26% des écoles privées étudiées sont reconnus, 69% sont autorisés et 5% non autorisés, avec une ¬utilisation massive des professeurs du public par le privé. C’est ce qui ressort du rapport de l’enquête menée par la Cosydep qui a ¬partagé les résultats hier, lors d’un webinaire.
Quels sont les impacts de la privatisation sur le droit à l’éducation ? La Cosydep a tenté de répondre à cette question en menant une enquête. Le rapport révèle que 26% des écoles étudiées ont une reconnaissance, 69% sont autorisés et 5% sont non autorisés. Parmi les écoles enquêtées, les 16% appartiennent à des personnes morales (associations), les 4% aux communautés religieuses, les 22% aux personnes morales (Gie). Les 2% sont aux acteurs individuels (mécènes), les 56% aux acteurs individuels (autres). L’enquête détermine également que les établissements privés de l’échantillon sont majoritairement à but lucratif (84%) et font des bénéfices (60%), la plupart de ces établissements (50%) ont été créés entre 2010 et 2020 et 19% bénéficient de subventions.
Pour ce qui est de la part des effectifs du privé dans les cycles d’enseignement, le rapport indique qu’au niveau pré-primaire, le privé y est dominant. Ainsi 109 mille 976 enfants préscolarisés sur un effectif de 252 mille 330, soit 43,06%. Dans l’enseignement élémentaire, 365 mille 557 sur 2 millions 171 mille 967, soit 16,8%. Concernant l’enseignement moyen général, il s’agit de 135 557 sur un effectif total de 746 497, soit 18,20%. Pour ce qui est de la part du privé dans le total des écoles à l’élémentaire, elle s’établit comme suit : dans le cycle élémentaire, sur 10 343 écoles élémentaires : 83,4% sont publics, 16,2% privés et 0,4% de statut communautaire/associatif. De 2015 à 2019, le réseau d’écoles élémentaires, public et privé confondus, a connu un taux d’accroissement moyen annuel de 2,0%, soit une augmentation globale de 794 écoles. Dans le même temps, le réseau d’écoles publiques n’a connu qu’un accroissement d’1,5%. «La conclusion est que le développement de l’élémentaire privé est environ 5 fois plus rapide que celui du public. La tendance à une progression constante de l’offre privée est perçue comme une forme de privatisation rampante», dit le rapport.
Par ailleurs, le rapport montre l’évolution des établissements préscolaires privés entre 2015 et 2019. En effet, dans le préscolaire, plus de 236 nouveaux établissements ouverts entre 2015 et 2019, avec une augmentation de 59 entre 2015 et 2016, 40 entre 2016 et 2017, 67 entre 2017 et 2018, 70 entre 2018 et 2019. Ce qui fait dire à la Cosydep que ce rythme de progression donne en moyenne une croissance d’une quarantaine d’établissements nouvellement créés au préscolaire par an.
Par rapport aux établissements privés, à l’élémentaire, à la même période, il est noté que 296 nouveaux établissements ont été ouverts entre 2015 et 2019, avec une augmentation de : 88 entre 2015 et 2016, 65 entre 2016 et 2017, 89 entre 2017 et 2018, 54 entre 2018 et 2019. «Une évolution très inconstante. L’enseignement élémentaire doit faire l’objet d’une vigilance particulière», commentent les rédacteurs du rapport. Ce dernier rapporte aussi que 74% des parents interrogés ont déclaré avoir scolarisé leurs enfants en écoles privées non pas par choix mais par obligation. Ces parents déboursent entre 50 et 400 mille F Cfa par an pour les frais de scolarisation et autres frais opportunistes, détaille l’enquête.
Autre fait marquant du rapport, c’est l’utilisation massive des professeurs du public par le privé, «en contradiction avec les dispositions des textes législatifs et réglementaires». En fait, 54% ont des Cdd et 44% sont des vacataires, 39% des établissements observés ne sont pas à jour des cotisations sociales, moins de 20% des écoles comptent 10 à 15% d’agents qualifiés titulaires de diplômes professionnels.
