de femmes, de jeunesses… Donc, le parti se porte très bien. La nouvelle équipe est disposée à apporter une nouvelle dynamique.
Le parti n’est-il pas aujour d’huit aillé sur mesure pour Karim Wade ?
Le parti n’est pas entre les mains de Karim Wade mais celles de Me Abdoulaye Wade qui demeure le Secrétaire général du parti. Karim, jusqu’à présent, est le candidat du parti et reste un grand responsable. Ça, c’est important. C’est pourquoi il doit occuper une place prépondérante dans le parti. Si les choses s’étaient bien passées, Karim serait l’actuel président de la République. S’il occupe une place importante dans le parti, c’est très normal.
«Oumar Sarr et Cie n’avaient pas accepté que Modou Diagne Fada puisse tenter de réformer le parti ; que Aïda Mbodj crée un courant dans le parti ; que Habib Sy puisse en créer aussi…»
La fronde de Oumar Sarr et Cie ne va-t-il pas fragiliser le Pds ?
Le Pds, ce n’est pas ces gens qu’on voit dans la presse. Les militants du Pds sont partout au Sénégal. Parmi eux, il y a des gens qui sont connus. C’est vrai. Mais il y a des gens qui sont chouchoutés et aimés par les militants du Pds juste parce qu’ils bénéficiaient de la confiance de Me Abdoulaye Wade. Mais une fois que vous oubliez ce paramètre, en dehors du Pds, vous n’existez pas. Il faut regarder dans le rétroviseur et voir tous ces responsables qui ont quitté le Pds pour tenter d’exister. En dehors de Macky Sall qui a bénéficié d’un contexte particulier, tous les autres ont échoué. Depuis 2012, tous ceux qui ont quitté le Pds pensant qu’ils avaient une aura nationale, ils n’ont même pas pu aller aux élections, excepté Madické Niang.
Jusqu’ici, on voyait des rebellions individuelles, en l’occurrence Idrissa Seck, Macky Sall, Modou Diagne Fada, Madické Niang… Mais aujourd’hui, plusieurs responsables se lèvent contre Wade et ses méthodes…
J’estime que la fronde de Fada était plus forte que celle là. Modou Diagne Fada avait de grands responsables du parti derrière lui. Fada avait un peu déstructuré certaines entités du parti, mais cela n’a après servi à rien parce qu’ayant rejoint la majorité. Les résultats seront les mêmes pour la fronde de Oumar Sarr et consorts.
Le Pds est fait de telle sorte que c’est impossible de créer une dualité face à Me Wade. Leur tentative sera vaine. Oumar Sarr, Babacar Gaye, Me Amadou Sall avaient refusé des actes similaires à des responsables. Ils n’avaient pas accepté que Modou Diagne Fada puisse tenter de réformer le parti ; que Aïda Mbodj crée un courant dans le parti ; que Habib Sy puisse créer un courant… C’était sous la coordination de Oumar Sarr. Aujourd’hui, ils créent un courant tout en sachant que les textes du parti ne l’autorisent pas.
Etes-vous de ceux qui demandent leur exclusion ?
La politique, c’est de l’addition. Mais dans ce cas d’espèce, il n’y a pas d’exclusion à formuler parce que Oumar Sarr et son groupe se sont auto exclus du parti pour acte de dissidence et de défiance au Secrétaire général national.
Défiance aussi à Karim Wade…
Karim est juste un prétexte qu’ils veulent utiliser pour contourner le problème. C’est une défiance au Président Wade. Oumar Sarr, Me Sall, Babacar Gaye ne respectent pas les Sénégalais. Ils ont fait le tour du Sénégal pour présenter Karim Wade comme le meilleur candidat pour le pays. Cette même personne qu’on voulait porter à la magistrature suprême devient subitement quelqu’un qui ne peut même pas diriger le Pds. C’est incohérent !
Selon eux, Karim Wade les a «trahis» en restant à Doha…
Il ne faut pas se leurrer. On sait tous que toutes que les conditions ne sont pas réunies pour que Karim vienne.
Quelles sont ces conditions ?
S’il vient, on va le mettre en prison.
Donc, il a peur de retourner en prison ?
Il n’y a pas de justice dans ce pays. Karim n’a pas peur d’aller en prison, parce qu’il est resté là-bas plus de 3 ans. Que voulez-vous ? Qu’il revienne et qu’on le jette en prison. On va passer notre temps à lui rendre visite et à faire des déclarations. Est-ce que c’est mieux ainsi ? Non ! On dit qu’il n’est pas courageux, c’est faux. S’il ne l’était pas, Karim ne ferait pas 3 ans de prison.
