LA BANQUE MONDIALE DEMANDE LA PUBLICATION ANNUELLE DES STATISTIQUES
Opacité dans l’évaluation de la soutenabilité de la dette publique

Les systèmes de suivi de l’endettement se révèlent inadaptés. C’est pourquoi, afin de freiner ce manque de transparence dans l’évaluation de la dette publique, la Banque mondiale a, dans un rapport publié récemment, demandé la publication annuelle des statistiques garanties par les Etats.
«Aussi délicat, soit-il, l’exercice de suivi efficace de l’endettement est à notre portée.» C’est l’une des conclusions d’un rapport de la Banque mondiale intitulé « Transparence de la dette dans les économies en développement ».
En effet, selon ce rapport, les failles des systèmes de suivi de l’endettement compliquent l’évaluation de la soutenabilité de la dette et brouillent, en ce qui concerne les pays surendettés, les perspectives de restructuration rapide afin d’assurer un redressement économique durable. De ce fait, pour faire face à ce fléau, la Banque mondiale a, dans son rapport, présenté une série de recommandations.
L’Institution financière internationale demande, entre autres, la publication annuelle des statistiques de la dette publique, garantie par l’État, l’incitation à collecter et publier des données de manière coordonnée et la création de systèmes intégrés de comptabilisation et de gestion de la dette conformes aux normes internationales.
Par ailleurs, présenté comme la première analyse exhaustive des systèmes nationaux et internationaux de suivi de l’endettement souverain, le rapport établit que les systèmes actuels de surveillance de la dette dépendent d’un ensemble de bases de données élaborées par différentes organisations, en s’appuyant sur des normes et des définitions variables et à la fiabilité plus ou moins avérée. «Ces incohérences conduisent à de fortes variations dans les décomptes publiés de la dette des pays à faible revenu — représentant dans certains cas jusqu’à 30% du PIB», indique l’institution financière qui constate dans son rapport que 40% des pays à faible revenu n’ont publié aucune donnée sur leur endettement souverain depuis plus de deux ans — et que ceux qui publient effectivement des chiffres tendent à les limiter à la dette du gouvernement central.
«De nombreux pays en développement recourent de plus en plus souvent à des prêts garantis par les ressources naturelles, gageant ainsi des recettes futures pour obtenir des financements. Entre 2004 et 2018, les prêts garantis par les ressources en Afrique subsaharienne ont représenté près de 10% des nouveaux emprunts. Plus de 15 pays sont concernés mais aucun ne fournit d’informations précises sur les modalités de ces garanties financières», a fait savoir la Banque mondiale qui dénonce des emprunts qui ne sont ni clairement identifiés dans les bilans des banques centrales qui font elles aussi appel à des outils de politique monétaire, comme les opérations de mise en pension («repo») ou les swaps, pour faciliter les emprunts publics auprès de créanciers étrangers, ni pris en compte dans les bases de données des institutions financières internationales.
«Les marchés financiers intérieurs des économies les plus pauvres se caractérisent également par leur opacité : selon le rapport, 41% à peine de ces pays recourent à des adjudications fondées sur le marché comme principal canal d’émission de la dette intérieure. Et ceux qui le font ne divulguent que des informations fragmentaires aux investisseurs», fait-on noter dans le rapport.