Entres autres recommandations, la Cosydep demande le renforcement du dispositif de contrôle et le respect des normes du secteur privé de l’éducation. Mais aussi s’assurer que soient respectées les qualifications professionnelles minimales du personnel, les conditions de travail, d’emploi et de rémunération, la liberté d’association et de négociation collective.
Par Serigne Saliou DIAGNE
FOOTBALL SENEGALAIS, LES FRUITS MURISSENT
Les récompenses de Mané et Pape Matar Sarr aux Caf Awards montrent que les Lions ont un présent garanti, mais gardent les promesses d’un avenir radieux grâce à la rigueur, la discipline dans l’organisation comme viatique
La moisson fut belle à la cérémonie des Caf Awards, organisée par la Confédération africaine de football (Caf) pour célébrer le football africain et récompenser les performances majeures. Le Sénégal a été le grand gagnant de cette belle nuit du football africain avec les récompenses de meilleure sélection du continent pour l’Equipe nationale masculine, de meilleur entraîneur pour Aliou «El Tactico» Cissé, de meilleur but pour Pape Ousmane Sakho du Simba Fc de Tanzanie, de meilleur jeune joueur pour Pape Matar Sarr et le graal du Ballon d’or africain pour Sadio Mané. Ces récompenses sont pleines d’enseignement tant elles sont révélatrices d’un aboutissement d’une marche pour le football sénégalais. J’avoue avoir lu, avec un pincement au cœur, La Saga de l’Equipe nationale de football, le livre de Mamadou Koumé publié avant la Can 2021, en regrettant l’absence de titres pour nos Lions après tant de belles campagnes. Cette «anomalie», maintenant réparée, renseigne que la concrétisation dans toute entreprise peut prendre le temps des dieux.
Le Sénégal a été récompensé aux Caf Awards tant par l’expression de ses talents individuels que par la symphonie cohérente de son potentiel collectif. Il y a comme trame de fond à ce succès, une politique sportive pertinente qui a donné toutes les chances au football et lui a permis, essai après essai, d’évoluer, de s’éprouver, de corriger ce qui n’allait pas. Le succès est bien une affaire au long cours et cela, l’équipe à la tête du football sénégalais l’a compris pour s’être obstinée malgré les critiques à porter à bout son projet avec le sélectionneur Aliou Cissé. Le succès est également une affaire de volonté politique, car le chef de l’Etat Macky Sall a cru aux chances du football pour y miser de grosses billes afin d’atteindre un jour la place qui est la nôtre. Il faudrait militer à ce que la politique volontariste à l’égard du football fasse tache d’huile pour toutes les autres disciplines sportives.
Il n’y a pas meilleure vitrine du Sénégal que le sport et sa culture. L’accompagnement de son rayonnement est un impératif qui devrait être inscrite en lettres d’or dans toutes les politiques du pays. Mbougar Sarr soutenait, lors de sa décoration dans l’Ordre national du Lion, que le Sénégal a toujours brillé par sa culture. Aujourd’hui que le sport s’y ajoute, il ne faut pas négliger le potentiel que des sélections nationales performantes apportent en termes de soft power. Un Sénégalais qui se déplace à l’étranger est avant tout interpellé sur El Hadj Diouf et Sadio Mané, au détour de conversations, avant de penser à Macky Sall ! La spirale de succès du football sénégalais, à travers les faits d’armes de l’Equipe nationale masculine de football, est à encourager pour qu’elle déteigne sur le football féminin et la participation de nos clubs aux compétitions africaines.
Le président du Casa Sports, Seydou Sané, confiait à la rédaction du journal Le Quotidien, les immenses défis qui attendent son club pour sa participation à la Ligue des Champions africaine en étant le club fanion de tout le Sénégal. La marche sera d’autant plus haute pour la perle du Sud après la razzia des Sénégalais aux Caf Awards.
Voir Sadio Mané et Pape Matar Sarr prendre les principales récompenses saluant les performances individuelles montre que l’équipe du Sénégal a un présent garanti, mais garde les promesses d’un avenir radieux en gardant ses viatiques de rigueur, de pragmatisme dans la quête du résultat et de discipline dans l’organisation.
