VIDEOLE PAVÉ DANS LA MARE D’AÏSSATA TALL SALL
La députée a souligné ce jeudi, en marge de l'examen des projets de résolution relatifs à la mise en accusation de cinq ex-ministres, les risques d'une procédure sans appel possible et d'une confusion des pouvoirs où l'Assemblée se transforme en procureur

Lors d'une séance mouvementée à l'Assemblée nationale ce jeudi 8 mai 2025, la députée de l'opposition Aïssata Tall Sall a livré une intervention remarquée concernant l'examen des projets de résolution relatifs à la mise en accusation de cinq anciens ministres devant la Haute Cour de justice.
Dans un discours empreint de rigueur juridique, l'ancienne ministre, avocate de profession, a d'abord rappelé la nature exceptionnelle de cette juridiction héritée de la tradition française. "La Haute Cour de Justice statue en premier et dernier ressort. Sauf révision du procès, il n'y a aucune voie de recours ouverte à son encontre", a-t-elle souligné, appelant ses collègues à "bien réfléchir avant d'envoyer quelqu'un" devant cette instance.
La députée a particulièrement insisté sur le rôle ambigu joué par l'Assemblée nationale dans cette procédure. "Ce sont les députés qui prononcent l'acte d'accusation. Nous avons pris la place du procureur", a-t-elle affirmé, remettant en question la séparation des pouvoirs souvent invoquée. "À cet instant, il n'y a pas de séparation de pouvoir. L'Assemblée nationale est aujourd'hui dans la position d'un procureur de la République maître des poursuites."
Aïssata Tall Sall a également dénoncé ce qu'elle considère comme une violation du principe fondamental de la présomption d'innocence. Selon elle, les dossiers présentés ne reposent que sur "des déclarations de DGES contre des ministres" sans présomptions solides. "Les déclarations, aussi fortes soient-elles, ne peuvent pas être qualifiées de présomption", a-t-elle martelé.
Tout en réaffirmant sa confiance en l'indépendance de la justice sénégalaise et notamment en la commission d'instruction "présidée par un magistrat en qui nous pouvons faire confiance", elle a appelé ses collègues à faire preuve de retenue dans leurs commentaires et à laisser les juges "faire leur travail selon leur conscience et selon la loi".
En conclusion de son intervention, l'ancienne ministre a défendu l'intégrité des cinq ministres concernés qui, selon elle, "ont servi la République" et "étaient rigoureux dans le sacerdoce qui leur incombait". Se définissant comme "députée pour la loi universelle et impartiale" et rappelant son statut d'avocate avant tout, Aïssata Tall Sall a fermement rejeté la mise en accusation proposée, la jugeant "illégale" car "aucune présomption n'a été prouvée". Elle a averti que voter une telle mesure porterait atteinte "à la justice, au droit et à la règle de droit".
Cette intervention survient dans un contexte politique tendu alors que l'Assemblée doit se prononcer sur le sort judiciaire de cinq anciens ministres, une décision qui pourrait avoir des répercussions importantes sur l'équilibre institutionnel du pays.