MANKEUR NDIAYE OU LA DIPLOMATIE AU CŒUR
EXCLUSIF SENEPLUS - "Diplomatie, 20 ans à la place" est un manuel de formation diplomatique. L'ancien chef de la diplomatie sénégalaise y décortique "l'exercice d'équilibriste" du métier de diplomate, entre loyauté nationale et neutralité internationale

Notre patrimoine littéraire est un espace dense de créativité et de beauté. La littérature est un art qui trouve sa place dans une époque, un contexte historique, un espace culturel, tout en révélant des vérités cachées de la réalité. La littérature est une alchimie entre esthétique et idées. C’est par la littérature que nous construisons notre récit qui s’inscrit dans la mémoire. Ainsi, la littérature africaine existe par sa singularité, son histoire et sa narration particulière. Les belles feuilles de notre littérature ont pour vocation de nous donner rendez-vous avec les créateurs du verbe et de leurs œuvres qui entrent en fusion avec nos talents et nos intelligences.
La diplomatie est un art de représentation et de négociation politiques au service de la paix. La diplomatie s’exerce grâce aux principes qu’elle reçoit de la politique, qui lui donne ses objectifs et ses moyens. Elle s’accomplit grâce à la légitimation que le pouvoir politique donne aux résultats qu’elle obtient, en ratifiant ses actes. Dans ce sens, la diplomatie est l’une des dimensions d’un projet politique précis qui lui donne son sens.
La diplomatie est aussi un art de la négociation car le diplomate agit sur un terrain changeant et incertain : celui des relations internationales. Il est possible donc d’affirmer que la diplomatie est l’art de gérer les relations internationales avec des moyens pacifiques et ayant comme objectif permanent l’établissement d’accords pour sauvegarder la paix.[1]
De cet exercice spécifique, on peut dire aussi que la littérature, qui est l'ensemble des œuvres écrites ou orales auxquelles on reconnaît une valeur esthétique, est un art exprimant un idéal. Grâce aux productions littéraires, elle permet de manifester des émotions et de révéler aux lecteurs ou aux auditeurs ce qu'une personne a dans le cœur. La littérature vise à éduquer, à communiquer des pensées, à influencer et même à séduire. Elle constitue un héritage patrimonial et peut concourir à la préservation du patrimoine d'un pays, lorsqu'elle en souligne les valeurs, la culture et la civilisation.[2]
Ainsi l’ouvrage de Mankeur Ndiaye, Diplomatie, 20 ans à la place, est un bel exemple de ce qui relie la littérature à la diplomatie qui est un véritable exercice d’observation, d’écoute et finalement qui résulte d’un récit particulier. Ce qui fait de la parution de l’ouvrage de Mankeur Ndiaye un événement littéraire majeur et très instructif car l’auteur a véritablement un sens littéraire talentueux qui place ce récit dans une dimension narrative historique et mémorable.
Car au-delà du témoignage de Mankeur Ndiaye sur son parcours professionnel qui demeure exceptionnel, ce livre offre une mine d’informations sur les métiers de la haute administration d’État qui forment des hommes à servir la nation à corps et à cœur.
À travers la lecture de ce livre, on comprend très bien la nature complexe du métier de diplomate, de « l’habileté » dont il faut faire usage quotidiennement pour, à la fois, répondre aux intentions de politique étrangère de l’État pour lequel on travaille, tout en restant neutre et non intrusif sur les territoires internationaux.
Né à Dagana, au bord du fleuve Sénégal en 1960, comme je le suis, Mankeur Ndiaye a eu un parcours exceptionnel, fait d’études poussées, de persévérance, de choix intelligents qui l’ont conduit sur les bancs de l’université de l’École Normale Supérieure de Dakar, puis à l’École Nationale d’Administration et de la Magistrature, avant de faire carrière aux Nations Unis à New York en 1997 durant huit ans, puis d’être Chef de cabinet de Cheikh Tidiane Gadio au ministère des Affaires étrangères de 2000 à 2009, avant de devenir lui-même Ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur de 2012 à 2017, sous le mandat de Macky Sall.
Que Mankeur Ndiaye évoque notre enfance commune me touche et c’est vrai que très tôt je l’ai nommé « Ndiaye le diplomate » car je sentais chez ce jeune homme une capacité d’écoute et d’observation lui permettant d’apaiser certaines tensions. Et il a bien prouvé ses qualités fondamentales dans l’exercice de ses fonctions.
Ainsi, Mankeur Ndiaye analyse finement l’exercice d’équilibriste que le diplomate doit savoir maîtriser pour faire vivre les valeurs républicaines et les principes éthiques et moraux. Et comment il faut faire pour renforcer son sens de l’anticipation et comment savoir cultiver un esprit qui voit au-delà des apparences.
En somme, il s’agit de développer continûment un savoir-faire, un savoir-être qui a à voir avec une démarche visionnaire afin de préserver l’image de l’État dans tous ses aspects inter-relationnels.
