HABITUDES TOXIQUES
Dieu a créé la femme et lui a donné la forme, la couleur et le teint qu’Il a voulus. Celles qui sont belles veulent l’être davantage. Les autres veulent avoir un teint encore plus éclatant, une peau blanche et en font même une obsession.

Dieu a créé la femme et lui a donné la forme, la couleur et le teint qu’Il a voulus. Certaines sont nées belles comme Psyché, Néfertiti, Cléopâtre, Aphrodite, Pénélope, Daphné, Eurydice, Vénus ou encore Lakshmi, d’autres assez belles et le reste, pas belles du tout. En langage clair, cela veut dire que la beauté ne se décrète pas, c’est un don. Mais aujourd’hui, nombreuses sont ces femmes qui se sentent très mal dans leur peau.
Celles qui sont belles veulent l’être davantage. Les autres veulent avoir un teint encore plus éclatant, une peau blanche et en font même une obsession. C’est la course à l’éternelle beauté. Dans ce monde où l’apparence physique joue un rôle très important, la chirurgie esthétique, réservée aux bourses bien garnies, est devenue un moyen pour toujours rester belle. Dans de nombreux pays, les femmes, au nom du progrès, sont de plus en plus enclines à s’offrir un corps à la commande. C’est même devenu chez elles un véritable fantasme. Normal, car aujourd’hui, la beauté est considérée comme une clef sociale. Et comme le disait si bien Aristote, « la beauté est une meilleure recommandation que n’importe quelle lettre ».
Si dans les pays développés de plus en plus de femmes font recours à la chirurgie esthétique pour atteindre l’idéal, au Sénégal, ces interventions ne sont pas à la portée de toutes les bourses. Les moins nanties se tournent alors vers la dépigmentation cutanée volontaire (Dcv) ; une pratique de blanchissement de la peau banalisée dans notre société. Pour paraître toujours belles, elles n’hésitent pas à renier leur couleur, à faire souffrir leur épiderme en utilisant des produits pharmaceutiques à base de corticoïdes, hydroquinone et dérivés mercuriels détournés de leur indication initiale. Ce qui était, au départ, considéré comme un simple phénomène de mode et esthétique est aujourd’hui devenu un problème de société et de santé publique. En effet, les adeptes s’exposent à des maladies comme l’hypertension artérielle, le diabète, les complications rénales et neurologiques, le cancer.
Selon certains spécialistes, les corticoïdes contenus dans les produits éclaircissants ont non seulement des effets dévastateurs sur la peau, mais aussi, une fois dans le sang, augmentent les risques d’hypertension, de diabète, d’ulcère ou de troubles psychiatriques. Jadis, la dépigmentation se limitait à l’application de crèmes et lotion corporelles sur la peau. Aujourd’hui, la tendance a complètement évolué. Pour altérer leur teint en un temps record, les adeptes de la dépigmentation ont recours à des injections à base de glutathion, un antioxydant prescrit, selon les experts, aux patients atteints de cancer ou de la maladie de Parkinson, avec des risques de mort subite de plus en plus élevés. Tous ces risques, vous dira-t-on, pour plaire aux hommes qui, souvent, semblent avoir un penchant pour les teints plus clairs. Effet de mode ou complexe, certaines femmes, à force de vouloir être coquettes en arrivent à perdre totalement leur identité.
Et il n’est pas rare de croiser des dames à plusieurs couleurs, parfois même avec un visage complètement cramé. Cela n’est rien à côté des tâches et points noirs sur leurs corps, les vergetures inesthétiques au niveau de leurs poitrines, leurs seins et leurs cuisses… La 3e édition du congrès international de la Société sénégalaise de dermatologie organisé récemment à Dakar et qui a vu la participation de centaines d’experts issus de 14 pays d’Afrique (300). Ces spécialistes qui ont planché sur le thème « La dermatologie au carrefour des spécialités médico-chirurgicales » ont plaidé pour la règlementation de l’importation et de la vente des produits destinés à la dépigmentation pour en réduire ses effets dévastateurs. Un combat qui risque de ne pas être gagné de sitôt, surtout dans une société où le complexe face à la peau claire ne cesse de s’accentuer. Le hic est qu’une fois qu’on commence à s’adonner à la dépigmentation, ça devient comme une drogue. Il devient très difficile de s’extirper du piège de cette habitude toxique. Et la plupart des femmes préfèrent poursuivre, en catimini, leur rêve de se blanchir la peau, quel qu’en soit le prix. Mais être belle vaut-il ce suicide esthétique ? Absolument pas. En attendant, la dépigmentation a de beaux jours devant elle et ce sont les industriels de la filière cosmétique qui se frotteront les mains.