UN REGAIN DE VIOLENCE DANS LE NORD SINDIAN CRAINT PAR LES OBSERVATEURS ET POPULATIONS
Aujourd’hui, pour beaucoup d’observateurs, la paix est à nouveau menacée en Casamance

Aujourd’hui, pour beaucoup d’observateurs, la paix est à nouveau menacée en Casamance. À l’origine, le récent incident qui a eu lieu à la frontière gambienne entre des éléments de Salif Sadio, le chef de la branche armée du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (Mfdc) et des soldats sénégalais du détachement de la CEDEAO en Gambie.
Pour rappel, cet incident est survenu lorsque des jambars poursuivant un camion clandestin chargé de bois frauduleux en provenance de la Casamance, se sont retrouvés nez à nez avec des combattants d’Atika. Cet incident marqué par la mort de quatre soldats et la prise en otage de sept autres par les indépendantistes, a occupé l’actualité durant le mois de février. Mais, à l’issue de fortes pressions du Groupe de réflexion pour la paix en Casamance (GRPC), dirigé par Robert Sagna, de la Gambie et de la CEDEAO, les soldats prisonniers ont été relâchés sans aucune égratignure par Salif Sadio. Mais, avant même ce dénouement heureux, la tension avait commencé à monter dans tout le département de Bignona et naturellement dans la zone du nord Sindian où une atmosphère inquiétante s’est installée cassant la dynamique de quiétude qui y régnait depuis des années. Les populations de ce département redoutent aujourd’hui d’éventuels affrontements entre l’armée et les combattants du Mfdc, retranchés dans cette partie du nord Sindian et ceux de la forêt de Diakaye. Une forte peur s’est emparée de ces dernières.
De sources bien informées, l’on signale que dans certains villages de la zone frontalière, certains habitants commencent même à rejoindre la Gambie de peur d’être coincés dans leurs villages en cas de regain de tension. Chez les acteurs de la paix également, on retient son souffle. Un responsable impliqué dans le processus de paix qui s’est confié à nous indique que la situation est très préoccupante actuellement dans cette partie de la Casamance. Les risques d’une montée de la violence y sont réels, souligne-t-il. Ce qui, à son avis, va interrompre le processus de paix et faire perdre quasiment tous les acquis qui résultent de plusieurs années de travail sans répit.
Un nouvel embrasement redouté
‘’Actuellement, nous croisons les doigts pour qu’il n’y ait pas un nouvel embrasement car cela va mettre en péril tout le travail que nous avons mené depuis des années. Ce qui pourrait ramener dans la région beaucoup de problèmes qu’on a commencés à oublier notamment les braquages sur les axes routiers’’, lance-t-il. Pour notre interlocuteur, c’est possible aujourd’hui de régler le problème de trafic de bois sans faire recours à la force.
Selon lui, il suffit juste de convaincre le président gambien Adama Barro de fermer sa frontière aux braconniers qui ont installé leurs quartiers en Gambie et particulièrement au niveau des villages frontaliers avec le Sénégal. ‘’Les braconniers ont installé de petites scieries dans toute la zone frontalière et c’est là que tout le bois qui provient de la Casamance est scié avant d’être exporté vers l’Asie à partir du port de Banjul. Donc les autorités gambiennes sont au courant de tout ce qui se passe.
Par conséquent, si elles ont la volonté politique de juguler le fléau, ça peut se faire rapidement. Le gouvernement sénégalais doit déployer sa diplomatie pour amener Adama Barrow à prendre des mesures fermes car les braconniers réussissent à faire transiter toujours leur bois par la Gambie, malgré les accords signés entre Dakar et Banjul pour interdire ça, c’est parce qu’ils ont des complicités. Rien ne vaut la paix, donc il est souhaitable que cette piste de solution soit explorée surtout qu’aujourd’hui que Salif Sadio et ses hommes ont accepté de déposer les armes ‘’, estime-t-il.
Un autre observateur partage cette position et indique que si jusqu’à présent le trafic du bois de la Casamance vers la Gambie perdure, c’est parce que les autorités gambiennes ne sont pas décidées à faire arrêter ça dans la mesure où celui-ci transite par le port de Banjul pour être transféré en Chine ou vers d’autres destinations. Pour lui, les autorités sénégalaises doivent taper du poing sur la table pour amener le régime de Barrow à faire arrêter le phénomène au lieu d’envisager d’autres solutions qui remettront en cause des acquis de haute lutte. ‘’Aujourd’hui, si la situation se détériore dans la région et surtout dans cette partie du nord Sindian, toutes les populations qui sont revenues au bercail, après avoir passé des décennies en Gambie, vont s’exiler à nouveau avec le risque de perdre tout le travail abattu pour reconstruire leurs villages qui étaient en ruines. Certains habitants ont même déjà un pied en Gambie depuis l’incident de la dernière fois’’, fait-il remarquer.
À signaler qu’un officier sur place, à la frontière, que nous avons contacté assure que la situation est très calme dans la zone. Ce dernier dément une information qui a circulé dans la journée d’hier faisant état de tirs à l’arme lourde, en provenance de cette zone, qui auraient été entendus dans la nuit de dimanche à lundi. Cet officier rassure que les populations y vaquent tranquillement à leurs besoins.