LE PARTI SOCIALISTE, ORPHELIN DE SON SECRETAIRE GENERAL
Le Secrétaire général du Parti socialiste, Ousmane Tanor Dieng, a été rappelé hier, lundi 15 juillet, en France, des suites d’une longue maladie.

Ousmane Tanor Dieng par ailleurs, président du Haut Conseil des collectivités territoriales (Hcct) est parti sur la pointe des pieds sans en avoir eu le temps de réaliser son vœu de faire revenir ses frères socialistes dits frondeurs à la Maison de Colobane.
L e Parti socialiste perd son gouvernail. Après 23 ans passés à la tête de l’ancien parti au pouvoir qui a régné sur le Sénégal durant quatre décennies (1960-2000) comme Secrétaire général, Ousmane Tanor Dieng a définitivement quitté ses fonctions de patron des socialistes suite à son décès survenu hier, en France, des suites d’une longue maladie. Ce départ soudain et inattendu du désormais ex-Secrétaire général du Ps qui était en convalescence dans l’Hexagone depuis avril dernier marque la fin d’une longue carrière de militantisme socialiste qui n’avait rien de comparable à un long fleuve tranquille.
Coopté dans le Bureau politique du Ps en 1988 alors qu’il était conseiller diplomatique auprès du président Abdou Diouf (1981-88), l’enfant de Nguéniène avait bien démarré sa carrière politique pour avoir réussi à gravir en peu de temps (de 1988 à 1995) tous les échelons au sein du Ps en passant de Secrétaire Général de la Coordination Départementale Ps de Mbour à Secrétaire Général de l’Union des Coordinations Ps de Mbour, puis Secrétaire Général de l’Union Régionale Ps avant de devenir Secrétaire national aux Relations internationales du parti. Mais, en 1996, cette montée en puissance d’Ousmane Tanor Dieng sera refroidie par la première contestation issue de son élection comme Premier Secrétaire général du Ps, suite au fameux congrès sans débat, face à d’autres camarades de parti dont notamment feu Djibo Leyti Ka et Moustapha Niasse, actuel président de l’Assemblée nationale qui étaient en compétition avec lui pour ce poste.
Accusant le président Diouf d’avoir été derrière ce forcing, les deux responsables finiront par quitter le navire socialiste pour lancer leurs formations politiques en 1998 et 1999, précipitant ainsi la fin de quarante ans de règne du Ps aux élections de 2000. Suite à cette perte du pouvoir, commença une longue traversée du désert au cours de laquelle beaucoup de responsables du Ps tournèrent le dos au Secrétaire général soit pour lancer leur propre formation politique soit pour rejoindre le nouveau régime libéral. Mais, comme un capitaine de bateau avec l’esprit fixé sur un cap, Ousmane Tanor Dieng en dépit des défections et autres pressions politiques du régime libéral sur ses camarades a réussi à maintenir la barque socialiste en parfait équilibre jusqu’à la seconde alternance politique qui a vu le Ps revenir au pouvoir dans le cadre de la coalition Bennoo Bokk Yaakaar en 2012. Son retour aux affaires sera consacré par sa nomination à la tête du Haut Conseil des collectivités territoriales (Hcct) créée par la nouvelle Constitution adoptée lors du référendum du 20 mars 2016.
OUSMANE TANOR DIENG ET L’ABSENCE DU PS À LA PRÉSIDENTIELLE DE 2019
2019 restera sans nul doute l’année qui aura marqué le plus la gestion d’Oumane Tanor Dieng à la tête du Parti socialiste. Pour une première fois dans l’- histoire politique du Sénégal, une élection présidentielle se tient sans un candidat du Parti socialiste. En effet, conformément à la dynamique «gagner ensemble et gouverner ensemble» dans le cadre de l’alliance avec le Président Sall dans Bennoo Bokk Yaakaar, la direction du Ps sous la houlette de Tanor Dieng a pris la décision de ne pas présenter de candidat et de soutenir la candidature du président sortant. Cette décision qui est une suite logique de la position du désormais ex-Secrétaire général du Ps qui avait soutenu l’actuel président lors du référendum du 20 mars 2016 est vigoureusement contestée par plusieurs responsables socialistes dont Khalifa Ababacar Sall et ses camarades à Dakar ainsi que Me Aïssata Tall Sall. Refusant de se conformer à cette orientation, ces responsables entrent alors en conflit ouvert avec la direction du Ps qui a commencé lors de ce référendum et qui va se poursuivre, plongeant ainsi l’ancien parti au pouvoir dans la profonde crise dont elle peine aujourd’hui encore à se relever.
TANOR ET LE CAS KHALIFA
Décédé hier, en France, Ousmane Tanor Dieng quitte ce bas-monde sans avoir réalisé son dernier vœu de voir ses frères socialistes revenir à la maison de Colobane. Alors qu’il s’efforçait depuis quelques temps à rétablir le climat avec la bande à Khalifa Ababacar Sall dont il est accusé, par certains, d’être responsable des déboires judicaires, le défunt Secrétaire général du Ps est parti en laissant derrière lui celui qui a été dans un passé récent un de ses plus proches collaborateurs au sein du Ps derrière les barreaux de la prison de Rebeuss. S’exprimant en marge de la cérémonie de prestation de serment du Président Macky Sall le 2 avril dernier, le désormais défunt patron du Ps avait indiqué, dans la foulée de l’appel au dialogue lancé par le Président Sall, que le «dialogue est entamé au Parti socialiste». Poursuivant son propos, l’ancien patron des Verts avait tendu la main à son ancien secrétaire chargé de la vie politique en déclarant : «Nous y invitons Khalifa Sall. Il n’y a pas d’exclusion. C’est un appel inclusif que je lance à l’ensemble des socialistes de cœur ou de raison. J’ai dit à mes camarades qu’il faut faire preuve de tolérance, de générosité et l’histoire de notre parti est faite de scissions, de retrouvailles, de divisions». Comme pour insister sur sa détermination à tourner le plus vite possible la page de crise qui secoue son parti mais aussi des déboires judiciaires de l’ancien maire de Dakar, Ousmane Tanor Dieng lançait : «Je ne souhaite la prison à personne surtout quelqu’un avec lequel on a cheminé aussi longtemps. Lui (Khalifa Sall), c’est le Président Abdou Diouf même qui me l’a confié. Donc, c’est avec déchirement que je le vois dans cette situation-là».
DEUX ÉLECTIONS PRÉSIDENTIELLES
Rappelé à Dieu hier, lundi 15 juillet, Ousmane Tanor Dieng laisse derrière lui un brillant parcours d’homme politique. En 43 ans d’activité au service de la Nation sénégalaise, Ousmane Tanor Dieng a gravi tous les échelons au sein du Ps pour devenir Secrétaire général. Au plan national, le désormais ex-Secrétaire général du Parti socialiste compte également à son actif deux candidatures à l’élection présidentielle, notamment en 2007 et 2012. Il a obtenu son meilleur score en 2007 où il est sorti 3e avec un taux de 13,56%. En 2012, il est 4e avec 11,30 %. Successeur du président Diouf à la tête de la direction du Ps, Ousmane Tanor Dieng restera la seule personnalité secrétaire général du Ps à n-avoir pas siégé sur le fauteuil présidentiel.