LE FDDR EMBOITE LE PAS A YEWWI ASKAN WI, AU FRN ET AU FPDR
À l’approche du dialogue national prévu le 28 mai par le président Bassirou Diomaye Diakhar Faye, les partis membres du Front pour la Défense de la Démocratie et de la République, né en février dernier, peinent à s’entendre sur leur participation.

À l’approche du dialogue national prévu le 28 mai par le président Bassirou Diomaye Diakhar Faye, les partis membres du Front pour la Défense de la Démocratie et de la République, né en février dernier, peinent à s’entendre sur leur participation. Une cacophonie qui illustre une fois encore les fragilités de l’opposition sénégalaise face aux grandes questions politiques, à l’image des divisions qui avaient miné le FRN, Yewwi Askan Wi ou encore le FPDR sur ce même enjeu.
À peine lancé en février dernier comme nouveau cadre unitaire de l’opposition face à ce qu’elle qualifie de « dérive autoritaire » du régime Pastef, le Front pour la Défense de la Démocratie et de la République (FDR) semble déjà rattrapé par les vieux démons qui ont conduit à l’éclatement de nombreuses plateformes politiques ces dernières années. La question de la participation ou non au dialogue national du 28 mai prochain, convoqué par le président Bassirou Diomaye Diakhar Faye, cristallise en effet les divergences au sein des partis membres du FDR.
À quelques jours de ce premier grand rendez-vous entre le chef de l’État et la classe politique depuis la présidentielle du 24 mars 2024, aucune position commune ne se dégage au sein du Front. D’un côté, l’Alliance pour la République (APR) de l’ancien président Macky Sall et la République des Valeurs de Thierno Alassane Sall défendent le boycott. De l’autre, plusieurs formations du même front, à l’image de la Ligue Démocratique (LD), de l’Alliance des forces de progrès (AFP) et, dans une certaine mesure, du Parti socialiste (PS), affichent leur volonté de répondre à l’invitation présidentielle. Porte-parole du PS, Abdoulaye Wilane a d’ailleurs déclaré dans un entretien à WalfQuotidien que « l’APR, le PDS et le PS n’ont pas le droit de faire dans l’hommerie ». Ce manque de cohésion n’est pas une première. Depuis 2016, chaque tentative de rassemblement de l’opposition s’est heurtée à la même ligne de fracture sur la question du dialogue avec le pouvoir. Une réalité qui a miné l’efficacité et la longévité de plusieurs fronts.
Le plus récent en date, Yewwi Askan Wi, a connu une montée fulgurante avant de buter, lui aussi, sur l’écueil du dialogue national. Créée le 2 septembre 2021 autour du Pastef, de Taxawu Senegaal de Khalifa Sall et du PUR, cette coalition s’était imposée comme la principale force d’opposition, raflant de grandes villes lors des élections locales de 2022, puis obtenant avec Wallu Sénégal, 80 députés sur 165 à l’Assemblée nationale.
Mais la dynamique a été brisée par le dialogue du 28 mai 2023. Alors que la conférence des leaders de Yewwi dénonçait dans un communiqué un « faux dialogue » orchestré par Macky Sall, Khalifa Sall prenait le contrepied en y participant. Son objectif : une réforme du code électoral permettant à lui-même et à Karim Wade de retrouver leur éligibilité. Cette divergence provoqua l’exclusion de Taxawu Dakar de la coalition. En retour, les 16 députés proches de Khalifa Sall quittèrent le groupe parlementaire Yewwi, entraînant une perte d’influence à l’Assemblée au profit de l’ancienne majorité.
Avant Yewwi, le Front patriotique pour la défense de la République (FPDR), réunissant plusieurs partis dont le PDS, fut le premier à se fracturer sous le poids du dialogue national. Le 28 mai 2016, lors de la toute première édition convoquée par Macky Sall après le référendum du 20 mars, le FPDR volait en éclats. Mamadou Diop Decroix, coordonnateur du front, et le PDS décidèrent d’y participer, tandis que Rewmi d’Idrissa Seck, Bokk Gis-Gis de Pape Diop et le Grand Parti de Malick Gakou boycottaient. Le désaccord scella le sort de ce cadre politique, précipité dans l’inaction.
Le Front de Résistance Nationale (FRN), créé à la veille du vote sur le parrainage, subira le même sort le 28 mai 2019. Cette fois, c’est la décision de participer au dialogue qui provoqua le retrait du PDS. Le parti de Me Wade accusa certains leaders du front de « compromission » avec le régime de Macky Sall. Résultat : un front vidé de sa substance et des ambitions d’union avortées. Ainsi, le FDR semble déjà confronté à un dilemme historique : s’unir ou répéter les mêmes erreurs.