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5 juin 2025
RESTRICTIONS DANS LES TOURNEES POLITIQUES : TENTATIVE DE MUSELLEMENT OU VICTIMISATION ?
Alors que certains candidats de l’opposition, comme Khalifa Ababacar Sall et Dr Babacar Diop, mènent leurs activités sans être inquiétés, d’autres, comme Malick Gakou et Bougane Guèye Dany, se plaignent de tentatives d’intimidation et de sabotage
Alors que certains candidats de l’opposition, comme Khalifa Ababacar Sall et Dr Babacar Diop, mènent leurs activités sans être inquiétés, d’autres, comme Malick Gakou et Bougane Guèye Dany, se plaignent de tentatives d’intimidation et de sabotage. Du deux poids, deux mesures, selon leurs soutiens, une simple tentative de victimisation, accusent les pourfendeurs.
C’est devenu un effet de mode. Il ne se passe presque plus une semaine sans voir des politiciens de l’opposition se plaindre de sabotages de leurs convois, dans le cadre de leurs tournées politiques. En partance, hier, pour Kédougou pour présenter ses condoléances à la famille des victimes des récentes manifestations de Khossanto, le candidat de Gueum sa Bopp, Bougane Guèye Dani, a regretté des entraves orchestrées par des éléments appartenant aux forces de défense et de sécurité. Dans une note reçue à ‘’EnQuête’’, son équipe de communication informe : ‘’Le voyage de Bougane Guèye Dany vers Kédougou a été confronté à un obstacle inattendu, lorsque le cortège a été bloqué à Koussanar, dans la région de Tambacounda, par les forces de l'ordre. Cette nouvelle entrave suscite la frustration de l'opposant.’’
Interpellé sur les circonstances et moments de ces entraves, ce membre de la cellule de communication précise : ‘’C’était entre 12 h et 13 h. Ils ont arrêté le cortège ; ils ont demandé pourquoi ce rassemblement ? Est-ce qu’ils ont une autorisation ? Vont-ils à une manifestation ? Ils ont essayé de les accuser de troubler l’ordre public, après avoir vérifié la conformité des documents de toutes les voitures du cortège. Par la suite, après appels et des va-et-vient, ils ont laissé partir les membres de la délégation. Destination Khossanto.’’
De l’avis du staff de l’opposant, l’Administration fait du deux poids, deux mesures, parce que pendant qu’on créait des problèmes à leur candidat qui menait un ‘’voyage humanitaire’’, celui de Benno Bokk Yaakaar menait tranquillement ses activités qui pourraient être assimilées à une campagne déguisée. ‘’Cette nouvelle entrave suscite la frustration de l'opposant, d'autant plus que, pendant ce temps, une autre personnalité politique, Amadou Ba, bénéficie d'une escorte sécuritaire et de l'accueil des autorités préfectorales, pour assister au lancement officiel des travaux de bitumage de la route Pire - Méouane - Daya Diop. Cette initiative soulève des questions, alors que nous sommes à seulement cinq mois des élections, suscitant des doutes quant à ses véritables intentions : s'agit-il d'une campagne déguisée, tandis que les opposants peinent à organiser des rencontres paisibles avec leurs partisans ?’’, s’interroge l’homme d’affaires politicien.
Bougane invoque un ‘’voyage humanitaire’’ à Khossanto et arrive à poursuivre son chemin
Si le candidat de Gueum sa Bopp a pu continuer son trajet sur Kédougou à la suite de cette brève interruption au niveau de Koussanar, Malick Gakou, lui, semble avoir moins de chance. Depuis qu’il a entamé sa tournée politique dans le Nord, il ne se passe pas un jour sans voir ses soutiens dénoncer dans les réseaux sociaux des tentatives de sabotage des FDS sur instructions de l’Administration territoriale. Les dernières en date ont été notées dans la région de Saint-Louis où il était hier.
Sur sa page Facebook, le candidat regrette : ‘’Comme partout où je suis passé avec ma caravane ‘Yoonu Ndam li’ (le chemin de la victoire, en wolof), la police et la gendarmerie sont déterminées à m’empêcher de circuler librement, allant même jusqu’à user du gaz lacrymogène pour disperser mes militants. Triste image pour notre démocratie.’’