Après, il a négocié avec Macky Sall pour sortir, d’après Oumar Sarr…
Pourtant, Me Amadou Sall a dit que Karim n’a jamais négocié une grâce présidentielle. Qui faut-il croire ? Nous tous au Pds savons que les conditions n’étaient pas réunies pour que Karim revienne. Le meilleur exemple que je peux donner, c’est Khalifa Sall qui est en prison injustement et rien ne se passe. Il croupit en prison. Déjà, lorsqu’il était en prison, on n’a pas pu le faire sortir. Ce n’est pas lorsqu’on sera emprisonné pour une seconde fois qu’on le pourra. Il souhaitait venir mais il n’a pas pu. Sur 27 candidats, on écarte 22 de façon injuste et rien ne se passe dans le pays, c’est parce.
C’est peut-être parce que le Peuple est avec Macky Sall et n’écoute pas le discours de l’opposition ?
Il y a un problème. Les Sénégalais ont laissé Macky Sall trop faire. L’opposition a aussi laissé Macky trop faire à cause de l’incohérence de sa démarche. L’opposition avait formé un collectif pour se solidariser avec tous les recalés du parrainage, d’où la naissance du C25. Mais après, beaucoup voyaient comment se ranger derrière tel candidat, pensant pouvoir battre Macky Sall ou l’amener au second tour. L’important pour l’opposition, c’était de se battre pour installer une vraie démocratie. Tant qu’on ne se bat pas pour la démocratie dans notre pays, c’est peine perdue d’aller aux élections.
Le Pds rétorque à Oumar et Cie que ses textes n’autorisent pas de courant mais accepte des mouvements karimistes en son sein. Le parti n’est-il pas contradictoire ?
Ce n’est pas la même chose. Ce sont des mouvements qui soutiennent les actes du parti. C’est différent des dissidences des responsables que l’on voit aujourd’hui. Oumar Sarr et Cie défient publiquement le Secrétaire général et les directives du parti. Ça, les mouvements karimistes ne le font pas. Ce qui est fait dans la composition de Secrétariat national a toujours été ainsi. Ce fut le même procédé lorsque Oumar Sarr fut nommé coordonnateur. Je ne vois pas où se trouve l’illégalité dont ils parlent. Jusque-là ils acceptaient que les choses se passent ainsi. Si aujourd’hui ils changent de position, c’est à eux que l’on doit demander les raisons de ce changement. Il y avait des secrétariats nationaux avant ceux-là, des comités directeurs et il n’y avait aucun problème.
Durant son règne en tant que numéro 2, Oumar Sarr a-t-il bien tenu le parti ?
Je vais être honnête. Il a fait ce qu’il a pu. Il s’est donné avec d’autres responsables comme Me Sall, Babacar Gaye et nous tous ; chacun a participé pour la bonne marche du parti. Ça, c’est la période 2012-2019. Maintenant, il y a eu discordance et là il faut comprendre. La question qu’on doit se poser, c’est si les responsables du Pds sont prêts à s’opposer encore 5 ans contre Macky. C’est normal qu’après une Présidentielle, alors que le Pds entame une seconde phase d’opposition, que les gens, qui ne sont pas prêts, posent des actes pour partir.
«LES CATASTROPHES NOUS GUETTENT DANGEREUSEMENT »
C’est une mise en garde que le porte-parole du khalife général des Tidianes a formulée hier, lors de la ziarra annuelle de l’Achoura, un grand rassemblement des jeunes Tidianes du Sénégal à Tivaouane.
C’est une mise en garde que le porte-parole du khalife général des Tidianes a formulée hier, lors de la ziarra annuelle de l’Achoura, un grand rassemblement des jeunes Tidianes du Sénégal à Tivaouane. «Les catastrophes nous guettent et dangereusement. Et il y a des choses quand elles s’allument, personne ne peut les éteindre», prévient Serigne Pape Malick Sy qui préconise toutefois «des prières» et un Sénégal debout contre toute dérive. «Il faut beaucoup prier. Et ma conviction c’est que ce pays est protégé par les daaras. Il faut donc trouver des solutions à travers ces lieux d’enseignement pour voir comment s’en sortir.