Les joueurs sénégalais font les gros titres des marchés des transferts, ils évoluent dans les plus grosses écuries et cela ira crescendo en nous dotant d’un football local de qualité, en mesure d’être un réceptacle de talents auxquels les portes du monde ne sont pas encore ouvertes. Le potentiel économique et social d’un écosystème viable du football local sénégalais peut être énorme. Les travaux de Mickaël Correia, auteur d’Une histoire populaire du football, sur la dimension économique et socialisante des championnats Navetanes donnent de belles pistes sur une professionnalisation effective de notre football.
La symphonie mise en orchestre par Aliou Cissé avec notre Equipe nationale est le tableau sublime de ce que serait le Sénégal, si chacun, à sa station, jouait pleinement sa participation dans l’atteinte de gains communs et la poursuite d’idéaux. Tout est à notre portée si la volonté qu’il faut est de mise. Un des sélectionneurs des Lions, Alain Giresse, nous rappelait à juste titre, à une certaine époque, que notre Peuple avait «une haute estime de son football» bien qu’il n’avait rien gagné. Aujourd’hui, les Sénégalais peuvent clamer tout haut que leur football s’invite à la table des grands et peut représenter fièrement tout le continent africain partout. Nous avons investi dans notre football, nous avons cru en lui, nous pouvons fièrement croquer les fruits de ses succès présents et futurs.
IL N’Y A PAS DE RÊVE IMPOSSIBLE
Pour sadio Mané, ce second sacre au Caf Awards n'est qu'une étape d'autres défis attendent. La coupe du monde et la réussite de sa saison au Bayern. Tout ça attendent mais le meilleur joueur africain ne panique pas.
Coupe du monde
« Cela n’a pas été facile, on le savait. Mais, comme je le dis, la chose la plus importante pour nous, c’était de gagner la CAN. Ce genre de récompense, pour nous, vient après (Caf awards). Je suis quelqu’un qui a confiance en lui. C’est aussi important en tant que footballeur. On ne va pas s’arrêter là après avoir gagné la Can. Parce qu’on a des rêves. Certains pensent qu’il y a des rêves impossibles. Moi, je dis que tout est possible. Donc, il faut se donner les moyens pour ça. On est arrivé au stade où on n’a rien à perdre. Cela ne va être facile mais c’est possible quand même. Il faut essayer de se préparer comme on l’a fait avant la Can et challenger les gros morceaux à la Coupe du monde ».
Choix du Bayern
« J’aime les challenges. J’ai passé six belles années à Liverpool. Pour moi, il était temps de changer d’air. J’étais sur le point de quitter et il y avait le Bayern qui était très (très) intéressé. Après, comme je suis quelqu’un qui ne s’emballe pas, j’ai essayé de comprendre le projet et il était fascinant. J’ai parlé avec le coach,… et ils m’ont expliqué et ça m’a plu, moi et mes conseillers, bien évidemment. Je pense aussi que je suis dans un très grand club. Pour le moment, tout se passe bien. Ils m’ont accueilli à bras ouverts. Je suis flatté. Maintenant, on a débuté par les matchs amicaux. On a joué hier et gagné. Je suis content ».
Par Abdoul Aly KANE
LA CRISE MONDIALE ET L’URGENCE D’UNE RÉFLEXION ÉCONOMIQUE PROSPECTIVE
Le contexte politique et économique mondial actuel appelle de la part des dirigeants une réflexion stratégique absolument indispensable du fait des bouleversements intervenus depuis près de 14 ans aux plans économique, politique, géostratégique.
Le contexte politique et économique mondial actuel appelle de la part des dirigeants une réflexion stratégique absolument indispensable du fait des bouleversements intervenus depuis près de 14 ans aux plans économique, politique, géostratégique. Des bouleversements qui ne laissent indemne aucun pays de la planète. Au-delà du COVID, on assiste à une cassure du système économique mondial provoqué par diverses crises démarrées en 2008 avec la crise bancaire américaine, suivie de celle de l’Europe due à l’endettement de la Grèce en 2010/2011, pour aboutir au choc économique et sanitaire du COVID, à la guerre Russie/Ukraine transformée en guerre Otan/Pacte de Varsovie nouvelle formule, avec ses effets sur le système monétaire international, l’approvisionnement mondial en céréales et autres produits énergétiques. La conséquence des derniers chocs est la croissance de l’inflation aux USA et en Europe affaiblissant les économies et mettant à mal la bonne tenue de l’euro sur le marché des changes et créant de ce fait des divergences de vues et d’intérêts entre pays membres de la zone monétaire.