Dans un communiqué, la section dakaroise du Grand parti dénonce une ‘’folie répressive’’ sur leur chef et candidat à la Présidentielle. ‘’Les responsables et militants du Grand parti du département de Dakar s’insurgent contre l’excès de zèle manifesté par les FDS qui n’ont pas hésité à gazer et jeter des projectiles sur un candidat qui n’a fait qu’exercer sa liberté de déplacement, un droit garanti par la Constitution’’, lit-on dans le communiqué.
Selon le document, depuis que Gakou est arrivé à Ndande (Louga où devait débuter sa tournée), des arrêtés et communiqués violant toutes les règles de droit et émanant des autorités administratives ont servi de prétextes pour intimider leur candidat. ‘’Malgré ce harcèlement et ces tentatives d’intimidation indignes d’un État de droit, la coalition Gakou 2024 et son leader sont déterminés à aller à la rencontre des Sénégalais partout où ils se trouvent’’, fulminent les responsables du Grand parti à Dakar.
Tout a commencé au niveau de Richard Toll. Dans une vidéo partagée par les amis de Gakou, on peut voir le candidat en pleine discussion avec les officiers de police. Lesquels lui ont notifié un arrêté du gouverneur le sommant de mettre un terme à ses activités pour défaut de déclaration préalable, conformément à la loi (voir encadré). Sur la vidéo, on entend le MC qui proteste pendant que Gakou échange avec les hommes en tenue. ‘’Les gens de la majorité sont en train de mener leurs activités politiques tranquillement, mais nous on nous interdit de mener les nôtres. On est dans quel pays ? C’est injuste’’. Puis, le public scande : ‘’Libérez Gakou ! Libérez Gakou… !’’
Malick Gakou dénonce une stigmatisation contre Yewwi Askan Wi
Jusque-là, ce dernier n’est pas arrêté pour être libéré. Les échanges semblent même empreints de respect dans la vidéo. D’ailleurs, prenant le micro, Malick Gakou apaise : ‘’Comme vous le voyez, le commissaire vient de me notifier l’interdiction de notre manifestation. En tant que républicain, je suis obligé de me conformer à cette notification. Même si nous ne sommes pas d’accord, même si nous dénonçons la forme, même si nous dénonçons le fond.’’ Dans d’autres vidéos, on voit le maire de Guédiawaye, Ameth Aidara, très agité dans des échanges houleux avec les forces de l’ordre. Et par moments ça a failli dégénérer. Membre de la délégation, le coordonnateur des étudiants, Malamine Fall, revient sur ce qu’il considère comme de la stigmatisation envers Yewwi Askan Wi. ‘’Khalifa Ababacar Sall, Dr Babacar Diop et les gens de BBY sont en train de mener tranquillement leurs activités. Ils n’ont jamais été inquiétés. Pourquoi Malick Gakou est pourchassé partout ? J’ai l’impression que tout ce qui est rattaché à Yewwi est brimé par le pouvoir’’, s’insurge le proche de Gakou.
Alors que certains soutiens de l’opposition invoquent systématiquement un musellement des autres candidats, d’autres mettent en exergue l’entêtement de certains opposants à ne pas se conformer aux règles qui exigent le respect d’un certain nombre de formalités, dont la déclaration préalable.
D’ailleurs, bien avant Gakou et Bougane, il y a eu les cas Dr Abdourahmane Diouf et Ousmane Sonko. Mais malgré ces exemples, certains continuent de vouloir mener leurs activités sans déclaration préalable, pour ensuite se présenter en victimes.
À la question de savoir quelle est leur version par rapport à la version de l’autorité selon laquelle ils n’ont pas respecté l’obligation de déclaration, Malamine Fall déclare : ‘’C’est notre nième tournée nationale, la quatrième. On n’a jamais fait de déclaration ; on ne nous a jamais inquiétés. Et comme je vous l’ai dit, les autres qui sont en train de mener leurs activités ne sont pas inquiétés. C’est Yewwi Askan Wi qui est ciblée.’’
L’autorité invoque une violation de la loi et l’absence de déclaration
Pour en savoir davantage sur ces interdictions tous azimuts, ‘’EnQuête’’ a essayé de joindre le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Maham Ka, mais en vain.
Toutefois, le document du gouverneur de Saint-Louis notifié à Malick Gakou a été plus ou moins explicite.
