ARÈNE NATIONALE CONTRE ARÈNE POLITIQUE
L'arène politique devait tirer l'arène de lutte vers le haut. Mais manifestement c'est le contraire qui se produit. Il y a actuellement beaucoup plus de sollicitude, de lucidité, de respect de l'adversaire et d'humanité chez les lutteurs

C'est connu. Les lutteurs sénégalais sont tout sauf des enfants de choeur. Les face-à-face qui précèdent souvent les grands combats sont très explosifs. Et les escarmouches sont légion entre les adversaires. Mais ça s'arrête là.
En effet, après les combats âprement disputés dans l'arène, le fair-play et l'humanisme reprennent immédiatement leur droit. C'est ce qu'on a constaté par exemple, dimanche dernier après le combat entre Balla Gaye 2 et Siteu, qui, pourtant a déchaîné les passions avant le choc. Les deux champions ont bandé les muscles avec des joutes verbales parfois incontrôlées. Mais tout le monde a vu après l'affrontement, le vaincu en l'occurrence Balla Gaye II, malgré une défaite très amère, féliciter son adversaire.
Dans le même sillage, la mère de Siteu a rendu visite à Balla Gaye pour l'encourager et formuler pour lui des prières après sa cuisante défaite. Des gestes qui redonnent à la lutte toutes ses lettres de noblesse. Tout cela dans un contexte où le ministre du Sport, en collaboration avec les acteurs de cette discipline, commencent peu ou prou à endiguer l'anarchie qui plombait ces grands événements. Tous les combats n'excèdent pas 19h. Une décision courageuse du ministre du Sport qui amenuise les casses, les vols et les violences après les combats. La lutte attire de nouveau. Tout le contraire de «l'arène» politique qui perd le nord. Ses dépositaires ne prennent plus de précaution. Tout va à vau-l’eau. On sait depuis Camus qu'un homme ça s'empêche. Mais l'élite politique ne s'empêche plus. Et la preuve la plus éclatante de cette déliquescence a été donnée récemment par un ministre de la République, habitué des fourvoiements médiatiques, qui promeut sans ambages le culte de l'insulte. Les hommes politiques sénégalais n'ont plus d'allure dans leur manière de faire. Ils sont pour la plupart haineux, opportunistes, nihilistes. Voraces.
L'arène politique devait tirer l'arène de lutte vers le haut. Mais manifestement c'est le contraire qui se produit. Il y a actuellement beaucoup plus de sollicitude, de lucidité, de respect de l'adversaire et d'humanité chez les lutteurs que chez les politiciens. Peut-être là aussi, une révolution épistémique qui ne dit pas son nom et qui mérite réflexion.