Comme déjà évoqué dans de précédentes contributions, la guerre et les sanctions économiques et financières consécutives à l’encontre de la Russie ont eu comme effet non seulement d’exclure ce pays de la mondialisation dans laquelle elle était insérée par ses fournitures en énergies et en céréales mais encore de donner naissance à des mouvements centrifuges dans les pays émergents, désormais orientés vers la création d’un nouveau pôle mondial alternatif essentiellement centré sur la Chine, la Russie, l’Inde, l’Iran et la Turquie.
Cette rupture intervient dans un contexte européen de chômage et de forte inflation touchant l’alimentation des ménages mais aussi les charges des entreprises lourdement impactées par la hausse de l’énergie. Au plan monétaire, l’euro perd progressivement de sa valeur par rapport au dollar et, accessoirement, au franc suisse du fait de l’alourdissement de la charge de la dette publique des pays du Sud qu’aurait causé la remontée des taux d’intérêts.
La fin de l’euro comme monnaie unique est de plus en plus annoncée compte tenu des intérêts divergents des pays de cette zone en matière de politique monétaire. Cette perspective doit être intégrée dans une réflexion stratégique au double plan économique et monétaire. Les positions souverainistes se font jour partout en Europe. Elles gagnent du terrain en France et, pour les souverainistes italiens, la dette publique s’élevant à près de 150 % du PIB du pays serait mieux gérée en lire italienne plutôt qu’en appliquant les règles de gestion de la monnaie commune de la Banque Centrale européenne.
La fin de l’euro, qui relève du champ des possibles, ne devrait pas entraîner ipso facto un arrimage systématique à la monnaie de la France sans pour autant mettre en avant des principes de souveraineté économique. Une politique économique souveraine à l’échelle du Sénégal reviendrait à rompre d’avec notre propension naturelle à importer jusque-là favorisée par le pouvoir d’achat d’un franc CFA fort parce qu’adossé à un euro fort depuis près d’une vingtaine d’années. Il est difficilement concevable que les aiguilles de machines de confection puissent encore être importées de France (SCMETZ) ou d’Inde ou de Chine. Importer c’est favoriser la création d’emplois chez le pays fournisseur.
À notre sens, il faut en revenir à la politique économique d’avant 1980, à savoir favoriser l’émergence de PME tournées vers la substitution progressive aux importations. Bien entendu, cela exige la mise en place de mesures protectionnistes pour ces industries naissantes qui ont eu cours dans notre pays avant l’ouverture tous azimuts au marché mondial au milieu des années 80. Le monde change et il est l’heure de changer avec lui. L’économie américaine a mis en place sous le magistère du président Trump des mesures protectionnistes contre la Chine afin de rééquilibrer la balance commerciale entre les deux pays, défavorable aux USA.
Cette politique est aujourd’hui poursuivie par exemple en matière de fabrication de panneaux solaires. Pourquoi les pays africains seraient-ils interdits de protéger leurs industries naissantes ? Il faudrait en revenir à une politique publique de création de PME dans des secteurs ciblés au préalable pour leur apport au rétablissement de l’équilibre de la balance commerciale, leur contribution à l’accroissement de nos réserves de change et à la création d’emplois.
Pour cela, des institutions d’accompagnement comme la SONEPI devenue ADEPME doivent être créées ou renforcées. Elles doivent pouvoir répondre aux besoins spécifiques de PME sectorielles et être dotées de moyens pour l’élaboration d’études de marché et de rentabilité, la mise en place de programmes de formation en matière commerciale, financière, comptable, technique, et technologique, et de suivi dans la durée de leurs progression.