À en croire l’autorité, l’organisation des manifestations sur la voie publique est assujettie à des règles précises. Le gouverneur explique à Gakou : ‘’Il m’a été donné de constater votre présence dans le département de Podor à la tête d’une procession motorisée, depuis la nuit du 18 au 19 septembre. Selon toute vraisemblance, cette activité se poursuivrait dans les autres départements de la région de Saint-Louis. À cet effet, je voudrais rappeler que la libre circulation des personnes et des biens, ainsi que les manifestations et autres réunions sont rigoureusement encadrées par un dispositif législatif, lorsqu’il s’agit de la voie publique.’’
Aussi, fait remarquer le gouverneur, ‘’l’absence de déclaration d’une manifestation sur la voie publique, auprès de l’autorité administrative compétente, s’assimile-t-elle à un attroupement obligeant les forces de sécurité à procéder à sa dispersion. Dans ce sens, je vous renvoie aux dispositions de la loi n°78-02 du 29 janvier 1978 relatives aux réunions et à celles de la loi n°74-13 du 24 juin 1974 abrogeant et remplaçant les dispositions du Code pénal’’.
Par conséquent, souligne le gouverneur, ‘’je vous saurais gré de prendre en toute responsabilité les mesures nécessaires afin de mettre un terme à cette situation’’.
Malgré cette notification, Gakou et les siens ont poursuivi leur caravane. Partout, la police ou la gendarmerie sont intervenues pour disperser la manifestation, non sans heurt dans certaines situations.
TRAVERSÉE DAKAR – GORÉE : L'ASPECT SECURITAIRE MIS EN AVANT
La trente quatrième édition de l’emblématique traversée à la nage de Dakar à Gorée se déroulera le dimanche 24 septembre 2023. Madame le ministre du Pétrole et des Énergies, Aïssatou Sophie Gladima, est la marraine de cette édition.
La trente quatrième édition de l’emblématique traversée à la nage de Dakar à Gorée se déroulera le dimanche 24 septembre 2023. Madame le ministre du Pétrole et des Énergies, Aïssatou Sophie Gladima, est la marraine de cette édition. Un choix qui s'explique avant tout par l'amour de la nation pour la mairesse de Joal – Fadiouth.
Ce 24 septembre se déroulera la 34e édition de la traversée Dakar - Gorée. En conférence de presse ce mercredi, les organisateurs sont revenus un peu sur le déroulé de l'événement. "Cette année encore pour la traversée, le départ de la course se fera à la plage de la Voile d'or. Il y aura une course A de 5 200m et une autre dénommée B d'une distance de 4 500m", renseigne le président de la commission d'organisation, Fadilou Seck.
Il précise qu’avec plus de trente éditions au compteur, la traversée à la nage de Dakar à Gorée aura bel et bien lieu cette année. Cette manifestation sportive qui enregistre chaque année, au mois de septembre, la participation d’environ 600 nageurs de 11 à 65 ans célèbre la fête de la natation. ‘’Mais au-delà de l'aspect compétition, nous misons beaucoup sur la sécurité. En d'autres termes, nous aurions vraiment réussi l'événement, si tous les participants rentrent sains et saufs après le tournoi".
En outre, l'actualité émigration clandestine a conduit la commission d'organisation à établir un certain lien entre la natation et les dangers en haute mer. Selon Fadilou Seck, savoir nager est une question de survie, encore plus dans ce contexte où l'émigration irrégulière a refait surface.
Rappelons juste que l’innovation de taille de l'édition 2023 est que les inscriptions se sont faites en ligne sur le site de la fédération sénégalaise de natation et de sauvetage (FSNS). En outre, selon les organisateurs, un hommage sera rendu à un "éminent membre de la famille de la nation", feu Amadou Sakho, par ailleurs ancien trésorier général de la fédération de natation.
LA FAMILLE ACCUSE DE MARIE GUÈYE LA GENDARMERIE ET ANNONCE UNE PLAINTE
La photo d’une jeune dame de teint noir a été largement partagée, hier, sur Internet, avec un petit texte disant qu’elle a été tuée par des ‘’gendarmes’’, mardi soir.
La photo d’une jeune dame de teint noir a été largement partagée, hier, sur Internet, avec un petit texte disant qu’elle a été tuée par des ‘’gendarmes’’, mardi soir. Marie Guèye, le nom de la jeune dame, a perdu la vie suite à des violences exercées sur elle par des hommes en uniforme qui étaient en patrouille sur la plage de Ngor.
