L'ALERTE DES EXPERTS SUR L'OPACITÉ BUDGÉTAIRE PERSISTANTE
Le nouveau régime ne publie plus les rapports trimestriels d'exécution budgétaire, alerte l'International Budget Partnership. Un manquement grave aux obligations de transparence dans un contexte où la bonne gouvernance est proclamée comme priorité

Des rapports techniques sous le magistère du nouveau régime ne sont pas toujours publiés. Parmi ceux-ci, on peut citer le rapport trimestriel d'exécution budgétaire. Selon Malene Amadou Niang, directeur pays de l'International Budget Partnership (IBP), la non publication de ces documents constitue un manquement en matière de transparence dans la gestion des ressources publiques.
Le rapport trimestriel d'exécution budgétaire n'est toujours pas encore publié par le nouveau régime. La révélation a été faite par Malene Amadou Niang, directeur pays de l'International Budget Partnership (IBP). Il s'exprimait hier, mardi 27 mai lors d'une table ronde portant sur le thème « Sénégal : analyse de la situation économique et perspectives avec l'agenda 2050 », organisée par Wathi en partenariat avec Konrad Adenauer.
« Les obligations en matière de transparences sont des obligations qu'on ne peut pas déroger. Les rapports techniques doivent être publiés. Le rapport trimestriel d'exécution du budget doit être transmis à l'assemblée nationale et disponible pour le grand public à travers les plateformes du ministère des finances. Une information qui n'est pas disponible à temps est une information qui n'est pas utile. Parce qu'il faut que le contrôle puisse s'opérer et il faut que l'information soit disponible au moment où elle fait sens », déplore-t-il.
Selon lui, l'exécution du budget en l'espèce fait sens au moins après le trimestre pour permettre en cours d'année de voir comment les ressources sont utilisées, leur destination, leur évolution en glissement annuel de l'année précédente à l'année en cours, le niveau d'engagement de liquidation et de mandatement des paiements.
Malene Amadou Niang a également signalé que les rapports sur les dépenses fiscales n'ont pas fait l'objet de publication depuis des années. « Il y a un calendrier de publication de certains documents. Il y a des rapports qui ne sont pas vus depuis très longtemps notamment les rapports sur les dépenses fiscales, c'est-à-dire toutes les exonérations que le Sénégal consent dans l'objectif de favoriser la croissance. Ce rapport doit être publié et doit être annexé annuellement à la loi de finances pour permettre aux députés de voir les pertes de recettes fiscales que le Sénégal est en train de connaitre et donc de demander à l'Etat de corriger au besoin. Le dernier rapport qui a été publié est celui de 2021 », relève-t-il.
Selon lui, tous ces manquements relevés constituent un recul en matière de transparence. « C'est quelque chose qu'on ne peut pas se permettre dans un contexte où le maitre-mot c'est la bonne gouvernance. La transparence c'est respecter ses obligations quel que soit le contexte, c'est avoir de l'information exhaustive, vraie, fiable et disponible. Malheureusement, tant que cette information n'est pas disponible et que les Sénégalais ne se saisissent pas de la gestion des ressources publiques pour en faire le débat de société, l'attention sera portée sur d'autres questions et on sera toujours au risque de voir les ressources publiques utilisées dans les conditions qui ne répondent pas aux besoins des Sénégalais », insiste-t-il.
Gilles Yabi, directeur exécutif du Think Thank citoyen en Afrique de l'Ouest Wathi invite les nouvelles autorités, au-delà de la redditions des comptes, à tirer les leçons afin que ces détournements de deniers publics ne se reproduisent pas. A cet effet, il pense que le renforcement de l'indépendance des institutions de contrôles des comptes publics peut mener à de vrais changements. Pour lui, la reddition des comptes est un élément essentiel de la gouvernance démocratique et doit être quelque chose de permanente.