PLUS DE 500 CAS DE TUBERCULOSE EN BANLIEUE
La promiscuité et les conditions de vie précaires favorisent la propagation de cette maladie à Pikine et Guédiawaye. Les professionnels de santé pointent du doigt la densité urbaine et les retards de dépistage

La banlieue dakaroise, plus précisément dans les districts sanitaires de Pikine et Guédiawaye, continue d'enregistrer des cas de tuberculose. Ces établissements sanitaires considérés comme des centres de prise en charge de cette maladie comptent actuellement plus de 500 nouveaux cas confirmés. Une visite hier, mercredi 11 juin 2025, dans ces structures, a permis de mesurer l'ampleur de cette pathologie devenue inquiétante.
Les quartiers de Guédiawaye et Pikine sont réputés être des zones de fortes densités. La promiscuité y est très pesante, avec des îlots et baraques abritant plusieurs personnes. L'exiguïté des habitations rend difficile le passage de la lumière, devant permettre de tuer les bactéries et autres virus. Ce qui rend favorable la propagation de la tuberculose qui continue de faire des ravages et de s'attaquer à cette population.
Selon les responsables de la prise en charge de cette pathologie dans les districts de Guédiawaye et Pikine, la situation épidémiologique dans ces localités est alarmante. Le bilan à mi-parcours fait état de plus de 500 cas dont 320 au deuxième trimestre de 2025 à Guédiawaye pour 780 cas attendus au cours de l'année et 125 nouveaux cas en plus des 200 suivis dans la file active à Pikine.
Pour Hélène Diacko, responsable du Programme national de lutte contre la tuberculose au niveau du district sanitaire de Guédiawaye, les cas sont nombreux au niveau du district sanitaire de Wakhinane-Nimzatt. « Actuellement, de janvier 2025 jusqu'au 11 juin 2025, nous sommes à 320 cas de tuberculose. Et parmi ces cas, nous avons 45 cas qui sont extra-pulmonaires qui sont contagieux mais aussi 28 malades qui ont rechuté », a renseigné Mme Diacko.
Abdoulaye Diouf, superviseur communautaire du Programme de lutte contre la tuberculose dans le même district sanitaire de Guédiawaye, ajoute : « Nous sommes dans la recherche de cas qui se fait à travers les activités de sensibilisation. Les signes sont une toux de plus de 15 jours, la fièvre mais aussi l'amaigrissement. Une fois qu'on a ces signes, on passe au dépistage ».
Au niveau du district de Pikine, Ndèye Marie Diagne, infirmière au centre de santé Dominique, point focal chargé du traitement de la tuberculose, renseigne : « Le nombre de cas augmente parce qu'il y a de la promiscuité ».
Tuberculose de l'enfant, un problème
Parler de la tuberculose fait souvent penser à l'adulte. Toutefois, il est important de souligner que des enfants sont aussi touchés. Cependant, leur prise en charge et la détection des cas se heurtent à plusieurs obstacles dont le refus des parents d'exposer leurs enfants ou encore la disponibilité des médicaments.
Selon Abdoulaye Diouf, superviseur communautaire du Programme de lutte contre la tuberculose au niveau du district sanitaire de Guédiawaye, la tuberculose de l'enfant est un défi parce qu'ils ont vraiment du mal à les dépister. « Au vu de la spécificité de l'enfant et de la négligence de certains parents qui ont développé la maladie, ces enfants se heurtent souvent à un refus pour le dépistage. Souvent, les parents refusent d'admettre que leurs enfants malades peuvent souffrir de tuberculose, d'autres vont jusqu'à nier leur présence dans leur toit », a déclaré M. Diouf.
Il ajoute : « Je pense qu'il y a des efforts à faire dans ce sens. Mais, également et surtout sur le dépistage des cas de contact de malades tuberculeux car, à chaque fois qu'on leur pose la question de savoir si on peut venir chez vous pour dépister les contacts, souvent, ils vous disent qu'ils habitent seuls. Ou bien, ils ne veulent pas que leur statut sérologique soit connu par les autres ».
Hélène Diacko a aussi renseigné qu'au cours de cette année, 12 enfants ont été touchés dans le district de Guédiawaye. « Le taux de dépistage chez les enfants est très faible. Et les chiffres le montrent à suffisance. Nous devons booster davantage le dépistage chez cette cible ».
Recours tardif aux soins
Des cas de résistance au traitement de la tuberculose ne sont pas notés dans ces établissements de santé. Toutefois, il faut souligner le retard du dépistage qui joue en faveur de la propagation et de la contamination de la maladie. Selon le personnel de soin, il arrive qu'un malade soit dépisté à trois reprises, c'est-à-dire qu'il traîne la maladie pendant des mois avant même de venir aux structures de santé. « Sans l'apport de la communauté, souvent, ce sont des gens qui viennent tardivement », a fait savoir Mme Diacko.
Revenant sur l'appareil de diagnostic et de détection de la charge virale, elle a renseigné que, bien qu'existant, il faut renforcer le district dans ce sens du fait de la forte demande. Elle a aussi évoqué le problème des perdus de vue. « Des fois, nous en notons, mais nous les relançons par appel téléphonique ou par le biais des relais communautaires ».
Manifestation et prévention de la maladie
Selon le personnel de prise en charge, la tuberculose est une maladie ignorée complètement par beaucoup de malades. Face à cette situation, ils ont demandé d'accentuer la sensibilisation pour que les gens sachent comment se manifeste la maladie et les facteurs de contamination.
Rappelons que la tuberculose est une maladie grave qui affecte, dans la plupart des cas, les poumons, bien qu'elle puisse toucher d'autres systèmes corporels. La tuberculose se propage facilement dans les espaces confinés.
Les personnes séropositives au VIH et immunodéprimées ont un risque plus élevé de contracter la tuberculose que la population générale. Des antibiotiques peuvent traiter la maladie. Toutefois, certaines bactéries sont résistantes aux antibiotiques. Elle se manifeste par une fièvre traînante, avec souvent des sueurs nocturnes ; une toux chronique avec des crachats épais, comportant parfois quelques filets de sang ; un essoufflement ; des douleurs dans la poitrine ; un état de fatigue ; une perte d'appétit, un amaigrissement, entre autres.