L’ETAT EXPLORE DE NOUVELLES NICHES
Exonérations rationnalisées, taxes spécifiques sur les produits pétroliers et les compagnies d’assurances, imposition sur les transactions financières frontalièress… dans le viseur du Fisc.

Exonérations rationnalisées, taxes spécifiques sur les produits pétroliers et les compagnies d’assurances, imposition sur les transactions financières frontalières… L’Etat recherche tous azimuts de novelles niches pour une mobilisation accrue des recettes fiscales.
La Loi de finances 2023 révèle que l’Etat va mettre en place un nouveau système de mobilisation plus accrue des recettes fiscales en vue d’améliorer progressivement le taux de pression fiscale tout en veillant à une répartition plus équilibrée de la charge de l’impôt. « Dans cette perspective, il a été envisagé de rationnaliser progressivement les exonérations pour assurer une meilleure justice fiscale et une plus grande performance du système fiscal. C’est ainsi que l’exonération en matière d’Impôt sur le revenu des intérêts des sommes inscrites sur les livrets d’épargne des personnes physiques servis par une banque, un systùème financier décentralisé, un établissement financier ou une caisse d’épargne situés au Sénégal est revue pour être désormais subordonnée à un seuil audelà duquel les rémunérations sont taxées. C’est également le cas de l’exonération de la TVA sur les locations de chambres et autres commodités hôtelières pratiquées dans les établissements privés de santé qui est supprimée en raison de la non répercussion de cette mesure aux usagers par lesdits établissements » expliquent les techniciens du ministère des Finances et du Budget. Dans le même ordre d’idées, les tarifs de la taxe spéciale sur les conventions d’assurances, qui avaient fortement baissé à la suite de la réforme fiscale de 2012, ont été revus à la hausse tout en étant alignés à ceux observés dans la sous-région.
Par ailleurs, selon le Gouvernement, dans le cadre du renforcement des moyens d’investigation de l’Administration fiscale, il est envisagé d’instaurer, à la faveur des nouveaux articles 642 ter et 650 bis, un quitus fiscal désormais indispensable aux redevables de la taxe spécifique sur les produits pétroliers pour obtenir à leur profit le déstockage de produits pétroliers effectivement imposables à ladite taxe. La mise en place de ce mécanisme est dictée, selon les services du ministre Moustapha Ba, par le souci d’assurer un meilleur contrôle sur le versement effectif des montants de taxes sur les produits pétroliers préalablement collectés par les redevables concernés.
Imposition des biens, prestations et services immatériels réalisés à partir de l’étranger
Jusqu’ici notre pays n’a jamais su capter des dividendes sur l’ampleur des transactions économiques transfrontières qui mettent actuellement en jeu d’importants flux financiers. Il est clair que, pour que le Trésor puisse en capter des dividendes, cela requiert un dispositif particulier de taxation permettant d’assurer une meilleure préservation des ressources fiscales de l’Etat, selon les techniciens de la Direction générale des Impôts et Domaines. C’est ainsi qu’il est prévu de revoir le dispositif de façon à assurer, grâce à l’insertion d’un article 355 bis, l’imposition à la TVA des biens et prestations de services immatérielles réalisées au profit d’un particulier non assujetti établi au Sénégal à partir de l’étranger et ce, au moyen d’un réseau informatique et/ou électronique. L’insertion dans le code d’une telle disposition permet de garantir un traitement fiscal uniforme pour toutes les activités relevant de la TVA quel que soit le procédé d’intervention du vendeur ou du prestataire tout en assurant dans le même temps une égalité de charge fiscale entre les différents bénéficiaires, entreprises comme ménages.
L’évasion fiscale des entreprises pétrolières étrangères attaquée
La faiblesse du dispositif fiscal contre les évasions organisées par certaines entreprises étrangères a poussé les autorités à instituer une retenue à la source libératoire pour appréhender les revenus réalisés par les entreprises étrangères n’ayant pas leur domicile fiscal au Sénégal mais qui cèdent, notamment à l’étranger, à partir de nos zones portuaires, des hydrocarbures dont elles disposent dans des bacs édifiés au Sénégal soumis au régime douanier de la consignation. Désormais une retenue à la source égale à 0,5 francs par kilogramme vendu est due par les entreprises n’ayant pas leur domicile fiscal au Sénégal mais qui cèdent directement aux importateurs agréés locaux ou étrangers les hydrocarbures dont elles disposent dans des bacs édifiés au Sénégal. La retenue est opérée par les dépositaires des stocks d’hydrocarbures et reversée au Bureau de recouvrement compétent au plus tard le 15 du mois suivant celui du prélèvement. « Ce mode de taxation, en plus de préserver la compétitivité de nos ports par rapport à ceux de la sousrégion permet d’appréhender des activités dont la nature se prête facilement à l’évasion fiscale » indique l’exposé des motifs.
Prélèvement sur les compagnies d’assurances
La loi n° 2018-24 du 06 juillet 2018, portant loi de finances rectificative pour l’année 2018 avait institué un prélèvement fiscal sur les compagnies d’assurance (PCA). Ainsi, l’article 45 de ladite loi, définissait le champ d’application qui couvre les sociétés et compagnies d’assurances agréées au Sénégal et l’article 46 de la même loi fixe le taux du prélèvement à 1%. « Cependant, après quelques années de mise en œuvre de ces dispositions, il a été constaté que les mêmes primes sont doublement imposées d’abord au niveau des compagnies d’assurance directes ensuite au niveau des compagnies de réassurance. Cela a eu notamment pour effet d’affecter la compétitivité de l’unique société de réassurance implantée au Sénégal dont le marché est exclusivement tourné vers l’extérieur » reconnaît le ministère des Finances et du Budget. Il est institué au profit du budget de l’État une taxe dénommée « Prélèvement sur les Compagnies d’Assurances ». Sont passibles de la taxe, les sociétés ou compagnies d’assurances agréées au Sénégal à l’exclusion des sociétés ou compagnies de réassurance. Le taux de la taxe est fixé à 1 % du chiffre d’affaires hors taxes des sociétés ou compagnies d’assurances. Toutefois, pour les primes d’assurance vie, le taux est ramené à 0,5 %. Le paiement de la taxe se fait sous forme de versements à effectuer dans les quinze premiers jours suivant la fin de chaque trimestre de l’année civile, sur le montant trimestriel du chiffre d’affaires hors taxes des sociétés ou compagnies d’assurances assujetties.