LE FMI ATTEND LES CHIFFRES DE SONKO
L'institution refuse tout nouveau programme de financement tant que l'audit final sur le trou budgétaire de 7 milliards de dollars découvert sous Macky Sall ne sera pas bouclé, laissant le Sénégal face à des besoins urgents de 2 milliards de dollars

(SenePlus) - Le Fonds monétaire international (FMI) maintient sa position ferme concernant le Sénégal : aucun nouveau programme de financement ne sera discuté tant que la lumière ne sera pas faite sur le trou budgétaire de 7 milliards de dollars découvert sous l'ancienne administration. Cette révélation, rapportée par Bloomberg, confirme l'impasse dans laquelle se trouve le pays dirigé par Bassirou Diomaye Faye.
« Nous attendons les résultats de l'audit final » suite à un examen antérieur qui a révélé que l'administration de l'ancien président Macky Sall avait mal déclaré les données sur la dette et le déficit budgétaire, a déclaré jeudi la porte-parole du FMI, Julie Kozack. « En ce qui concerne le nouveau programme, nous n'avons actuellement pas de calendrier fixe pour un nouveau programme », a-t-elle précisé selon Bloomberg.
Le FMI a suspendu le programme de 1,8 milliard de dollars du pays en octobre après les découvertes faites par le président Bassirou Diomaye Faye. Le ministre des Finances Cheikh Diba espérait pourtant entamer les négociations sur un nouveau package avec le prêteur dès avril et obtenir un financement d'ici la fin juin, rapporte Bloomberg.
Cette suspension intervient après que la Cour des comptes a révélé en janvier l'ampleur des falsifications budgétaires. Le fardeau de la dette du Sénégal s'élevait à près de 100% du produit intérieur brut en 2023, et non aux 74% du PIB déclarés sous Sall. Le déficit budgétaire atteignait 12,3% du PIB cette année-là, soit plus du double des 4,9% rapportés officiellement.
Le pays fait face à des besoins de financement exceptionnels d'environ 2 milliards de dollars, selon le projet de loi de finances 2025 cité par Bloomberg. La suspension a également limité son accès aux marchés internationaux de capitaux, compliquant davantage la situation financière.
Malgré cette situation critique, le Premier ministre Ousmane Sonko a adopté une posture de défi, affirmant que le Sénégal pourrait ne pas avoir besoin de nouveaux financements du FMI. « Le programme avec certains donateurs multilatéraux, en particulier le FMI, a été suspendu pendant un an. Aucun décaissement n'a été fait au Sénégal mais le Sénégal tient toujours debout », a-t-il déclaré aux investisseurs le mois dernier selon Bloomberg.
Les conséquences de cette crise de confiance se font déjà sentir sur les marchés. Moody's Ratings et S&P Global Ratings ont abaissé l'évaluation du crédit du Sénégal plus profondément en territoire spéculatif plus tôt cette année suite aux révélations sur les falsifications budgétaires.
Il reste à voir si le Conseil d'administration du FMI demandera au Sénégal de rembourser les 700 millions de dollars déjà déboursés dans le cadre de l'arrangement qui a été interrompu, ou s'il accordera au pays une dérogation et lui permettra de rembourser le prêt dans le temps, comme convenu initialement, note Bloomberg.
Julie Kozack a souligné que le FMI continue de travailler avec le gouvernement pour traiter les fausses déclarations, ce qui nécessite « un processus rigoureux ». Cette approche méthodique illustre la gravité de la situation et la détermination de l'institution financière internationale à rétablir la confiance avant toute reprise de la coopération.
L'affaire sénégalaise constitue un cas d'école sur les conséquences des manipulations budgétaires dans les relations avec les institutions financières internationales. Elle souligne également les défis auxquels font face les nouveaux dirigeants africains pour restaurer la crédibilité de leurs pays après des années de gestion opaque.