UNE ÉLECTION, MILLE LOCALITÉS À ENJEUX
La victoire n’est pas assurée d’avance au regard de la profonde reconfiguration politique que présagent ces joutes. Comme ont tenu à le souligner les hommes de médias et observateurs politiques Pape Amadou Fall de la Gazette, Malang Baldé de RFI et autres

A quelques encablures du démarrage officiel de la campagne électorale pour les élections locales du 22 janvier prochain, les états-majors politiques s’activent pour aller à la conquête des villes, des communes et des principaux départements du Sénégal. Des collectivités territoriales qui risquent d’être objet de luttes sans merci, tant les enjeux sont grands. Dans ce bras de fer électoral entre coalitions politiques en tête desquelles on retrouve pêle-mêle la majorité Bennoo Bokk Yakaar, Yewwi Askan Wi d’Ousmane Sonko et autre Khalifa Sall, comme Wallu Sénégal de Me Abdoulaye Wade, la victoire n’est pas assurée d’avance au regard de la profonde reconfiguration politique que présagent ces joutes. Comme ont tenu à le souligner les hommes de médias et observateurs politiques Pape Amadou Fall de la Gazette, Malang Baldé de Rfi et autre Pathé Mbodji.
MALANG BALDÉ, JOURNALISTE CORRESPONDANT DE LA RFI : « On se dirige vers des élections assez représentatives de ce qui se fera pour les législatives à venir… »
«Les principales villes a enjeux restent Dakar et sa banlieue, avec le fauteuil de maire de Dakar qui équivaut à être puissant financièrement, que Macky Sall n’a jamais gagné, aussi à Pikine et à Guédiawaye car on a son oncle et frère de l’autre côté. Qui contrôle la banlieue contrôle Dakar au vu du nombre d’électeurs. On a aussi parlé de Kédougou avec le rejet de la liste de Yewwi Askan Wi qui sonne comme un coup de massue sur l’opposition car c’est une région très stratégique politiquement et géopolitiquement. Sinon, le pouvoir devrait pouvoir consolider des acquis peut-être dans la Fouta où on note une allégeance encore au Président sauf à Podor où les forces sont partagées. A mon sens, on se dirige vers des élections assez représentatives de ce qui se fera pour les législatives à venir. On aura d’une part la coalition Bby et de l’autre la coalition Yaw qui est déjà handicapée avec des listes rejetées mais qui reste la principale opposition significative au Sénégal. La preuve avec la candidature d’Ousmane Sonko à Ziguinchor qui risque de redistribuer les cartes. Sinon, du côté de Wallu, je ne pense qu’on puisse assister à un véritable engouement populaire sur les têtes de liste qui, pour la plupart, sont peu connues ou souvent très décriées par des gestions peu orthodoxes dans leurs communes, allant même à donner réflexion à une coalition du Macky bis. Je ne suis pas par ailleurs d’avis avec ceux qui pensent que les Locales seront le premier tour de la présidentielle. Au contraire, ce sont des élections avec des enjeux souvent locaux donc on espère voir une énorme participation des populations lors de ces joutes électorales à venir. Bennoo sera sans doute sanctionnée dans les départements et régions cités et si tel est le cas, on s’attend à ce que le Président Macky Sall sorte la cravache pour punir les perdants. On se dirige donc vers une redistribution des rôles dans le champ politique et de nouvelles têtes vont émerger. Chez qui ? Ça reste une équation à mille inconnues. Yewwi a déjà gagné la bataille sur le terrain et sur les réseaux mais est-ce que cela va être suffisant ? En politique, l’argent est le nerf de la guerre et peut-être pour une fois, les populations seront au centre des tractations et non l’inverse».
PATHÉ MBODJI, ANALYSTE POLITIQUE : «L’enjeu de la victoire est de ga- gner dans toutes les villes, pour tout le monde»
« Pour Benno par exemple, l’enjeu de la victoire est pour toutes les villes et pour tout le monde d’ailleurs ; chacun estime que quand on va en un combat, c’est pour gagner, gagner partout. Ça veut dire gagner chez soi et gagner ailleurs. Seulement, avec des alliés, Benno Bokk Yakaar en particulier a une grosse ambition, c’est de gagner partout mais les autres aussi. Donc, à partir du 08 janvier, date de démarrage de la campagne électorale, on verra peut-être de fur à mesure que les choses évolueront. On verra aussi comment se présenteront les choses et en priorité comment chacun va pouvoir gagner chez lui et partout».
PAPE AMADOU FALL DE LA GAZETTE, ANALYSTE POLITIQUE : « Ça ne sera pas simple et rien n’est gagné d’avance pour qui que ce soit »
« Je pense qu’il n’est guère surprenant de dire que Dakar, pour toutes les coalitions politiques particulièrement pour celles que vous avez ciblées, à savoir Bennoo Bokk Yakaar, Yewwi Askan Wi et Wallu Sénégal, est un enjeu extrêmement important parce que c’est la capitale du Sénégal. Elle a une attractivité certaine aux yeux de tous les hommes politiques, des analystes politiques que nous sommes de manière générale et même des populations lambda. Comment gagner Dakar maintenant ? Il y a des stratégies que les uns et les autres ont mises en place par rapport aux élections locales de janvier 2022 et la ville de Dakar sera âprement disputée. Personne ne peut avoir la garantie de rafler la mise, surtout aisément. Les autres capitales régionales feront également l’objet d’un regard particulier, notamment Ziguinchor où les passions se sont déchaînées d’une certaine manière parce qu’il y a surtout le choix d’Ousmane Sonko, leader de Pastef-Les Patriotes d’aller briguer le mandat de maire face à la coalition Benno Bokk Yakaar mais également face à la coalition du maire sortant Abdoulaye Baldé et les autres. Cela ne sera pas simple et rien n’est gagné d’avance pour qui que ce soit. Je pense que la vigilance doit être de mise surtout à ce qui pourrait se passer à Ziguinchor et nous pensons tous à la violence qui a déjà fait ses effets et qui fait qu’on surveillera particulièrement cette importante ville de Ziguinchor. Mais au-delà du Sud, il en sera de même dans toutes les capitales régionales et notamment Saint-Louis. On peut citer le cas également de Kaolack où il y a de l'inédit parce que Mariama Sarr qui est la mairesse sortante n’est pas en route pour sa réélection. C’est dire que les différentes listes qui vont se bousculer au portillon des électeurs n’auront pas la tâche facile. De l’inédit également pour ces élections de 2022, parce que nous sommes à deux (2) ans de la fin du mandat du président de la République : d’aucuns veulent impliquer l’élection présidentielle et l’élection locale, et à mon avis, ça n’a strictement rien à avoir, absolument pas. Après les Locales de 2022, ça sera un autre challenge qui va se présenter pour l’élection des députés mais également pour la succession du président Macky Sall».