Des banques d’Etat pour impulser la création de PME
La création d’un tissu d’entreprises ne peut se faire sans banques spécialisées. La banque privée classique, dont le management est sujet à la reddition de comptes à ses actionnaires, ne sera pas encline à prendre des risques pour l’émergence de PME. Seules des banques d’Etat, dont les objectifs sont clairement définis dans cette direction, ont la latitude d’œuvrer dans ce sens.
Par le passé, le management des banques dites nationales au Sénégal s’était lancé dans une politique de crédit peu prudente en finançant tous azimuts le secteur arachidier via l’ONCAD et des particuliers choisis « intuitu personae » dans le secteur immobilier, en lieu et place de secteurs économiques identifiés comme prioritaires. Il s’en est suivi des pratiques de mal gouvernance à l’ONCAD et une saturation de la construction immobilière qui a fini en crise immobilière aigue, due à l’excès de l’offre sur la demande de vente et de location des biens immobiliers et avec comme conséquence des défauts de remboursements à grande échelle des débiteurs.
Pour éviter une faillite bancaire généralisée et protéger les déposants, la BCEAO et l’Etat du Sénégal intervinrent respectivement en rachetant aux banques leurs créances compromises et en renflouant la trésorerie des banques concernées.
Cette crise est à l’origine de la mise en place de nouvelles règles prudentielles par la BCEAO applicables aux banques en matière d’octroi de crédits et de comptabilisation et de réalisation de garanties foncières ne favorisant pas la prise de risque “PME” par les banques. Cela pour dire que la banque classique, du fait des conditions exigées aux PME en termes de production d’états financiers, de mouvements de comptes préalables à l’octroi de crédit, de garantie réelles à constituer, n’est pas l’instrument indiqué pour le financement PME. Il s’agit aujourd’hui de mettre en avant la souveraineté économique à l’instar de ce que font tous les pays du monde.
A cet effet, il nous faut aller dans le sens de la re-création d’un tissu économique homogène et endogène, et cela exige une volonté politique forte. Cela présuppose notamment un souverainisme dans la politique industrielle qui ne saurait s’embarrasser de l’acceptation de conditionnalités de bailleurs rétifs à la protection et aux subventions. Il n’est plus acceptable, sous le prétexte de disposer d’un pouvoir d’achat du FCFA fort, que la production locale d’aiguilles à coudre ne puisse être envisagée parce que non rentable.
La mise en place d’un protectionnisme ciblé permettrait aux sous-secteurs choisis de se développer à l’abri de la concurrence internationale. Ce protectionnisme pourrait porter sur la limitation des quantités de produits importées, ou la hausse des tarifs à l’entrée du cordon douanier. Aussi est-il important que la politique d’endettement actuelle au profit de secteurs économiques ou projets improductifs soit progressivement abandonnée.
En amont de la Petite et Moyenne Industrie (PMI), il serait indiqué de promouvoir des industries « industrialisantes » à l’instar du modèle algérien, à savoir le développement d’industries situées en amont du système productif (sidérurgie, métallurgie, production énergétique). En cela, la piste dégagée par l’architecte Pierre Goudiaby serait digne d’intérêt parce que portant sur la transformation « in situ » de nos matières premières à l’échelle de plusieurs pays africains.
Rappelons qu’il s’agit d’une alliance industrielle à mettre en place entre le Sénégal, la Guinée Conakry et la Sierra Leone pour la transformation de leurs ressources minérales en utilisant le gaz sénégalais comme source d’énergie pour transformer localement le fer sierra-léonais en acier et la bauxite guinéenne en alumine. Ces projets de partenariat industriel intra africain, qui semblent d’emblée irréalisables, doivent être envisagés, étudiés et conçus sous forme d’entreprises publiques avec participation du secteur privé et fonctionnant aux « normes du privé ».
L’expérience de l’OMVS a prouvé que la mise en commun de l’exploitation de nos richesses en décuplait l’efficacité économique. Suite à l’aggravation de la situation en zone euro, la question du rôle de la monnaie en matière de développement économique de nos pays devient urgente. Il en va de l’avenir de nos pays, disposant d’une population majoritairement jeune et sans emplois. Des pays, surtout, en proie à une démographie galopante.