Et c’est là où le livre de Mankeur Ndiaye est intéressant car il nous apprend que le métier de diplomate, et par-delà les hautes responsabilités de l’administration d’État, sont de véritables fonctions qui exigent une formation solide, doublée d’une expérience qui doit sans cesse se renouveler et se questionner. Et c’est bien ce que nous propose Mankeur Ndiaye, la réflexion, au moyen d’une certaine forme éducative, sur un exercice majeur de l’histoire de notre pays.
En France, sous le mandat de Nicolas Sarkozy, on a admis que le travail des diplomates avait été fortement déconsidéré, au profit de l’exercice politique, un seul exemple celui de la Libye. Ce qui aujourd’hui paraît être une erreur fatale sur beaucoup de sujets géopolitiques et stratégiques de l’occupation des territoires. Le travail du diplomate est celui d’une attention subtile, axée sur les alliances et la négociation qui permettent, pour le moins, d’éviter des conflits et des catastrophes politiques. En cela, le rôle du diplomate est capital, il est la ressource intellectuelle, culturelle et sociale d’un État en exercice sur les terres internationales. Rappelons-nous également les paroles de Dominique de Villepin, qui a exercé brillamment dans ce domaine durant de longues années, qui a explicité le rôle capital de la diplomatie sur le terrain des stratégies internationales de la coopération.
Le diplomate peut également être un lanceur d’alerte sur des sujets géo-stratégiques, sociaux, culturels ou même écologiques. C’est d’ailleurs ce que défend Mankeur Ndiaye depuis de nombreuses années sur la question de la préservation de l’eau. Et c’est une réflexion éminemment pertinente car l’eau d’un territoire quel qu’il soit est source de richesses et de développement.
À travers la lecture de cet ouvrage, Mankeur Ndiaye nous explique aussi, de manière précise et avec des qualités pédagogiques évidentes, à la lumière de son parcours personnel très riche, un pan de l’histoire mondiale qui s’étend des années 1980 à nos jours. Et ce pour rappeler combien les services de l’État sont importants dans la conduite des politiques étrangères. Symboliquement, ce sont tous les États démocratiques qui se mettent autour d’une table pour discuter des enjeux contemporains et s’entendre sur l’essentiel. On imagine aisément les turbulences auxquelles sont confrontés les hommes de la diplomatie.
Au moment où Mankeur Ndiaye prend ses fonctions, le monde connaît des bouleversements importants, avec la chute du bloc de l’Est russe et la fin de la guerre froide. Ce qui conduit, peu à peu, les États à plus d’indépendance, à une expression nationale renforcée et à s’interroger durablement sur la condition des Droits de l’Homme et le droit de l’ingérence humanitaire développé par les Organisations Non Gouvernementales, tout en préparant les conséquences nouvelles de la mondialisation déjà en marche. Lourde tâche que celle de la diplomatie dans ce contexte !
Mais Mankeur Ndiaye nous fait le récit de cette période de manière éclairante, à la fois dans son analyse de futur diplomate mais aussi en intellectuel qui écrit sur le sujet. Mankeur Ndiaye redevient l’enseignant qu’il a été pour raconter l’histoire politique mondiale de ces trente dernières années et c’est absolument passionnant.
Ainsi le parcours de Mankeur Ndiaye est un moment du récit de notre pays et on le comprend à la lecture de ce livre. Mais l’ouvrage est aussi un formidable guide pour la jeunesse et pour tous ceux qui se destinent à embrasser une carrière diplomatique. Et il y a fort à parier que nous en aurons un grand besoin dans les années qui viennent.
Ce livre est un manuel d’enseignement et il pourrait amplement figurer au programme de la formation des hautes études diplomatiques. Tout comme la conviction qui habite Mankeur Ndiaye est intacte. Notamment sur les combats qu’il continue de mener sur la préservation des réserves d’eau du Sénégal et qui est un véritable enjeu stratégique de l’Afrique toute entière. Cet ouvrage est un phare dans le temps qui parvient à fusionner l’histoire du monde, l’expérience diplomatique et les ressorts de la littérature, celle qui informe, qui instruit, qui passionne, qui témoigne et qui fait sens pour les connaissances humaines.
Pour toutes ces raisons, et parce que le parcours de Mankeur Ndiaye est exemplaire, il faut lire ce livre éclairant sur l’histoire mondiale contemporaine qui apporte une lueur d’espoir à la renaissance africaine.
Amadou Elimane Kane, écrivain poète.
Diplomatie, 20 ans à la place, Mankeur Ndiaye, essai, éditions Panafrika / Silex / Nouvelles du Sud, 2018
[1]https://www.irenees.net/bdf_fiche-notions-11_fr.html#:~:text=La%20diplomatie%20est%20un%20art,ses%20objectifs%20et%20ses%20moyens.
[2] https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Litt%C3%A9rature
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