UNE DECISION AUX NOMBREUSES CONSEQUENCES ECONOMIQUES POUR LA SOUS-REGION
La cité religieuse de Tivaouane n’organisera pas cette année le Gamou. Cette mesure qui découle de la crise sanitaire a cependant des conséquences économiques qui dépassent les frontières du pays.

Comme tout le monde s’y attend si l’on se réfère à la position ferme du khalife général des Tidjanes Serigne Babacar Sy Mansour face à la pandémie de la COVID-19, La cité religieuse de Tivaouane n’organisera pas cette année le Gamou. Cette mesure qui découle de la crise sanitaire a cependant des conséquences économiques qui dépassent les frontières du pays.
Les principales rues de la cité religieuse de Tivaouane, capitale de la confrérie des Tidjanes au Sénégal, grouillaient de monde presque 24H/24, une semaine avant le Gamou qui célèbre la naissance du saint des Saints, Mohamed (PSL). Ainsi, l’évènement porte chaque année un important cachet économique qui, au-delà de la ville de Tivaouane et du pays, impacte certains pays de la sous-région comme la Guinée. En effet, les chasseurs de bonnes affaires s’installaient très tôt sur l’esplanade des mosquées pour ne pas se faire raconter les nuits du «bourd», avec le flux de clients. Les commerçants ralliaient donc la ville en très grand nombre, pour s’installer un peu partout. Ce qui entrainait la circulation d’une manne financière assez importante. D’ailleurs, les Sénégalais ne sont pas seuls sur ce terrain, car une colonie de commerçants guinéens se mobilise chaque année pour venir écouler ses produits, notamment des fruits (ananas).
D’autres femmes guinéennes s’installent près de leurs compatriotes vendeurs de fruits, et s’activent dans la restauration en proposant plus particulièrement des spécialités guinéennes. Une situation qui pousse les services financiers de la municipalité de Tivaouane à veiller aussi au grain pour prendre leur part du gâteau. En effet, la municipalité peut se retrouver parfois avec une centaine de millions Fcfa, venant d’une part de la taxe liée aux droits de place et de stationnement et le reste généré par l’impôt direct sur la publicité avec surtout les entreprises de téléphonie mobile.
L’impact économique négatif lié à la décision de renoncer à l’organisation du Gamou touche ainsi de plein fouet tout le secteur informel, dont la plupart des acteurs s’étaient déjà préparés, en remuant ciel et terre pour trouver les fonds nécessaires à leur investissement, afin de tirer le maximum de profit de cet évènement. Avec le Gamou, Tivaouane centralisait plusieurs milliards de Fcfa de chiffres d’affaires pour tous les secteurs économiques et ceux qui avaient commencé à sacrifier aux investissements, espérant faire de bonnes affaires, sont les plus grands perdants.
A rappeler que El Hadji Malick Sy, né en 1885 près de Dagana, est le principal initiateur de la célébration de la naissance du prophète, faisant de Tivaouane le point de ralliement de la communauté musulmane. D’ailleurs, Serigne Abdoul Aziz Sy «AlAmine» aimait à rappeler que «El Hadji Malick Sy n’a pas attendu d’avoir de l’argent et du monde autour de lui, pour célébrer le Maouloud». En effet, c’est au détour d’une discussion avec El Hadji Rawame Ngom à Saint-Louis qu’il a décidé de lire le Saint-Coran, après s’être rappelé que ce jour-là coïncidait avec la naissance du Prophète Mohamed (PSL). En 1902, alors qu’il venait de s’installer à Tivaouane, il a véritablement institutionnalisé la nuit du Gamou. A l’époque, un seul bœuf suffisait pour nourrir tous les pèlerins. Et dès le lendemain matin, la ville de Tivaouane ne donnait plus l’image d’une cité qui a abrité un évènement particulier.