Si on ne le fait pas, ce sera la catastrophe», dit-il. Le religieux a surtout insisté sur «l’union des cœurs», mais aussi de bannir les vices et d’arrêter de «dénigrer son prochain» parce que, dit-il, «le créateur à l’œil sur toute sa création». Ne s’épanchant pas trop sur la chose politique, le porte-parole de la famille Sy a toutefois signalé que la génération «Lamine Guèye et Senghor avait plus de chance en politique que celle de Abdoulaye Wade et Macky Sall». Parce que, dit-il, «les activités» de la première génération «étaient toutes financées par leurs compagnons», mais la seconde «est basée sur le chantage». «Ils n’ont pas de chance en politique. Ils sont mal tombés parce que leur génération c’est : ‘’donne moi je milite pour toi’’.
Alors que l’on ne doit pas faire ça en politique.» Aux nombreux jeunes qui ont pris part à la rencontre, Serigne Pape Malick Sy a demandé de s’ouvrir davantage dans «la recherche du savoir» parce que «vous êtes des jeunes et même si la vie d’un jeune est toujours en effervescence, il faut chercher le savoir parce que c’est très important dans votre vie». Aussi et paraphrasant son frère aîné Serigne Cheikh Tidiane Sy, «pour vivre longtemps, il faut égorger l’opinion publique pour avoir votre liberté parce que dans ce pays les gens ne font que parler». Il a demandé aux jeunes de s’inspirer de ce message de Al Makhtoum.
Joignant sa voix à celle du porte parole du khalife général des Tidianes, le responsable moral du dahira Mouqtafina, Serigne Moustapha Sy «Al Amine», de signaler que «quand un pays aspire à l’émergence, il doit préparer sa jeunesse». Ainsi il demande au Président Macky Sall de marquer encore «plus d’attention à la jeunesse sénégalaise. S’il le fait, il va réussir sa mission parce que c’est la jeunesse qui l’accompagne». Auparavant, le ministre de la Jeunesse Néné Fatoumata Tall, qui a conduit la délégation officielle, indique que le discours des marabouts de Tivaouane est un «viatique pour toute la jeunesse sénégalaise». Elle a surtout insisté sur la culture du civisme, de la citoyenneté, des valeurs et du savoir qui constituent d’ailleurs le fondement de l’école de Maodo
"SAINTE JEANNE D'ARC N’A NI RESPECT, NI CONSIDÉRATION POUR LE SÉNÉGAL"
Le Khalife général des Tidianes dénonce l’interdiction du port du voile au sein de l'ISJA
Le Khalife général des Tidianes dénonce l’interdiction du port du voile au sein de l’institut Sainte Jeanne d’Arc de Dakar. Il appelle les autorités, notamment les députés, à faire valoir leur rôle de représentants du Peuple en exigeant à cet institut de respecter la laïcité ou qu’il ferme ses portes au Sénégal.
L’institut Sainte Jeanne d’Arc de Dakar, qui se dit biculturel avec la cohabitation des cultures sénégalaise et française en son sein, est au cœur de la polémique depuis plusieurs jours. En décidant «que pour pouvoir franchir le seuil de l’école il faut, pour les garçons comme pour les filles, porter un informe de l’établissement, mais avec la tête découverte» (pas de voile à la tête), l’établissement s’est retrouvé au cœur de l’actualité de l’été. Une décision qui ne laisse pas indifférent le khalife général des Tidianes qui, dans une déclaration hier à la Médina, lors de la soirée de l’Achoura, l’a dénoncée avec la dernière énergie.
«On avait banalisé l’affaire de la pharmacie Guigon et ça passe. Maintenant, c’est au tour de l’école», Sainte Jeanne d’Arc d’interdire les filles qui la fréquentent de se voiler la tête. Une situation qui pousse Serigne Mbaye Sy Mansour à s’interroger sur l’existence de la laïcité et le rôle des députés qui représentent les Sénégalais à l’Assemblée nationale. «C’est quoi la laïcité ? Ou bien cela n’existe plus maintenant ? Quel est le rôle des représentants du Peuple», s’est il interrogé avant de les demander à «réagir» parce que, dit-il, c’est de leur «responsabilité» en ce sens que le gouvernement ne peut rien décider sans passer par l’Hémicycle. Par conséquent, il invite le gouvernement à discuter avec les députés afin de régler ce problème. Selon lui, «l’institut n’a ni respect ni considération pour le Sénégal».
Et pour s’expliquer, le marabout soutient que d’une part, cette école n’enseigne pas un programme qui émane du Sénégal même si ce sont les fils et filles du pays qui la fréquentent. D’autre part, elle impose aux filles de ne pas porter de voile. Pour Serigne Mbaye Sy, «s’il devait y avoir lieu d’exclusion de l’école, cela devrait être pour des élèves indisciplinés et qui ne travaillent pas non pas pour des filles qui n’ont fait que porter le voile».
