LE BUDGET ENFANCE MULTIPLIÉ PAR 10 AU SÉNÉGAL
Malgré des progrès budgétaires spectaculaires, le pays reste marqué par de profondes disparités territoriales. Les enfants de Matam, Kédougou et Sédhiou n'ont toujours pas accès aux mêmes services que ceux de Dakar

Le Sénégal a réalisé depuis 2010 des progrès significatifs en matière de budgétisation des droits de l'enfant. L'affirmation est de Samba Kane, conseiller technique du ministre de la Justice, Garde des Sceaux, qui présidait hier, mercredi 11 juin 2025, la cérémonie d'ouverture du symposium national organisé par la Direction générale de la protection judiciaire et sociale du ministère de la Justice, sur le thème : « La planification et budgétisation des droits de l'enfant : progrès depuis 2010 ».
Organisé en marge de la commémoration de la 35ème édition de la Journée de l'enfant africain, ce symposium servait de cadre pour les acteurs de non seulement dresser le bilan mais également d'identifier lucidement les défis qui subsistent en vue de définir des stratégies audacieuses pour garantir aux enfants du Sénégal un avenir digne de leurs aspirations.
Prenant la parole à cet égard, Samba Kane, conseiller technique du ministre de la Justice, Garde des Sceaux, souligne que « depuis 2010, des progrès notables ont été accomplis tant sur le plan institutionnel et budgétaire ». Il en veut pour preuve, entre autres, la mise en œuvre de la Stratégie nationale de protection de l'enfance, les hausses progressives des allocations dans les ministères clés, ou encore le renforcement des programmes de justice juvénile qui, selon lui, « sont autant de signaux d'un engagement grandissant ».
À ce titre, révèle le conseiller technique du ministre de la Justice, « le budget alloué à la Direction générale de la protection judiciaire et sociale du ministère de la Justice est passé de 599 millions FCFA en 2011 à 6,3 milliards de FCFA en 2025 ; soit une multiplication par 10 en une décennie ».
Dans la même veine, « le ministère de la Famille et des Solidarités a vu ses crédits progresser de 9,9 milliards de FCFA en 2011, à 46 milliards de FCFA en 2024 », a-t-il ajouté.
Cependant, malgré ces avancées significatives, « nous devons rester lucides », prévient Samba Kane qui, en revanche, souligne que « les allocations actuelles restent en deçà du seuil minimal de 3% du budget national recommandé par l'UEMOA et nous notons des disparités territoriales ». Comme en atteste le retard criant en termes d'accès aux services sociaux de base, noté dans les régions comme Matam, Kédougou ou Sédhiou.
Saluant, au nom du représentant régional du Haut-commissariat des Nations-Unies pour les droits de l'homme, l'engagement du ministère de la Justice du Sénégal pour le progrès réalisé et la tenue de ce symposium, Aminata Kébé a appelé à garantir des ressources suffisantes et durables dans une approche holistique.
Elle rappelle que « déjà, en 2010, le rapporteur spécial sur les droits de l'éducation pointait la faiblesse du budget alloué à l'éducation au Sénégal ».
Plus récemment, en février 2024, « le Comité des droits de l'enfant des Nations-Unies a salué l'augmentation des ressources affectées au ministère de la famille, mais a exprimé ses préoccupations face à la baisse des dépenses publiques dans les secteurs sociaux et à l'insuffisance des ressources dédiées à la protection de l'enfance », a mentionné Mme Kébé.
Dans ce cadre, elle a rapporté que « le comité a recommandé au Sénégal d'allouer des ressources suffisantes aux droits de l'enfant, d'élever les budgets sociaux à des niveaux adéquats, de réduire les disparités à partir d'indicateurs relatifs aux droits de l'enfant ».
De son côté, considérant cette question comme étant un problème d'enjeux de développement, Mme Aissé Gassama Tall, directrice générale de la protection judiciaire et sociale, « appelle à investir dans l'éducation des enfants, leur santé et leur protection, pour avoir une société prospère et une société stable et sécurisée ». Elle a plaidé également pour que 3% du budget national soit réservé aux financements sensibles à l'enfance, conformément à la recommandation faite par l'UEMOA.