MULTIPLE PHOTOS
LE BAYERN CONGRATULE SADIO MANÉ
Le club bavarois n’a pas tardé à réagir suite au sacre de son nouveau pensionnaire aux Cafs awards 2022, récompensant les acteurs du football continental, cette saison. « Félicitations Sadio Mané », a écrit le Bayern de Munich, sur twitter.
Le club bavarois n’a pas tardé à réagir suite au sacre de son nouveau pensionnaire aux Cafs awards 2022, récompensant les acteurs du football continental, cette saison. « Félicitations Sadio Mané », a écrit le Bayern de Munich, sur twitter. L’ex-Red a été élu Ballon d’or africain, ce jeudi, 21 juillet 2022. L’international sénégalais a rempilé après le titre glané en 2019, atteignant le record de son compatriote El Hadji Ousseynou Diouf.
Pour cette cérémonie qui s’est tenue à Rabat, au Maroc, il y avait le Sénégal et les autres. Le pays de la Téranga (hospitalité), à l’honneur, a réalisé une véritable razzia, remportant cinq trophées : meilleur jeune joueur, plus beau but, meilleure sélection, meilleur entraineur et meilleur joueur de l’année.
LA MENACE D’UNE COHABITATION EST DEVENUE SÉRIEUSE
Le leader du Parti de la construction et de la solidarité/Jengu tabax décortique le mercato politique avec les ralliements au camp du pouvoir. Boubacar Camara parle de mise en place d’une 9ème liste de la part de Macky Sall. ENTRETIEN
Le leader du Parti de la construction et de la solidarité/Jengu tabax décortique le mercato politique avec les ralliements au camp du pouvoir. Boubacar Camara parle de mise en place d’une 9ème liste de la part de Macky Sall. Il appelle à voter l’inter-coalition Yewwi-Wallu pour barrer la route à ce projet du régime.
Expliquez-nous un peu comment Macky Sall est en train de mettre en place cette fameuse « 9ème liste » ?
L’histoire de la « 9ème liste » a commencé à germer quand le pouvoir a frémi devant les risques d’élimination de la liste de Benno bokk yaakaar (Bby). La non-participation de la coalition au pouvoir pour excès de parrains était juridiquement évidente. La tentative maladroite de rattrapage avec l’arrêté du ministre de l’Intérieur n’avait pas réussi à dissiper la panique. Sous la forte pression, le pouvoir a mis en branle une solution alternative avec la bonne vieille méthode de la corruption et du chantage. De plus, avec la mise en place de l’inter-coalition Yewwi askan wi-Wallu Sénégal, la menace d’une cohabitation avec l’opposition est devenue sérieuse. Des contacts sont alors entrepris pour piocher dans les listes concurrentes de potentiels futurs députés pour d’une part, pallier une éventuelle élimination de Bby par le Conseil constitutionnel sous la pression populaire et d’autre part, renforcer le camp du pouvoir avec des députés transhumants. Aujourd’hui, une simple observation de la scène préélectorale rend compte des premiers résultats de la confection de la « 9ème liste ». Suivez mon regard. Vous vous imaginez le désastre éthique et moral si le camp du pouvoir réussit à engranger l’équivalent d’un groupe parlementaire sur les listes concurrentes. Le risque est réel de voir se constituer un « faiseur de roi » qui peut tout faire basculer.
L’opposition a-t-elle des chances de gagner ces élections ?
Les chances de l’opposition sont réelles pour disposer de la majorité à l’Assemblée nationale. C’est le contraire qui serait surprenant. D’abord, le contexte économique et social est extrêmement difficile pour les populations qui ont tourné le dos au pouvoir de Macky Sall qui, malgré l’espoir et les promesses, les a laissées en rade. Ensuite, le combat légitime et constant de l’opposition contre le recul démocratique en matière électorale et de respect des libertés a fini par faire prendre conscience aux électeurs des dangers encourus avec les forcing » du pouvoir en place. Enfin, le besoin se fait sentir de rompre avec l’image récurrente de l’Assemblée nationale qui peine à jouer pleinement son rôle d’orientation, de contrôle et d’évaluation des politiques publiques. Plus particulièrement, la volonté politique affichée d’imposer la cohabitation à travers l’axe Yewwi askan wi- Wallu Sénégal peut être décisive.
