L’ESPOIR DEÇU
L’espoir était si grand, dans les différentes artères de la capitale sénégalaise. ‘’EnQuête’’vous replonge dans l’ambiance patriotique d’avant-match.

On en avait les larmes aux yeux. De Rufisque à Dakar, en passant par Diamaguene, Sicap Mbao, Thiaroye et certainement bien au-delà, l’émotion était palpable. La fierté nationale, bien perceptible sur les visages. A 11 h passées de quelques minutes déjà, en ce jour de finale de la Coupe d’Afrique des nations, le longiligne Abdou Khadre avait du mal à contenir son sentiment. Il explosait : ‘’Nous allons manger les Algériens, ce soir ! Le Sénégal est mille fois meilleur. On est très confiants.’’ Ici, c’est Rufisque. La ville d’Adolphe Mendy, de Papa Bouba Diop et de Cheikh Ndoye est en extase ! Prête à exploser de joie à la fin du match opposant le Sénégal à l’Algérie, ce soir au Caire.
Sur cette route qui mène vers le centre-ville, dans le quartier populeux de Thiokho, l’ambiance est électrique. Un seul mot est sur toutes les lèvres : ‘’Ndam’’ (la victoire). ‘’Seulement’’, ajoutaient certains supporters, très excités. Dans les rues, à des intervalles de moins de 20 mètres, de longs drapeaux aux couleurs nationales, accrochés sur les murs, surplombent l’asphalte et offrent un décor magnifique. Rarement, pour ne pas dire jamais, le vert, jaune et rouge n’a été aussi exalté. L’engouement, sur place, est simplement indescriptible, même à près de 10 h de la rencontre décisive. Une émotion enivrante et contagieuse qui ne laissait même pas les personnes âgées indifférentes.
Maman Aïda Diop : ‘’Vraiment lii daw na yaram. C’est vraiment émouvant. On prie pour le Sénégal. En ce jour saint de vendredi, nous implorons le bon Dieu de donner la victoire à nos Lions. Nous avons bon espoir.’’ Devant elle, des jeunes qui chantent, qui dansent au rythme des belles chansons distillées par la sonorisation. Dans un élan volontariste, ils se sont mobilisés par dizaines, pour décorer les artères de leur quartier. Ici, pas de couleur de partis, pas de tarikha, encore moins d’appartenance ethnique : seul le Sénégal est magnifié, les lions chantés. On oublie les rancœurs, les frustrations, les déceptions. Aujourd’hui, c’est la fête. ‘’Nous sommes vraiment fiers. Ce jour, il nous fuyait depuis longtemps. Nous y sommes et cela mérite bien d’être célébré’’, exultait Babacar Diop, arborant fièrement le n°10 du maillot national. Le jeune garçon revient également sur les ressources déployées pour arriver à changer totalement le visage du quartier. Il explique : ‘’Nous ne pouvons avancer le budget. Les gens sortent spontanément, qui pour apporter des drapeaux, de la peinture… Nous, on se charge de la main-d’œuvre pour décorer tout le quartier’’.
Quittant Rufisque pour aller à Liberté VI, via l’autoroute à péage, la même ambiance était visible partout. Même certains ronds-points ont pris les couleurs du drapeau avec une étoile au milieu. A Khar Yalla, juste avant le rond-point VI, une meute de supporters, des jeunes, particulièrement des enfants mettaient aussi l’ambiance au rythme endiablé du ‘’assiko’’.
Debout sur les toits des maisons, quelques dames regardent le spectacle, admiratives. Une ferveur inédite que seul le foot est à même de générer. L’espoir de Thierno Niang, jeune activiste, est de voir toute cette énergie positive être déployée sur d’autres terrains, ceux de la lutte pour le développement. ‘’Le drame de ce pays, fulmine-t-il, c’est que l’on a tué l’espoir chez la jeunesse. La solution, pour se mettre sur les rampes de l’émergence, c’est de raviver cette flamme d’espérance auprès de cette couche de la population. Aujourd’hui, on sent l’engouement de cette jeunesse parce que les Lions ont su réveiller leur espoir’.