BRAS DE FER SOCIAL À LA MINE DE SABODALA
Le collège des délégués de Sabodala Gold Operations dénonce une "rupture brutale" du dialogue social, alors que l'accord d'établissement conclu en 2016, bien qu'expiré depuis 2021, continuait à s'appliquer sous forme indéterminée

Le collège du personnel des délégués de la société minière Sabodala Gold Operations (SGO) a jugé "abusive" la mesure envisagée par la direction de Endeavour Mining concernant une nouvelle organisation du temps de travail et la fin de l'accord d'établissement liant l'entreprise à ses travailleurs depuis 2016, a constaté l'APS.
Le 16 mai dernier, la direction de Endeavour Mining de Sabodala a porté à l'attention des délégués du personnel une mesure de l'entreprise relative à l'organisation du temps de travail et l'état d'application de l'accord d'établissement conclu le 30 septembre 2016.
Cet accord qui était à durée déterminée, bien qu'ayant expiré depuis 2021, a continué à produire ses effets sous la forme d'un accord à durée indéterminée. "Le mois de mars dernier, notre direction nous a conviés pour nous faire part d'une crise économique, et cela n'existe pas parce qu'il y a une forte augmentation de la production de la mine ici, à Sabodala. Et nous avons conclu un accord pour une durée déterminée de cinq ans renouvelable par écrit qui a permis d'instaurer un cadre adapté à l'activité de l'entreprise", a fait savoir Abdou Khadre Ba, membre du collège des délégués du personnel de Endeavour Mining de Sabodala.
Toutefois, certaines dispositions, relatives notamment à la rémunération des heures supplémentaires, se sont avérées contraire à la législation en vigueur.
Pour y remédier, les parties prenantes ont conclu des protocoles correctifs entre 2022 et 2024 avec l'implication du ministère du Travail, a affirmé Abdou Khadre Ba au cours d'un point de presse à la direction régionale de Endeavour Mining, dans la ville de Kédougou, en présence de tous les membres du collège des délégués de la société minière de droit canadien.
Le collège du personnel, par la voix de Abdou Khadre Ba, a dénoncé ces accords que Sabodala Gold Opérations leur a notifiés le 17 avril 2025 et qui interviennent plus d'un an après que les représentants du personnel ont eux-mêmes notifié leur volonté de renégociation par courrier du 13 février 2024. M. Ba a souligné, cependant, que "la direction générale de Endeavour Mining a estimé qu'à défaut d'un nouvel accord à compter du 16 mai 2025, l'accord de 2016 n'ayant plus d'effet, elle procédera dès le 1er juin à la mise en place d'une nouvelle organisation du temps de travail sans l'accord des travailleurs". Selon lui, le collègue du personnel conteste la "rupture brutale" et "juridiquement mal fondée" du dialogue par la direction de Endeavour Mining.
"La décision unilatérale de Sabodala de mettre fin aux discussions collectives en cours et de procéder à la mise en place d'une nouvelle organisation du temps de travail repose sur une lecture manifestement erronée des dispositions conventionnelles et légales applicables", dénonce-t-il. Il a ajouté que "non seulement cette rupture du dialogue social constitue une violation du principe de bonne foi dans la négociation collective, mais elle entraîne également une atteinte grave aux droits contractuels et conventionnels des salaires acquis dans le cadre de l'accord d'établissement conclu en 2016".
Abdou Khadre Ba a invité la direction de Endeavour Mining de Sabodala à maintenir l'accord de 2016 jusqu'à l'aboutissement d'un nouvel accord. "C'est une exigence légale que nous leur demandons tout simplement, mais également une condition de stabilité et de paix sociale de l'entreprise", a-t-il plaidé.
Contacté par l'APS, le directeur de la communication de Endeavour Mining, Albert Stanislas, a indiqué que la mine a investi plus de 200 milliards francs CFA dans le développement du site de Sabodala-Massawa. "Malgré cet engagement massif, la production s'est établie à 294 000 onces en 2023, 229 000 onces en 2024 et une prévision de 250 000 à 280 000 onces en 2025. Et ce sont des résultats qui ne reflètent le niveau d'investissement engagé", a-t-il déclaré.
Selon Albert Stanislas, la direction de Sabodala Gold Operations a initié pendant "plusieurs mois" un dialogue approfondi avec les partenaires sociaux afin de repenser le cadre de travail et d'adapter le modèle social aux nouvelles réalités opérationnelles. "Un projet de nouvel accord d'établissement a ainsi été proposé, articulé autour de deux piliers structurants, notamment la préservation de tous les emplois en réduisant la dépendance aux heures supplémentaires et en créant plus de 100 nouveaux postes prioritaires destinés aux talents issus des communautés locales", a-t-il avancé.
Selon lui, le nouvel accord instaure également un système de rotation consistant en dix jours de travail incluant 1 jour de repos sur site, suivis de dix jours de repos complet en offrant "un meilleur équilibre de vie" (6 mois non travaillés rémunérés dans l'année), plus de repos et une gestion optimisée de la fatigue. Il a déclaré que ce nouveau contrat social prévoit des mesures d'accompagnement individualisées avec des discussions en cours pour garantir une mise en œuvre progressive et partagée.
La direction de Sabodala Gold Opérations "a réaffirmé son engagement en faveur d'un dialogue social ouvert, responsable et tourné vers l'avenir", a-t-il assuré.
Le directeur de la communication de Endeavour Mining a précisé qu'aucune suppression de poste n'est envisagée, contrairement à ce qui est écrit, de plus il estime que le système de rotation est très avantageux pour les salariés car cela revient à 6 mois non travaillés rémunérés dans l'année.
Le collège du personnel des délégués de Sabodala, pour sa part, menace de déposer un préavis de grève dans les prochains jours au niveau de l'inspection du travail et de la sécurité sociale de Kédougou.