Il appelle par ailleurs l’Etat à fermer les portes de l’institut Sainte Jeanne d’Arc si jamais les responsables refusent de se conformer à la laïcité qui prévaut dans le pays. Car «il ne doit y avoir aucun règlement intérieur que l’on mettra au-dessus de la Constitution sénégalaise», plaide le guide de Tivaouane.
L’IPAR, L’ARD ET L’UGB VEULENT ACCOMPAGNER LES JEUNES
Le consortium Conseil départemental de Podor, l’Ipar (Initiative prospective agricole), l’Ard (Agence régionale de développement), l’Ugb (Université Gaston Berger) veut mettre fin au chômage des jeunes dans cette zone du Fouta.
LE QUOTIDIEN |
Cheikh NDIONGUE |
Publication 11/09/2019
Le consortium Conseil départemental de Podor, l’Ipar (Initiative prospective agricole), l’Ard (Agence régionale de développement), l’Ugb (Université Gaston Berger) veut mettre fin au chômage des jeunes dans cette zone du Fouta. Dans cette perspective, il a organisé un forum avec la participation de tous les acteurs concernés et pour objectif d’aider les jeunes à identifier les opportunités de création d’emplois.
Si les vœux des parties prenantes de ce projet sont exaucés, les problèmes d’emploi et d’employabilité des jeunes du département de Podor devraient considérablement diminuer dans les mois à venir. En effet, les intentions émises lors de la cérémonie d’ouverture de ce forum de deux jours sont claires et porteurs d’espoir. Il s’agit, par le biais d’échanges, «d’informer et de sensibiliser les jeunes sur les opportunités de création d’emplois existantes aux niveaux national, régional, départemental et national, de mettre en contact ceux d’entre eux qui sont porteurs de projets et les acteurs offreurs d’emplois et de jeter les bases d’une plateforme de services pour l’emploi et l’employabilité des jeunes du département». Le président du Conseil départemental de Podor, principal initiateur du forum, précise que cette rencontre va dans le sens de trouver des solutions efficaces et durables aux problèmes d’emploi des jeunes. Pour Mamadou Dia, la question de l’emploi et de l’employabilité des jeunes est importante et nécessite une synergie d’actions entre les 22 Collectivités territoriales du département de Podor, les autres partenaires et les jeunes à travers le Conseil départemental de la jeunesse pour des solutions efficaces et applicables immédiatement. Selon Mamadou Dia qui a fait savoir que la Der et le ministère de la Formation professionnelle ont été déjà saisis pour accompagner les initiatives des jeunes, le Conseil départemental a inscrit dans son budget une ligne de 20 millions de francs Cfa pour accompagner les études des projets fiables et bancables, capables d’apporter de la plus-value dans le département. Le président du Conseil départemental a révélé, par ailleurs, qu’à terme l’objectif est de mettre en place une plateforme servant de réceptacle aux projets qui seront ainsi analysés et suivis par un pool régional de gestion des projets. Dans la même lancée, le directeur exécutif de l’Ipar a souligné que cette rencontre couronne l’importance d’un partenariat entre les Collectivités locales chargés de mettre en œuvre les politiques publiques et les jeunes. Cheikh Oumar Ba considère, en effet, que le forum est un cadre d’échange et de discussion autour de la question de l’emploi des jeunes dans un département où plus de 70% de la population est constituée de jeunes qui, souvent, prennent le chemin de l’émigration alors qu’ils ont beaucoup d’opportunités sur le plan local, notamment dans le département de Podor qui regorge de potentialités surtout sur le plan agricole. Plus de 200 jeunes venus des différentes communes du département de Podor ont participé à ce forum de deux jours qui devrait aussi déboucher, selon les organisateurs, sur des formations professionnelles pour les outiller davantage sur les perspectives attendues par les jeunes qui ont été invités par le président du Conseil départemental de la jeunesse à se rapprocher des structures mises en place par l’Etat pour les accompagner.
PAR Abdoulaye Oumar DIENG
DANS L’AFFAIRE DE LA COCAÏNE SAISIE AU PORT, LES DISPOSITIONS DU CODE DES DOUANES ONT-ELLES ÉTÉ SCRUPULEUSEMENT OBSERVÉES ?
Est-ce que la fausseté du procès-verbal de douane a été établie ? Si oui, par qui ? Est-ce que les prévenus se sont inscrits en faux contre le procès-verbal ? Si oui, est-ce que la procédure prévue en la matière a été observée ?
