ENIEME REVOLTE CONTRE L’USINE DE PRODUCTION D’HUILE ET DE FARINE DE POISSON
Les acteurs du secteur de la pêche ont choisi ce week-end Cayar, pour marquer la célébration de la journée Mondiale de l’Océan 2024.

Les acteurs du secteur de la pêche ont choisi ce week-end Cayar, pour marquer la célébration de la journée Mondiale de l’Océan 2024. C’était surtout pour sonner la énième révolte contre Touba Protéine Marine (TPM), une usine de production d’huile et de farine de poisson, installée dans la ville depuis 2020. L’usine dont ils demandent la fermeture ou la délocalisation, est accusée de contribuer à l’accentuation de la raréfaction de la ressource halieutique, de détruire l’environnement et de mettre en danger la santé des populations.
C’est sous le thème «Renouveler en profondeur notre action», que la Coalition contre les usines de farine et d’huile de poisson, regroupant des acteurs du secteur de la pêche au Sénégal, a célébré ce week-end à Cayar la Journée Mondiale de l’Océan 2024.
Selon Mamadou Sarr Coordonnateur contre les Usines de Farine et d’Huile de Poisson, le choix de Cayar n’est pas fortuit. Il est lié à l’existence, dans la ville, d’une usine de production d’huile et de farine de poisson, en l’occurrence Touba Protéine Marine (TPM). Il renseigne qu’il y a à travers le pays 8 usines de ce genre, qui ne respectent aucune norme environnementale d’où cette engagement contre leur prolifération dans le pays.
Pour le cas de Cayar, il indique que la situation est très critique à cause de l’usine qui a fini par diviser la grande famille des pêcheurs locaux. C’est parce que, dit-il, c’est du poisson frais qui est transformé en huile et farine. Et à l’en croire, les agréments ont été délivrés par le ministère de tutelle, qui avait pourtant promis de ne pas le faire et cela n’a fait que corser les problèmes. Il est indéniable à ses yeux que l’usine dégage une odeur pestilentielle, crée une grande pollution à Cayar et les populations en souffrent beaucoup, avec surtout l’émergence de nouvelles maladies liées à une telle situation. D’ailleurs, Greenpeace Africa avait relevé à l’époque que des analyses faites par un laboratoire indépendant avaient montré des niveaux élevés de métaux toxiques dans l’eau de robinet, dans l’eau du lac où sont également enregistrés de faibles niveaux d’oxygène et tout cela à cause de la présence de l’usine. Il est aussi reproché à l’usine d’encourager quelque part la surpêche et d’exercer une concurrence déloyale par rapport aux femmes transformatrices, qui constituent cependant un maillon essentiel de la chaîne de valeur pêche.
Pour toutes ces raisons, Mamadou Sarr est d’avis que «ces usines compromettent la durabilité des pêcheries, menacent les océans ainsi que les communautés côtières et leurs moyens de subsistance». Pour lui, la solution, c’est de la délocaliser ou de la transformer en structure de fabrique de glace par exemple, en tout cas d’en faire autre chose que la production d’huile et de farine de poisson. Il reste convaincu que ce sont seulement les acteurs qui y trouvent des gains personnels qui agréent ces usines, qui ont fortement dégradé les emplois qui existaient. De toutes les façons, dit-il, même si l’usine a bel et bien son agrément, la lutte contre son implantation va continuer.
En tout état de cause, il a exprimé son «optimisme», car les nouvelles autorités ont signé la charte de la pêche en 13 points avant d’accéder au pouvoir, et sa mise en œuvre pourrait résoudre beaucoup de problèmes du secteur, notamment l’équation de la raréfaction de la ressource. Il souligne qu’un mémorandum signé par la coalition nationale, est adressé aux autorités sénégalaises, pour demander la fermeture des usines de farine et d'huile de poisson installées au Sénégal. «Ce plaidoyer intervient dans un contexte où la production annuelle de farine de poisson au Sénégal est estimée à 12 000 tonnes, correspondant à environ 60 000 tonnes de poisson frais qui auraient pu être consommés par les populations locales», a-t-il expliqué.
TALLA DIAGNE GUEYE CHARGE DE COMMUNICATION DE TPM : «Au lieu de réfléchir sur l’avenir de la pêche, ils s’acharnent contre des usines»
Interrogé sur les reproches formulés par la coalition, Talla Diagne Guèye chargé de la communication de Touba Protéine Marine (TPM) estime que la journée de l’océan est une opportunité pour les pêcheurs du monde de parler des enjeux actuels de la pêche, notamment les stratégies à dérouler pour faire face à la raréfaction de la ressource halieutique et permettre ainsi que les océans puissent nourrir les acteurs du secteur et les populations. Mais malheureusement, dit-il, «certains membres du Comité Local de la Pêche Artisanale (CLPA) de Cayar ont choisi de s’acharner contre les usines de farine et d’huile de poisson». Pour lui, l’usine Touba Protéine Marine (TPM), installée à Cayar depuis 2020, est en train de produire de l’huile et de la farine de poisson, sans aucun impact négatif sur la ressource halieutique. Il informe que l’usine transforme les résidus du poisson livrés par une autre usine basée au Port de Dakar. Selon lui, «ceux qui brandissent le fait que les femmes transformatrices peinent aujourd’hui à trouver de la ressource ont tout faux, pour la simple raison que l’usine n’est pas intéressée par le poisson frais. Ce sont des Organisations Non Gouvernementales (ONG)internationales qui sont derrière les pourfendeurs de ces usines de farine de poisson, pour tenter de dicter leurs lois. Mais elles oublient que le Sénégal est indépendant depuis 1960 et cette usine est entièrement sénégalaise et gérée par des sénégalais». Sur le plan de l’environnement, il explique que tous les quitus ont été délivrés à l’usine, après tous les contrôles requis en la matière. Il a invité les autorités à visiter l’usine pour comprendre définitivement qui dit la vérité dans cette affaire. Babacar Diallo Directeur Général de TPM avait laissé entendre que l’usine n’est intéressée que par les entrailles des poissons, les têtes, les queues, qui constituent des déchets qui étaient jusque-là jetés et parfois à la plage, avec tous les risques environnementaux que cela comporte. Ce sont donc ces déchets qui sont recyclés, valorisés et transformés en farine de poisson destinée à la fabrication d’aliments de volaille et de bétail, mais aussi en huile qui entre dans la fabrication de produits pharmaceutiques et cosmétiques.