D’après la famille, deux agents lui ont demandé sa carte d’identité. Elle ne la détenait pas et les hommes en uniforme lui ont demandé de les suivre. ‘’Il a insulté Marie et l’a traitée de femme aux mœurs légères. Elle n’a pas supporté ces propos. Elle a demandé au gendarme d’être plus respectueux à son égard’’, témoigne le frère de la victime, Pape Alioune Guèye.
Après un échange de propos, ‘’les deux hommes l’ont prise à partie et l’ont emmenée dans le parking pour la faire monter de force dans leur véhicule. On ne sait pas ce qu’ils se sont dit. Mais ils lui ont versé ou lui ont fait inhaler quelque chose. C’est en ce moment qu’ils ont commencé à la frapper violemment. Ils ont pris la fuite, quand ils ont vu qu’elle était inerte. C’est ainsi que nous sommes venus l’assister et les ‘gendarmes’ ont pris la fuite’’, a rapporté Walfnet.
‘’Vu son état, on a appelé les sapeurs-pompiers pour son évacuation, car sa situation était critique. Mais au bout d’une heure d’attente, on a dû appeler un taxi pour l'emmener à l’hôpital. C’était, hélas, trop tard. Marie avait déjà rendu l’âme avant même d’arriver à l’hôpital’’, confie son frère les larmes aux yeux.
La famille annonce qu’elle usera de tous les moyens légaux pour obtenir justice. Elle compte, elle, porter plainte contre X pour meurtre.
En attendant, des manifestations ont éclaté, hier, en début de soirée, dans la commune. La veille, dans la foulée de l’annonce du décès de la jeune mariée, d’autres manifestations avaient eu lieu, tard dans la nuit. Les esprits ne s’étant pas calmés, la tenue d’une autre manifestation de protestation est annoncée.
LES PRETRES INVITENT L’ETAT A «VEILLER AU BON DEROULEMENT » DE L’ELECTION PRESIDENTIELLE
L’UCS appelle les Sénégalais «à bannir, toute forme de violence physique ou verbale, afin de favoriser la conscience citoyenne et l’esprit démocratique» et à la «prudence face à l’instrumentalisation et à la manipulation des consciences».
L’union du Clergé du Sénégal (UCS) invite, à travers un communiqué reçu, jeudi, à l’APS, l’Etat du Sénégal ‘’à veiller au bon déroulement de la prochaine élection présidentielle, dans la transparence, l’équité et le respect du choix des citoyens’’.
Les prêtres du Sénégal exhortent l’Etat ‘’à tout mettre en œuvre pour la préservation de la paix sociale et de la dignité humaine et à soutenir les initiatives de développement social et économique dans la société et les Sénégalais, à promouvoir le dialogue interreligieux dans le respect mutuel et la compréhension pour une coexistence pacifique’’, rapporte le texte qui sanctionne les travaux de la 45e assemblée générale de l’UCS, organisée du 18 au 21 septembre.
L’Archidiocèse de Dakar a accueilli à cette occasion plus de deux cents prêtres diocésains venant des sept diocèses du Sénégal ‘’pour rendre grâce au Seigneur et célébrer fraternellement ce demi-siècle au service de Dieu et de son peuple », selon le texte qui indique que cette assemblée générale a eu pour thème : ’’L’UCS hier et aujourd’hui : historique, figures marquantes et perspectives missionnaire’’.
L’UCS, selon le communiqué, appelle les Sénégalais ’’à bannir, toute forme de violence physique ou verbale, afin de favoriser la conscience citoyenne et l’esprit démocratique’’ et à la ‘’prudence face à l’instrumentalisation et à la manipulation des consciences ».
Les prêtres recommandent par ailleurs aux Sénégalais de ‘’valoriser leurs potentialités pour le bénéfice de notre Nation, face aux fléaux de l’émigration avec son lot de mortalité et de drames ». Ils appellent à »la promotion d’une fraternité ecclésiale et un dialogue ouvert aux autres religions et cultures, dans l’esprit de la Synodalité’’.
Ils encouragent aussi ‘’la promotion de la recherche théologique et de la production littéraire au sein de l’Église du Sénégal »’, saluant la tenue de cette assemblée générale marquée à sa clôture par ‘’des sentiments profonds de gratitude, de fierté et d’engagement envers le clergé’’.
