LA BIOMASSE, UN ESPOIR POUR STOCKER L'ÉNERGIE
A l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, Ndeye Maty Ndiaye aide de jeune chercheurs à mettre au point des batteries à partir de matière organique

D’un four à 300 °C, Sokhna Dieng sort des morceaux de nickel et de cobalt soigneusement déposés sur une coupelle en verre. Dans les deux petites pièces climatisées du laboratoire du département de physique de l’université Cheikh Anta Diop (UCAD) de Dakar, l’étudiante en master 2 de physique circule entre une quinzaine de machines modernes alignées sur des tables. Du matériel flambant neuf autour duquel d’autres étudiants en blouse blanche s’activent, attentifs à leurs expérimentations.
Depuis l’installation et l’équipement de ce laboratoire, en 2019, grâce à un financement de 230 millions de francs CFA (350 000 euros) de la Royal Society de Londres, les étudiants du M2 de physique et leur professeur, Balla Diop Ngom, travaillent sur l’exploitation et la valorisation de la biomasse locale. Il s’agit pour eux de sélectionner, parmi l’ensemble des matières organiques disponibles à Dakar et dans ses environs, celles qui permettront de stocker l’énergie, c’est-à-dire de fabriquer des piles et des batteries.
La course à la conception de batteries miniatures se joue au niveau mondial. Pour réduire leur poids, augmenter leur densité énergétique ou leur puissance de charge, l’Europe se mobilise avec un programme baptisé Battery 2030 +. Le Sénégal aussi. Parmi les axes de recherche de l’UCAD figurent en effet les batteries solides, dans lesquelles l’électrolyte liquide des batteries conventionnelles est remplacé par un conducteur solide. Les avantages sont nombreux : elles conjuguent une meilleure stabilité au plan thermique, plus de densité d’énergie embarquée, un temps de chargement réduit et une réduction de l’impact environnemental des procédés de fabrication. Autant d’avantages que le laboratoire universitaire estime éthiques, à l’heure où il est urgent de trouver l’énergie la moins gourmande possible.
Coques d’arachide et hibiscus
Ndeye Maty Ndiaye, Jeune Talent Afrique subsaharienne du programme Pour les femmes et la science 2021 L’Oréal-Unesco, consacrera la dotation de son prix à l’achat d’équipements et de produits chimiques pour son laboratoire. Spécialisée sur les nanoparticules d’oxyde de vanadium depuis son master 2 à l’UCAD, elle a préparé son doctorat en Afrique du Sud, grâce à une bourse d’études financée par l’Organization for Women in Science for the Developing World (OWSD). A 38 ans, elle est aujourd’hui assistante de recherche en postdoctorat.
Ndeye Maty Ndiaye a deux rêves. D’abord, « résoudre le problème d’accès à l’énergie dans tous les pays en voie de développement, et particulièrement au Sénégal… », explique la chercheuse. Elle aimerait « aussi motiver les filles et jeunes femmes pour que leurs rêves de sciences, technologie, ingénierie ou de mathématiques deviennent réalité ». Elle est revenue au Sénégal pour continuer ses recherches avec le professeur Ngom, après avoir soutenu sa thèse en 2019.