Vous savez, je me suis battu pour la confection d’une liste unique de l’opposition. C’était mon plan A. Cette liste unique, je l’ai conçue, proposée et défendue. Je n’ai pas obtenu tout ce que je souhaitais (liste unique nationale et départementale) mais j’ai sauvé ce qui a été accepté quand tout a été bloqué. C’est l’histoire. Cela a été possible grâce à l’esprit d’ouverture et de dépassement des leaders de Yewwi askan wi et de Wallu Sénégal. Je leur rends un hommage mérité. Ils ont compris les enjeux. Je les exhorte à tirer les conséquences de leur décision historique et à aller jusqu’au bout de cette logique, à mieux travailler ensemble et à se préparer à vivre la cohabitation. Autant les électeurs ne doivent pas rater l’occasion de faire de l’opposition le groupe politique majoritaire à l’Assemblée nationale, autant les leaders doivent faire preuve d’anticipation et d’une très grande vigilance. Une opposition majoritaire à l’Assemblée nationale, c’est la garantie contre la violence, les violations des droits et libertés, les tripatouillages de la Constitution notamment pour une troisième candidature, les orientations économiques hasardeuses, les dérapages de la justice, les dossiers de corruption ensevelis, les manipulations électorales et j’en passe. Notre plan B, c’était une liste commune avec Wallu Sénégal. Et, pour répondre directement à votre question, notre plan C, c’était l’investiture de la coalition politique Tabax jotna dont la mise en place, intervenue le 9 avril 2022, était un préalable à tout accord de coalition. Avec le succès, même partiel, du plan A, il est évident que des frustrations sont enregistrées partout. Mais il faut savoir ce qu’on veut, soit on a une stratégie de conquête du pouvoir en tant qu’opposition politique, soit on cherche exclusivement à devenir ou rester député. On a même vu des politiciens rejoindre le pouvoir parce qu’ils ont été mal placés sur une liste ou n’ont pas été investis dans l’opposition. Notre coalition va être relookée à la suite du départ de Jotna.
LA JUNTE MALIENNE CIBLEE
Très tôt ce vendredi des tirs nourris et des explosions ont été entendus dans la ville garnison de Kati, près de Bamako, où le président est domicilié Assimi Goïta est domicilié. C’est une partie du camp de Kati, fief de la junte militaire situé à 15 km
Très tôt ce vendredi des tirs nourris et des explosions ont été entendus dans la ville garnison de Kati, près de Bamako, où le président est domicilié Assimi Goïta est domicilié. C’est une partie du camp de Kati, fief de la junte militaire situé à 15 km de Bamako, qui a d’abord été visé. Selon deux témoins interrogés par RFI, une seconde explosion a été rapidement entendue. Et très rapidement, des tirs nourris ont suivi. « L’objectif est clair, c’est dirigé contre les responsables de la junte », a déclaré un habitant de Kati. D’après des sources fiables, un autre groupe a tenté de rejoindre le domicile du président, mais les militaires déployés au niveau du camp ont pu maîtriser la situation. Des engins lourds ont été déployé du côté des Forces armées maliennes (FAMAS).
Dans la confusion, des témoins ont vu des hélicoptères dans le ciel de la ville. Près de deux heures après les premiers coups de feu, un calme apparent serait revenu.
Le gouvernement malien n’a pas encore communiqué sur l’affaire. Attaque jihadiste ? Règlements de compte au sein de l’armée ? Personne ne s’avance pour le moment.
LA COUTURE AU SÉNÉGAL, PLUS QU’UNE PASSION, UN MÉTIER !
Au Sénégal, l’art de bien s’habiller a toujours été omniprésent dans le quotidien des Sénégalais. En boubou traditionnel ou en tenue de ville, les Sénégalais aiment très bien se vêtir
Un des moyens les plus communs pour les Sénégalais de se procurer des vêtements est d’aller chez un couturier du quartier. A la différence des sociétés européennes, on remarque qu’il y a moins de firmes de « prêt à porter » tels que H&M ou encore Zara au Sénégal. Cependant, on constate des changements au niveau des habitudes de s’habiller à la sénégalaise. Notre stagiaire, Ouleymatou Ndiaye, étudiante en journalisme à l’Université de Lille (France) a fait une immersion chez des maitres-tailleurs, couturières-stylistes de Dakar.