Cette assemblée a montré ‘’l’importance cruciale de la collaboration entre prêtres et laïcs pour une Église dynamique et évangélisatrice’’, souligne l’UCS.
PENCS DE DAKAR : UN PATRIMOINE MENACE DE DISPARITION
Avec une population de plus de quatre millions d’habitants (projections 2023 de l’ANSD), l’ancienne presqu’île du Cap-Vert est aujourd’hui une mégalopole cosmopolite qui se modernise à un rythme effréné.
La presqu’île du Cap-Vert, du nom donné autrefois au terroir qui correspond à l’actuelle région de Dakar, était par le passé peuplé essentiellement de lébous, lesquels étaient communément surnommés ‘’Borom Ndakarou’’ (les propriétaires de Dakar). Le pays lébou était alors divisé en 12 pencs, ces places publiques où la communauté se retrouvait pour discuter, légiférer, juger ou célébrer mais qui, aujourd’hui, ont tendance à disparaitre sous la pression d’une urbanisation galopante.
Avec une population de plus de quatre millions d’habitants (projections 2023 de l’ANSD), l’ancienne presqu’île du Cap-Vert est aujourd’hui une mégalopole cosmopolite qui se modernise à un rythme effréné.
Les anciennes demeures léboues ont été pour la plupart vendues, tandis que d’autres sont devenues presqu’invisibles en raison de la modernisation de la ville.
‘’Il ne reste que quelques maisons authentiques qui passent presque inaperçues au milieu d’immeubles et autres constructions modernes au niveau de Dakar-Plateau’’, explique Diossy Mbengue, un notable du penc de Mbot.
Il indique que la plus grande partie de cette surface bâtie appartenaient aux lébous et que certaines maisons ont été vendues pour des questions d’héritage.
D’autres familles léboues ont donné leurs propriétés en bail, dans la plupart des cas à des commerçants, en particulier les Libano-syriens.
‘’Les pencs actuellement à Dakar Plateau comme à la Médina sont envahis par les marchés et ont tendance à disparaitre en tant que patrimoine’’, fait remarquer l’écrivain Abdou Khadre Gaye, président de l’Entente des mouvements et associations de développement (EMAD).
A la Médina, le constat est le même, dit-il, se réjouissant du fait que le penc de Santiaba, siège de la collectivité léboue, fait partie des quelques pencs qui ont conservé une partie de leur authenticité.
‘’Toutes les réunions et autres activités de la collectivité léboue se déroulent au penc de Santhiaba en raison de sa configuration qui offre une cour très large’’, explique Matar Diop, djambour de Dakar et l’un des trois djambour de Mbakeuneu.
Un peuple originaire du Nil
Jadis, les lébous vivaient sur la partie côtière de la région de Dakar, qui va du Plateau à Ouakam, ainsi qu’à Ngor et Yoff. Dakar-Plateau était la zone la plus densément peuplée, où la communauté léboue avait établi résidence autour de ‘’penc’’.
Pour comprendre l’histoire de ce peuple traditionnellement pêcheurs, ‘’il faut d’abord remonter assez loin dans le temps’’, indique Abdou Khadre Gaye. ‘’L’historien Cheikh Anta Diop nous dit que cette population est venue des rives du fleuve Nil, en Egypte’’, confie le président de l’EMAD.
Né au penc de Thieudème, à Dakar Plateau, Abdou Khadre Gaye est passionné par l’histoire de ses aïeux.
‘’C’est au 5ème siècle, avec l’occupation de l’Egypte par les Perses que les populations se sont déplacées et les lébous en même temps’’, révèle-t-il.
D’après lui, les lébous sont passés par la Mauritanie, les royaumes du Tékrour et du Walo, au nord du Sénégal. C’est au moment où Ndiadiane Ndiaye, le premier roi du Djolof fonda en 1360 le grand Djoloff, qu’ils ont pactisé avec lui pour venir s’installer dans son royaume.
Ils quittèrent ce royaume sous le règne d’un roi dictateur et sanguinaire et vinrent s’installer dans la presqu’ile du Cap-Vert, car refusant d’être réduits en servitude.
‘’Au niveau de la presqu’île du Cap-Vert, le premier village fondé s’appelait +Moukhère+ et le centre du village se trouvait au niveau du site actuel du Stade Léopold Sédar Senghor’’, déclare avec ardeur Abdou Khadre Gaye.
