L'ALTERNANCE EN TROMPE-L'ŒIL
Arrestations pour délit d'opinion, interdictions de sortie du territoire, conditions de détention dégradées : selon Afrikajom Center, la première année de Bassirou Diomaye Faye reproduit certaines dérives du régime précédent de Macky Sall

Afrikajom center a fait le bilan de l’an 1 de la présidence de Bassirou Diomaye Faye dans le premier numéro de sa publication intitulé Sunu GiS - GiS. il y examine tous les actes forts posés par le nouveau régime non sans mettre un coup de projecteur sur la situation des droits humains dans le pays. des tares du régime de Macky Sall persistent toujours.
L’an 1 du régime de Diomaye a été passé au peigne fin par le think tank Afrikajom Center. Résultat, entre 2024 et 2025, il a été enregistré plusieurs arrestations liées à des délits d'opinion, notamment dans le milieu de la presse, au sein de l'opposition politique et des activistes. “Ces arrestations ont suscité des protestations auprès de l'opinion publique, surtout dans le milieu des ONG internationales et locales de protection et de promotion des droits de l'Homme. Certains ont été arrêtés et détenus pour avoir émis une opinion critique ou dissidente du pouvoir”, lit-on dans la nouvelle publication de Afrikajom Center intitulée SUNU GisGis. Il a été également constaté à l’issue de la première année de gestion de Diomaye, plusieurs interdictions de sortie du territoire, visant certaines personnalités politiques sans notification et en l'absence de décision de justice préalable, ce qui a suscité des débats sur leur légalité et leur conformité avec les principes de l'État de droit.
Pour Alioune Tine et Cie, beaucoup de polémiques sur les détentions et les arrestations de journalistes, d'opposants politiques ou de dissidents pour fausses nouvelles ou offense au chef de l'État auraient pu certainement être évitées avec l'application des recommandations des Assises de la Justice. Ils estiment que malgré le changement de régime, des problèmes majeurs persistent. Il s’agit, notent-ils, de la restriction de l'espace civique avec les atteintes à la liberté d'opinion, d'expression et de la presse; les interdictions illégales de sortie du territoire de personnalités de l'opposition; la persistance des mauvaises conditions de détention; et la gestion difficile de la migration irrégulière.
En vue de renforcer la jouissance des droits civils et politiques et d'ouvrir l'espace civique, en plus des réformes annoncées, Afrikajom Center demande la libération de toutes les personnes arrêtées pour diffusion de fausses nouvelles; le respect rigoureux du régime déclaratif de manifestation; l’autorisation et l’encadrement des manifestations déclarées. Il estime d’ailleurs que les interdictions devraient être dûment motivées, en tenant compte de la jurisprudence de la Cour suprême en la matière. Il préconise aussi de promouvoir des peines alternatives à l'emprisonnement dans les cas de délits mineurs et dans les cas de délits d'opinion; de lutter contre les longues détentions préventives et d’encadrer la pratique de retour de parquet. Afrikajom Center demande en outre aux autorités de décrisper leurs relations avec la presse. A l’en croire, l’absence de concertation avec les acteurs concernés sur des décisions stratégiques concernant la presse crée malentendus, tensions inutiles et sape la portée des bonnes résolutions du gouvernement. Il les invite également à soigner les relations dégradées entre le ministre et les patrons de presse.
Pourquoi la mise en œuvre des fortes recommandations des assises nationales de la justice est retardée ?
Par ailleurs, il ne fait aucun doute que Sonko et Diomaye ont hérité d'institutions politiques et démocratiques obsolètes. Mais Afrikajom Center pense que les nouvelles autorités devraient engager dès maintenant toutes les réformes politiques et institutionnelles idoines pour engager avec succès la rupture historique promise par le projet. Selon le think tank dirigé par Alioune Tine, il est temps pour le gouvernement actuel de mettre en œuvre les recommandations des Assises nationales de la Justice, seul moyen pour l'État du Sénégal d'être en phase avec ses obligations internationales en matière de droits de l'Homme et de libertés fondamentales. Il est aussi temps, ajoute-t-il, de trouver les moyens d'endiguer le déficit de communication et de liens de confiance entre les gouvernants et les gouvernés, entre le pouvoir et la société sénégalaise.
Alioune Tine et Cie pensent aussi qu’au regard de l'héritage lourd et complexe du gouvernement de Bassirou Diomaye Diakhar Faye, l'impératif catégorique est de réconcilier, de rassembler, de dialoguer, d'apaiser et de réparer les liens qui sont cassés entre les gouvernants et certains citoyens. L'objectif final, disent-ils, est de trouver collectivement les remèdes les plus appropriés et les plus consensuels pour soigner le Sénégal face aux changements rapides et disruptifs auxquels notre monde est confronté. Dans le passé, rappellent-ils, si des condamnations avaient été faites par la justice sénégalaise, elles ont été rejetées au plan régional et international parce que le Sénégal n'a pas respecté ses obligations internationales relatives à un procès équitable. Ils précisent que la grande leçon à tirer des échecs de la reddition des comptes dans le passé est la suivante :“la violation des droits humains des prévenus et des accusés, notamment le droit à la défense, le droit à la présomption d'innocence et le droit à un procès équitable affaiblissent, voire discréditent les meilleures intentions politiques et les meilleurs actes de reddition des comptes”.
Ainsi, Afrikajom Center voudrait que les nouvelles autorités commencent par changer les vieilles structures, les vieilles institutions politiques d'une démocratie en crise, bref refonder aurait dû être le commencement. D'ailleurs, souligne le think tank, le Président Bassirou Diomaye Faye l'avait très bien compris, quand il a appelé les Assises de la Justice trois mois seulement après son investiture, comme un premier pas, et un pas très important, vers le changement systémique. Non sans déplorer enfin le retard dans la mise en œuvre des fortes recommandations, alors même qu'elles sont consensuelles.