FACE AU CLIMAT, L’AUTONOMISATION JURIDIQUE DES FEMMES COMME LEVIER D’ACTION
Natural Justice et le CRDI ont organisé ce mercredi un atelier de restitution de l’étude de base du projet « Améliorer l’implication des femmes rurales et péri-urbaines dans la gestion du changement climatique par l’autonomisation juridique ».

À Dakar, ce mercredi 18 juin 2025, Natural Justice et le Centre de Recherches pour le Développement International (CRDI) ont tenu un atelier national de restitution de l’étude de base du projet "Améliorer l’implication des femmes rurales et péri-urbaines dans la gestion du changement climatique par l’autonomisation juridique au Sénégal". Une rencontre qui a révélé à la fois l’urgence de l’action et la pertinence d’une réponse structurée, inclusive et fondée sur les droits.
Chercheurs, autorités publiques, membres d’organisations communautaires et représentants des institutions ont écouté, débattu et proposé. Le ton a été donné par Mouhamadou Lamine Seck, programme manager chez Natural Justice, qui a campé le décor : « Le démarrage du projet a nécessité que l'on fasse un état des lieux. Dans les zones côtières ciblées, comme Kayar, Bargny ou le Delta du Saloum, les femmes sont très actives dans la transformation du poisson, le maraîchage ou encore l’agriculture. Ce sont elles qui subissent de plein fouet les effets du changement climatique. »
À Kayar, la rareté du poisson affecte directement les revenus des femmes. À Bargny, l’avancée de la mer a emporté des habitations et des activités économiques. « Ce sont les femmes qui sont les premières à perdre leurs revenus, leurs repères, parfois même leurs foyers. Or, quand une famille est touchée au Sénégal, c’est d’abord la femme qui encaisse », a insisté M. Seck. Pour lui, la solution passe par l’autonomisation juridique, un outil de transformation sociale : « Nous voulons leur faire comprendre qu’elles ont le droit de siéger dans les instances décisionnelles, et que leur présence doit être de qualité. »
Le représentant du CRDI, partenaire du projet, a élargi la perspective en soulignant l’importance du lien entre justice climatique et démocratie participative : « Ce projet répond à une double urgence : climatique d’une part, et démocratique d’autre part. Il ne suffit plus que les femmes soient des bénéficiaires. Elles doivent devenir des actrices des politiques publiques. »
Selon lui, l’autonomisation juridique n’est pas un concept abstrait, mais « une stratégie de transformation sociale, qui permet aux communautés de faire valoir leurs droits, de participer à la gouvernance nationale, et de transformer les rapports de pouvoir ». « La recherche que nous soutenons au CRDI n’a pas vocation à finir sur une étagère. Elle doit produire du changement concret », a-t-il conclu.
Pour sa part, Mme Gassama, membre du Comité de pilotage du projet, a insisté sur la nécessité d’un passage rapide à l’action. « La recherche est essentielle, mais elle ne suffit pas. Elle doit éclairer les décideurs, influencer les politiques, et surtout changer le quotidien des femmes », a-t-elle déclaré. Elle a dénoncé l’exclusion des femmes des cercles de décision : « On continue de décider à leur place. Elles sont souvent absentes parce qu’occupées ou peu formées. Ce projet renforcera leurs compétences pour un plaidoyer efficace en faveur de la justice environnementale. »
Le représentant de l’État, Ousseynou Ndione, chargé de programme au ministère de l’Environnement, a salué l’initiative tout en rappelant les efforts déjà engagés par les pouvoirs publics. « Le gouvernement du Sénégal promeut l’intégration du genre dans toutes ses politiques climatiques, y compris dans les plans nationaux d’adaptation et la contribution déterminée au niveau national (CDN). La nouvelle version de la CDN renforcera encore davantage cette prise en compte », a-t-il affirmé. Il voit dans les résultats de cette étude une opportunité de consolidation. Ce type d’initiative favorise une meilleure articulation entre la recherche, les politiques publiques et les besoins des communautés. Il nous revient maintenant, en tant qu’État, de nous appuyer sur ces données pour aller plus loin dans l’inclusion, a-t-il ajouté.