17,2 MILLIARDS DE DOLLARS DE PERTES EN RECETTES FISCALES
En Afrique, les pertes fiscales sont en repli, mais elles restent importantes. Elles sont estimées au budget annuel nécessaire pour vacciner 82,1% de la population du continent contre la Covid-19.

En Afrique, les pertes fiscales sont en repli, mais elles restent importantes. Elles sont estimées au budget annuel nécessaire pour vacciner 82,1% de la population du continent contre la Covid-19.
L ’édition 2021 du rapport sur l’état de la justice fiscale dans le monde, publié par le consortium constitué de Tax Justice Network, Public Service International et Global Alliance for Tax Justice, révèle que les pertes d’impôts liées à l’évitement fiscal par les plus riches et l’évasion fiscale des multinationales ont fait perdre à l’Afrique un montant estimé à 17,1 milliards dollars de recettes fiscales. L’étude relève un repli de 8,3 milliards dollars par rapport à la situation présentée dans le rapport inaugural de cette enquête en 2020 qui indiquait que le continent perdait jusqu’à 25,4 milliards dollars de recettes fiscales. La baisse a été particulièrement marquée au Nigeria où les estimations de pertes fiscales ont reculé de 8,8 milliards dollars pour se situer à 2,05 milliards dollars.
PRETORIA, LE GRAND PERDANT EN AFRIQUE
Le grand perdant de cette fraude fiscale internationale sur le continent africain est l’’Afrique du Sud, avec des pertes de recettes estimées à 3,5 milliards dollars. Les autres pays africains dans lesquels les choses se sont significativement améliorées sont l’Angola et l’Egypte où les estimations de pertes fiscales sont en recul respectivement de 1,8 milliard dollars et de 1,3 milliard dollars.
Toutefois, le rapport n’apporte pas des précisions sur les causes exactes de ce repli. Pour ce qui est du Nigeria et de l’Angola, il s’impose d’examiner les impacts qu’ont eus les restrictions d’accès aux devises pour les agents économiques notamment étrangers, le repli de l’activité économique du fait de la pression sur le prix du pétrole et les évolutions au sein de leurs administrations fiscales. Pour l’essentiel, les pertes fiscales ont été contenues dans bon nombre de pays du continent, excepté ceux de la région Afrique centrale où les choses se sont aggravées. Le Tchad est le pays où l’évasion fiscale aurait le plus progressé dans la région, avec une augmentation des estimations de pertes de l’ordre de 1,6 milliard $. Le Congo-Brazzaville (+460 millions dollars), le Cameroun (+175,3 millions dollars) et le Gabon (+93,6 millions dollars) sont les trois autres pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) qui figurent dans le top 10 des hausses de pertes fiscales en Afrique.
L’ARRET D’EVITEMENT FISCAL PEUT PERMETTRE DE CORRIGER LE GAP VACCINAL
Même si les pertes fiscales reculent en Afrique, le fait même qu’on ne puisse dissocier l’impact des réformes fiscales de celui de la baisse généralisée au sein des économies de la région devrait constituer un motif de réflexion. Pour les experts du réseau sur la justice fiscale, ces pertes sont de trop, pour une région qui clairement ne parvient pas à faire vacciner sa population face à la pandémie de Covid-19 et qui fait face à une aide jugée «hypocrite» des pays riches, notamment ceux de l’Organisation de coopération et de développement économiques (Ocde).
Pour certains pays considérés comme les plus pauvres de la région, les conséquences sont sérieuses. C’est le cas du Tchad, dont les estimations de pertes fiscales représentent 17,1% de son Produit intérieur brut (PIB), et jusqu’à 1800% de son budget de santé publique. Au total, le pays a perdu près de 2 milliards $ de recettes fiscales. Ce montant représente deux fois la dette que lui réclame actuellement le Suisse Glencore. Les Seychelles perdent 11% de leur PIB, et cela représente 310,8% du budget alloué à la santé. Si on peut aujourd’hui estimer les pertes fiscales des pays du fait des multinationales, c’est particulièrement grâce à l’analyse des données financières publiées pays par pays dans le cadre de l’Ocde. Tax Justice Network, la pionnière de ce mode de divulgation des informations financières par les groupes présents dans le monde, recommande aujourd’hui qu’il se généralise dans toutes les régions.