La presse sénégalaise fait état depuis quelques jours d’une liberté provisoire qui aurait été accordée aux 4 Européens impliqués dans l’affaire de la cocaïne saisie par la Douane sénégalaise au Port autonome de Dakar.
Si cette information est avérée, ne sommes-nous pas en face d’une violation des dispositions du Code des douanes, notamment en ses articles 428 et 344 ? L’article 428 du Code des douanes indique, en effet, que sous réserve des dispositions de la loi portant Code des drogues, les dispositions du Code des douanes s’appliquent en matière de stupéfiants, de substances psychotropes et de précurseurs. C’est-à-dire, lorsqu’une infraction portant sur des drogues est constatée par les agents des douanes sur procèsverbal, le Code des douanes s’applique automatiquement, sauf si le Code des drogues en dispose autrement. Autrement dit, le Code des douanes supplée le Code des drogues en cas de silence de ce dernier. Or dans le Code des drogues, il n’est fait mention nulle part de liberté provisoire (à moins que cela m’ait échappé). Un silence total est observé. Le seul article qui pourrait éventuellement être évoqué est l’article 138. Et celui-ci renvoie aux articles 87 bis et 372 bis du Code de procédures pénales, relatifs aux mesures conservatoires que le juge d’instruction ou le Tribunal peut ordonner sur les biens de l’inculpé pour garantir le paiement des amendes et confiscations. Dès lors, les dispositions du Code des douanes devraient s’appliquer en matière de détention préventive. A cet égard, l’article 344 dudit Code limite les pouvoirs d’appréciation des autorités judiciaires. Il dispose que le procureur de la République en cas de flagrant délit, le juge d’instruction lorsqu’une information est ouverte, délivrent automatiquement un mandat de dépôt, lorsque la valeur de l’objet de fraude est supérieure ou égale à 10 millions de francs ; qu’en outre, «la mainlevée du mandat de dépôt ne peut être ordonnée et la demande de mise en liberté provisoire, en tout état de cause, est subordonnée au paiement des droits et taxes dus, s’il y a lieu, ainsi qu’au versement d’un cautionnement égale au montant des droits et taxes dus ou au montant de la valeur de l’objet de fraude, lorsqu’il n’y a pas de droits compromis ou éludés». «Il n’y a d’exception à ces dispositions que si la fausseté du procès-verbal est établie ou si une transaction définitive a été réalisée». Est-ce que la fausseté du procès-verbal de douane a été établie ? Si oui, par qui ? Est-ce que les prévenus se sont inscrits en faux contre le procès-verbal ? Si oui, est-ce que la procédure prévue en la matière a été observée ?
Autant de questions que soulève la liberté provisoire annoncée par les médias. Si la fausseté du procès-verbal n’est pas établie, au regard des rappels ci-dessus, il me semble surprenant que la liberté provisoire ait pu être accordée sur l’affaire de la cocaïne saisie au port de Dakar. On comprendrait qu’une décision de relaxe ou de non-lieu fondée l’irresponsabilité du commandant du navire et des marins ait pu être ordonnée. Si tel était le cas, il importe de signaler que l’infraction douanière est essentiellement matérielle et qu’il pèse sur le commandant d’un navire une double responsabilité : Une responsabilité personnelle qui résulte de son fait propre, responsabilité pour laquelle il est passible d’une peine d’emprisonnement.
Dans cette affaire, est-ce le procès-verbal constatant l’infraction a établi une faute personnelle du commandant ? ; une responsabilité pénale du fait d’autrui fondée sur son devoir de surveillance, pour les infractions commises à bord de son navire. Il n’est pas nécessaire, ici, de prouver sa participation à l’infraction. Toutefois, les peines d’emprisonnement ne lui sont pas applicables. En tout état de cause, le procès-verbal rédigé par les agents des douanes constitue la pièce maîtresse de cette affaire. Il sert de base des poursuites. Nous n’en avons pas pris connaissance. Quoi qu’il en soit, il possède une force probante particulière. Si le juge d’instruction retient l’exception invoquée ci-dessus, relative à la fausseté du procèsverbal, la loi lui permet même de décider de la relaxe ou du nonlieu des prévenus. Mais dans tous les cas (liberté provisoire, relaxe ou non-lieu), l’Administration des douanes est en droit de saisir la Chambre d’accusation aux fins d’annulation de l’ordonnance accordant la liberté provisoire, la relaxe ou le non-lieu, si elle porte atteinte à ses intérêts.