VIDEOUN DIALOGUE DE FAÇADE ?
Yoro Dia lève le voile sur ce qu'il considère comme une manœuvre institutionnelle du gouvernement. Le dialogue national ne serait qu'un habillage pour donner plus de pouvoirs à Sonko, au risque de fragiliser l'équilibre démocratique du pays

Invité du Grand Jury de RFM ce dimanche, l'ancien ministre et politologue Yoro Dia n'a pas mâché ses mots concernant le dialogue national sur le système politique prévu le 28 mai prochain. Pour lui, cette initiative constitue une "perte de temps" qui cache en réalité une volonté de modifier les institutions pour accroître les pouvoirs du Premier ministre Ousman Sonko.
"Ils veulent donner plus de pouvoirs au premier ministre. Réduire les pouvoirs du président", a déclaré Yoro Dia, dénonçant une adaptation des institutions à un individu plutôt qu'à l'intérêt général. "On ne peut pas adapter les institutions pour un individu", a-t-il insisté.
Le politologue révèle que derrière le discours officiel sur le dialogue se cache une volonté de modifier le régime présidentiel actuel vers un "parlementarisme renforcé", donnant ainsi plus de pouvoirs à Ousmane Sonko qui ne se cache pas d'être "le chef de la majorité".
Yoro Dia s'inquiète particulièrement des déclarations du Premier ministre qui affirme "qu'il y a pas matière à s'opposer" à l'Assemblée nationale. "Un fanatique ne cherche pas à convaincre, il cherche à convertir", analyse-t-il, ajoutant que ce type de discours relève plus de la religion que de la politique.
L'ancien ministre souligne le paradoxe : comment dialoguer avec quelqu'un qui estime qu'il n'y a pas matière à s'opposer et qui qualifie l'opposition de "résidus" ? "Quand on dit résidu, c'est qu'il faut s'en débarrasser", rappelle-t-il, faisant écho à des discours historiquement dangereux.
Le véritable enjeu : l'économie, pas les institutions
Pour Yoro Dia, le Sénégal n'a pas besoin de réformes institutionnelles mais de réformes économiques. "Le Premier ministre a enfin compris que le Sénégal n'a pas un problème politique, le Sénégal a un problème économique", se félicite-t-il, tout en déplorant que le dialogue porte sur les institutions plutôt que sur l'économie.
Le politologue met en garde contre ce qu'il appelle la "démocratie de Sysiphe" du Sénégal, cet "éternel recommencement" où chaque nouveau régime veut modifier les règles du jeu. Il rappelle que les mêmes questions étaient déjà posées en 1998 dans le rapport de Mbaye Ndiaye sur le statut de l'opposition.
"Le président de la République n'a pas encore posé une première pierre", note l'invité de RFM, soulignant l'urgence économique face au temps perdu en concertations. Il appelle plutôt à convoquer les hommes d'affaires plutôt que les politiciens pour trouver des solutions concrètes aux défis économiques du pays.
Le message est clair : au lieu de chercher à adapter les institutions aux ambitions d'Ousmane Sonko, le régime devrait plutôt se concentrer sur l'économie, seul véritable défi du Sénégal selon Yoro Dia.