«LE MODELE D’IMPORTATION ECONOMIQUE DU PAYS NE PERMET PAS UNE MAITRISE DES PRIX»
Selon l’économiste Maissa Babou, le modèle d’importation économique du pays ne permet pas une maîtrise des prix.

L’économiste Maissa Babou regrette qu’après la grande messe à l’Assemblée nationale, où l’année 2023 a été décrétée comme sociale et tout le folklore du ministre du Commerce qui a fait tous les plateaux pour dire que le gouvernement va injecter 750 milliards pour soutenir les prix, après donc tout ce tintamarre, l’économiste estime que la déception est plus grande, surtout dans les foyers. Les femmes sont plus exposées même si c’est les hommes qui donnent ce qu’ils peuvent pour la dépense quotidienne. Il précise que les femmes sont tellement exposées qu’elles ne se retrouvent plus dans cette inflation couplée à une baisse des subventions étatiques.
Selon l’économiste Maissa Babou, le modèle d’importation économique du pays ne permet pas une maîtrise des prix. Lorsque le gouvernement avait fixé les prix de l’oignon et de la pomme de terre à 500 frs le kilogramme, il aura suffi juste une semaine pour qu’ils passent à 800 frs. Aujourd’hui, constate-t-il, les prix sont extrêmement chers au niveau de la location et de la nourriture. Ce qui fait qu’il faut être un Sénégalais de la couche moyenne pour nourrir sa famille avec 5000 frs par jour. « Beaucoup se nourrissent avec 2000 frs par jour avec de la bouillie ou d’autres choses pour la famille. La souffrance est là. Et elle s’est beaucoup plus accentuée avec le ramadan où les Sénégalais aiment beaucoup manger le soir. C’est une situation regrettable. Entre le vécu quotidien de nos compatriotes, une rentrée sociale et l’annonce de rentrées fiscales grâce au pétrole, tout le monde pensait qu’on allait passer une bonne année 2023. Hélas, nous sommes exactement dans le cas contraire », déplore l’économiste Maissa Babou.
A l’en croire, les Sénégalais sont dans ce qu’on appelle le système D, comme débrouille. Il s’agit d’une phase d’accélération de la pauvreté avec une croissance d’une frange de la jeunesse qui passe entre 25 à 35 ans. « Quand vous n’avez pas une économie capable d’engranger de l’emploi car des institutions de micro financement comme la DER et autres ne sont que des solutions politiques et non économiques, quand la famille sénégalaise est élargie et que la dépense quotidienne devient problématique, la situation du Sénégalais lambda est extrêmement critique pour ne pas dire pauvre. Nous ne sommes pas plus d’un million de travailleurs voire deux millions au maximum pour nourrir 17 millions d’habitants et toutes les activités aujourd’hui sont extrêmement difficiles », peint en noir Maissa Babou.
Le Sénégal, relève-t-il, est un pays tellement cher que les sources d’énergie de ces petites activités de petits paiements sont en faillite. « Au lieu d’avoir une économie qui crée des emplois, nous avons beaucoup plus des situations de déficits et de fermeture d’entreprises qui accentuent aussi ce chômage-là. Ce qui fait que la situation est très difficile pour le Sénégalais lambda. Je crois qu’on n’a pas encore appris de l’histoire. Nos dirigeants, malheureusement, sont dans une politique du « voyez-moi » avec des projets pharaoniques dont les rendements sociaux et économiques sont extrêmement limités et qui nous coûtent très cher », se désole encore Maissa Babou.
L’économiste considère qu’un TER, coûtant mille milliards de francs, ça aurait pu être les investissements de trois années dans le secteur agricole pour atteindre l’autosuffisance alimentaire. C’est d’ailleurs la même chose avec des autoroutes à péage à l’infini qui nous coûtent les yeux de la tête. Ce alors qu’au de-là de Thiès et de Mbour, il n’y a rien. L’expert en économie recommande la reconstruction des routes nationales pour moins cher au lieu de se lancer dans des BRT qui ne créent pas d’emplois. Il estime que ces grands travaux ne sont pas des activités à rentabilité sociale. « On fait fausse route. Raison pour laquelle, aujourd’hui, l’énergie coûte très cher dans un pays où le soleil est là toute l’année. On n’a rien fait dans l’agriculture pour ne pas être dépendant de l’extérieur. Surtout, nous ne sommes pas à l’abri d’un nouveau choc extérieur car, si nous ne faisons pas attention, une crise économique peut nous secouer. Nous n’avons pas fait d’efforts sur des secteurs comme la pêche qui peuvent créer des emplois. Depuis l’indépendance jusqu’à nos jours, les choix politiques sont nos problèmes. Nous avons des dirigeants qui sont plus dans des réalisations qui feront parler d’eux qu’autre chose », a conclu Maissa Babou.