VIDEOLE VIOL, CETTE PLAIE BÉANTE DE LA SOCIÉTÉ SÉNÉGALAISE
"Si tu racontes, je vais te tuer." Ces, prononcés par un violeur à sa victime de 23 ans, illustrent la double peine des survivants d'agressions sexuelles au Sénégal : subir l'horreur, puis être condamnées au silence

Le viol continue de faire des ravages au Sénégal, où chaque jour de nouveaux cas font la une des médias. Un récent reportage met en lumière le témoignage bouleversant d'une jeune femme de 23 ans, victime d'une agression sous la menace de mort, un drame parmi tant d'autres qui souligne l'ampleur du phénomène dans le pays.
Selon des enquêtes récentes, le Sénégal a recensé plus de 2000 cas de violence, s'inscrivant dans un contexte mondial alarmant où 223 millions de personnes sont victimes de violences. Pour la seule année 2014, plus de 1000 personnes, majoritairement des femmes, ont consulté pour des cas de divorce, de défaut d'entretien ou de violence conjugale.
"La majeure partie est constituée des femmes", confirme un spécialiste interrogé dans le reportage, précisant que "38% des dossiers aboutissent à une décision judiciaire". Cependant, ces sanctions, comme les 10 ans d'emprisonnement ferme et les 3 millions de francs CFA d'amende dans un cas mentionné, sont souvent jugées insuffisantes par les victimes et leurs proches. "On doit les condamner à vie. Ils ont laissé leurs femmes et leurs enfants et sont venus ici pour violer une petite fille innocente", s'indigne un témoin.
Les professionnels de santé alertent sur les multiples conséquences de ces agressions : traumatismes gynécologiques pouvant affecter la vie génitale future, risques d'infections graves comme le VIH/SIDA ou l'hépatite, et surtout des séquelles psychologiques durables. "C'est un acte qui détruit quelque chose de fondamentalement déterminant chez tout être humain : le sentiment de sécurité", explique un psychologue.
Plusieurs facteurs sont identifiés comme contribuant à la persistance de ces violences : le manque d'éducation, les mariages précoces sans préparation adéquate, et l'insuffisance d'encadrement pour les jeunes hommes concernant le respect des femmes.
Malgré l'existence d'un arsenal juridique au Sénégal, incluant la constitution, le code de la famille et l'adhésion à la déclaration universelle des droits de l'homme, les experts appellent à "une action dynamique et beaucoup plus élargie" impliquant autorités, système judiciaire et leaders religieux et coutumiers.
"L'islam interdit même qu'on fasse violence aux arbres. Tu n'as pas le droit de couper une branche dont tu n'as pas besoin, à plus forte raison de maltraiter un animal, à plus forte raison un être humain, à plus forte raison une femme qui est vraiment un être très fragile", rappelle un leader religieux.
Face à ce fléau, l'urgence de trouver des solutions efficaces est plus que jamais d'actualité, alors que de nombreuses victimes continuent de souffrir en silence, souvent dissuadées de porter plainte par la peur ou la honte.