C’est selon lui une épidémie de la maladie du sommeil qui a provoqué l’éclatement du village, dont les habitants se scindèrent en trois groupes.
“Le premier groupe a fondé le village de Yoff qui a donné naissance à Ouakam, ensuite à Ngor. Ces trois villages constituent un trépied que l’on appelle +tank+ (pied en wolof). Les lébous disent +fii le tankk yèm+ [C’est ici la fin de la terre]’’, explique-t-il.
Le deuxième groupe a créé le village de ‘’Bègne’’, dont l’emplacement est situé vers Hann-Bel Air. Ce village n’existe plus aujourd’hui.
Le troisième groupe a fondé le village de Soumbédioune. C’est lors d’une réconciliation à la suite d’une querelle interne entre les habitants de Bégne et Soumbédioune, que les 12 pencs formés.
Bataille pour l’occupation de Dakar-Plateau
Selon des documents historiques, les premiers villages avaient été établis sur la Pointe de Dakar. Mais les Français voulaient s’installer dans cette zone, qu’ils considéraient comme étant plus habitable et, qui plus est, se trouve près de la mer et offrait une vue imprenable.
Ils ont alors commencé à déguerpir les lébous pour les réinstaller sur les dunes de sable situées à l’époque au-delà de la rue Vincent. L’année 1914 fut une année cruciale, avec l’apparition d’une épidémie de peste.
‘’Certains dignitaires disent que cette épidémie a été inventée pour donner l’occasion de déguerpir les pencs’’, révèle Diossy Mbengue, notable et natif du penc de Mbot.
Selon le président de l’EMAD, c’est à cette occasion que le colonisateur créa le ‘’village de ségrégation’’ de la Médina.
Il explique que l’actuelle avenue Malick Sy, bordées alors de filaos, constituait la zone tampon séparant deux mondes : la ville française et la ville autochtone.
Pour forcer les lébous à quitter leurs villages, les colons n’hésitaient pas à envoyer de exécutants de basses œuvres pour mettre le feu aux cases.
Certains habitants acceptèrent de partir. Six pencs s’installèrent ainsi à la Médina, avant qu’une révolte des populations n’éclate.
‘’Les lébous ont des autels domestiques qu’on appelle ‘’Khamb’’ situés sur le site de l’actuelle école Bibi Ndiaye et les colons voulaient mettre le feu à ces ‘’khamb’’, relate-t-il.
‘’Armand Angrand [maire de Gorée en 1928 et de Dakar en 1934] nous raconte dans son livre qu’il y avait 5000 personnes au niveau de l’actuelle avenue Lamine Guèye angle Faidherbe, armées jusqu’aux dents pour dire si vous mettez le feu à une seule case, nous mettrons le feu au palais du gouverneur’’, déclare, ému, l’écrivain Abdou Khadre Gaye.
Le gouverneur d’alors ainsi que le député Blaise Diagne et le guide religieux El Hadj Malick Sy se rendirent sur les lieux pour décanter la situation.
‘’Abdou Aziz Sy Al Amine nous a raconté que ce jour-là, El Hadj Malick Sy a fait un aller-retour pieds nus entre la zone où avaient eu lieu les émeutes et le palais du gouverneur, sans s’en rendre compte’’, raconte-t-il.
Il s’agit ainsi, précise-t-il, du premier incident qui fit reculer les colons dans leur entreprise de déguerpissement des lébous.
Un deuxième évènement dissuadera de nouveau le colon, selon Diossy Mbengue. A l’époque, dit-il, Farba Paye était le Jaaraf du penc de Mbot. On le surnommait le commandeur des abeilles.
‘’Il avait un pouvoir mystique énorme tiré d’un long séjour passé à Ouakam pour y apprendre le Coran mais surtout la sorcellerie’’, raconte Diossy Mbengue.
‘’Lorsque les brûleurs de cases sont arrivés à Mbot, ils l’ont trouvé au niveau de l’arbre penc. Il a refusé de quitter les lieux. Une dispute éclata et il sortit sa hache. Quand il y a eu cette querelle, il a frappé un coup de hache sur l’arbre et au lieu de sève, c’est du sang qui en est sorti. Alors, les brûleurs de case eurent peur’’, raconte le vieux Diossy Mbengue.