Au Sénégal, l’art de bien s’habiller a toujours été omniprésent dans le quotidien des Sénégalais. En boubou traditionnel ou en tenue de ville, les Sénégalais aiment très bien se vêtir. Et surtout lors des grandes cérémonies culturelles et religieuses (baptêmes, mariages, Tabaski, Korité etc) pour un pays avec 95% de musulmans. Sans oublier les fêtes chrétiennes telles que : Noel (24 décembre) et la Saint-Sylvestre (31 décembre). L’art de bien s’habiller est une vieille tradition chez les Sénégalais. Un art originaire de la région de Saint-Louis qui fut la capitale de l’Afrique occidentale française (Aof) dont les habitants sont considérés comme des amoureux de l’élégance et du bon goût. Ce qui fait qu’avant la floraison des boutiques de prêt-à-porter dans la capitale, les Sénégalais confectionnaient eux-mêmes leurs vêtements traditionnels ou allaient chez un couturier du quartier. Et ils continuent toujours d’y aller pour se faire confectionner de jolis vêtements.
Selon Abdou Diop, maitre-tailleur établi au marché Hlm à Dakar, les Sénégalais ne s’habillent chez les couturiers que lors des fêtes traditionnelles ou religieuses. « Dans les préparatifs du grand Magal de Touba, la Tabaski et la Korité, les couturiers voient leurs commandes augmentées. Ce sont les rares périodes de l’année ou les maitres-tailleurs et couturières se frottent les mains. Parce qu’en temps normal, les Sénégalais et particulièrement les hommes s’habillent à l’européenne, c’est-à-dire en pantalon, chemise, veste etc…» explique notre spécialiste en couture traditionnelle. Et le constat est que la population s’est occidentalisée en matière d’habillement. Une culture occidentale qui ne profite pas aux marchés de la coupe et de la couture sénégalaise.
Chez le maitre-tailleur…
Chez le maitre-tailleur… Pour Mme Ndèye Fatou Ndiaye à l’enseigne « Mamina Couture », les tailleurs et autres couturières sénégalais se modernisent de plus en plus avec l’exportation des modes et autres modèles à l’africaine. « A la veille des fêtes traditionnelles et religieuses, la plupart des commerçants viennent au Sénégal pour faire des commandes de grands-boubous et robes africains classiques avec broderie pour hommes et femmes afin de les revendre au sein des communautés de l’Afrique de l’Ouest et du Nord, de la diaspora d’Europe et des États-Unis. Par exemple, en France, la plupart des boubous traditionnels que portent les Sénégalais, Maliens, Nigérians, Burkinabés et Gambiens sont confectionnés à Dakar », se réjouit cette grande couturière-styliste installée à Keur Massar à Dakar.
Au Sénégal, force est de constater l’existence de nombreux écoles et centres de formation de coupe et de couture, spécialisés en stylisme ou modélisme. Cependant la plupart des bons couturiers ont été formés très jeunes dans le tas ou chez les maitres-tailleurs d’en face. Ingénieux, beaucoup d’entre eux sont devenus des maitres dans l’art de la confection et à l’expertise avérée en matière de coupe et couture. Et aujourd’hui dans ce milieu de l’élégance, on constate la présence d’autant d’hommes que de femmes.
Un « Grand-Boubou » à l’international !
Pour les habits en mode traditionnelle, les tissus sont souvent importés du Mali ou de la Mauritanie pour des tissus plus légers. Différents types existent et allant du moins onéreux au plus cher : le brodé, le tchoup ou encore le getzner. Contrairement à la France, le tissu est à moindre coût au Sénégal. Pour confectionner une tenue traditionnelle en France, on peut dépenser jusqu’à 50 euros alors que cela revient à la moitié du prix au Sénégal. C’est-à-dire 20 ou 25 euros. