L'HEURE DES COMPTES
Après des mois d'attente et de pressions, les auditions dans l'affaire des victimes des manifestations politiques de 2021 à 2024 démarrent aujourd'hui avec la convocation de Pape Abdoulaye Touré, symbole de la répression brutale sous l'ancien régime

Les auditions dans l'affaire des victimes des manifestations politiques survenues entre mars 2021 et février 2024 vont démarrer aujourd'hui. C'est ce qu'a annoncé dans un communiqué conjoint l'Initiative Zéro Impunité (IZI) et le mouvement Sénégal Notre Priorité.
Il s'est illustré comme le visage de la répression brutale des manifestations politiques survenues au Sénégal entre mars 2021 et février 2024. Pape Abdoulaye Touré sera aujourd'hui à la Section des recherches de Colobane, une unité de la gendarmerie nationale, pour être entendu dans le dossier relatif aux « détenus politiques ». Une audition synonyme de l'entrée en jeu de la Justice pour la recherche de la vérité dans cette affaire.
« L'Initiative Zéro Impunité (IZI) et le mouvement Sénégal Notre Priorité (SNP) informent l'opinion publique de l'ouverture officielle des dossiers liés aux événements politiques de 2021 à 2024, à la suite d'un soit-transmis du Procureur de la République. Dans ce cadre, Pape Abdoulaye Touré, victime de torture et par ailleurs membre fondateur de l'IZI et coordonnateur de SNP, est convoqué demain, vendredi 03 octobre à 10H, par les éléments de la Section de Recherches de Colobane pour être la première victime qui sera auditionnée », ont indiqué, hier, les deux organisations dans un communiqué conjoint reçu à la Rédaction.
Elles signalent dans la foulée « que le temps de la justice et l'heure de la vérité ont sonné ». Il faut dire que le ministre de la Justice avait, en début août, annoncé la saisine du Procureur général près la Cour d'appel en vue d'initier des poursuites relativement aux « crimes commis » durant les manifestations politiques. L'ex garde des Sceaux, Me Ousmane Diagne, répondait à un courrier qui lui a été adressé par Pape Abdoulaye Touré, victime de torture. Cette lettre du garde des Sceaux faisait suite à celle de l'activiste adressée au chef de l'État, Bassirou Diomaye Faye dans laquelle il l'interpellait sur ce qu'il qualifiait « d'inertie de la justice » face aux crimes de meurtre, d'assassinat, de torture, de traitement inhumain, cruel et dégradant ainsi que de disparition forcée, survenus lors des événements tragiques survenus entre 2021 et 2024.
La commande pour une célérité de la justice, réclamée par les partisans du pouvoir, exécutée
L'audition de Pape Abdoulaye Touré marque un tournant en vue de mettre la lumière sur le dossier des victimes des manifestations politiques. Jusque-là, le dossier semble suivre son cours malgré une forte pression des partisans du pouvoir sur la justice notamment sur ce dossier. Des voix s'étaient élevées notamment des députés membres de la majorité présidentielle pour protester contre une certaine lenteur de la Justice.
Mais, dans une sortie devant l'Assemblée nationale lors de la plénière sur l'examen de la loi portant interprétation de l'amnistie, Me Ousmane Diagne, alors ministre de la Justice, s'était montré ferme sur le bon fonctionnement du système judiciaire : « Je ne comprends pas ces critiques. C'est comme si ce qui intéresse les gens, ce n'est pas la bonne marche de la justice. Avec toute mon expérience dans la magistrature, je n'ai jamais accepté qu'on fasse pression sur moi. Qu'on ne compte pas sur moi pour faire pression sur les magistrats du siège ».
Entre-temps, le magistrat Ousmane Diagne a été débarqué du ministère de la Justice. Suite à un remaniement ministériel, Yassine Fall, membre du Pastef, a été envoyé à la tête de ce département stratégique. Moins d'un mois après sa nomination, le dossier des « détenus politiques » semble s'accélérer avec l'ouverture officielle des auditions devant la Justice.