Selon lui, ‘’c’est cet arbre qui abritait l’armée d’abeilles. Donc, il a fait ses incantations et les abeilles sont sorties en une grande nuée. Les brûleurs de cases, qui étaient sur des chevaux, se sont alors enfuis’’, poursuit-il.
Quand El hadj Malick Sy prédisait la reconquête du Plateau
Le troisième évènement fut la première Guerre mondiale, qui éclata en 1914. L’éclatement de ce conflit avait détourné l’attention des colons vers d’autres préoccupations, se souviennent les notables lébous.
Mais compte tenu du fait que six pencs étaient déjà installés à la Médina, témoignent-ils, El Hadj Malick Sy a demandé aux habitants d’y rester, prenant exemple sur le Prophète Mohamed (PSL), qui a quitté la Mecque pour Médine avant de revenir, plus tard, pour la reconquérir.
D’après Abdou Khadre Gaye, le guide spirituel avait alors déclaré : ‘’Je vous prédis que vous allez revenir reconquérir les terres de Dakar Plateau.’’
‘’Et effectivement, Blaise Diagne a été élu à cette même période premier député noir africain à siéger au Palais Bourbon. Ensuite, il a continué les transactions et les populations ont été dédommagées et on leur a redonné leurs terres du Plateau’’, explique-t-il.
Il souligne que c’est El Hadj Malick Sy qui donna le nom de Médina au village de ségrégation. ‘’Le village devait s’appeler Ponty-ville, en hommage au gouverneur William Ponty, présent à Dakar au moment des émeutes et qui est décédé quelque temps après’’, renseigne Matar Diop, un notable lébou.
Il indique que c’est à partir du village de ségrégation que sont nés six pencs : Santiaba, Mbakeuneu, Thieurigne, Diécko, Ngaraf et Kaay Ousmane Diène.
‘’Mbakeuneu est le premier penc qui s’est installé en 1914 à la Médina et qui a donné naissance au penc de Santiaba. Mais nous sommes tous liés par les liens de parenté, car les lébous se mariaient entre eux’’, renseigne-t-il.
‘’Il y a également six penc à Dakar-Plateau : les penc de Mbot, de Gouye Salaan, Thieudème, Yakk Dieuf, Hock [qui n’existe pratiquement plus, mais qui a donné naissance à Fann Hock] et Kaay Findew’’, souligne Matar Diop.
Chaque penc renvoie à une famille fondatrice
Selon l’écrivain Abdou Khadre Gaye, chaque penc renvoie à une famille bien déterminée, laquelle est sa fondatrice. Il en est ainsi des ‘’pencs Thieudème et Kaay Findiw’’ reliés à la famille Mbengue et du penc de ‘’Mbot’’, qui renvoie à la famille Paye.
Le penc ‘’Yakk Dieuf’’ relève de la famille Samb, et ‘’Hock’’ de celle des Guèye. Le penc de ‘’Santiaba’’ doit son existence aux Diop, tandis que ‘celui de ’Thieurigne’’ est relié aux Ndoye. ‘’Diécko et Ngaraaf’’ renvoient à la famille Diagne.
Les pencs ‘’Mbakeuneu, Kaay Ousmane Diène et Gouye Salaan’’ renvoient respectivement aux familles Mbaye, Diène et Dione’’, explique l’écrivain.
Il regrette aujourd’hui que les pencs, qui représentent un patrimoine historique, tendent à disparaitre.
‘’Les espaces sont laissés à l’abandon et ont tendance d’année en année à se détériorer et pour pouvoir les conserver, on devrait les préserver comme un patrimoine national’’, plaide-t-il.
En attendant, Abdou Khadre Gaye se bat corps et âme au quotidien pour conserver ce patrimoine et faire aussi revivre la culture léboue à travers ses écrits et l’association qu’il préside.
Il précise que le ‘’Festival Mémoire des pencs’’, organisé tous les ans, entre dans le cadre de ce combat pour la préservation de ce patrimoine matériel et immatériel.
L’écrivain projette aussi de sortir l’année prochaine un nouveau roman ‘’Le rêve du baobab’’.
‘’C’est l’histoire d’un jeune qui va à la découverte de sa ville natale qu’il ne connait pas. Une occasion pour raconter l’histoire des pencs et des légendes lébous’’, explique l’auteur.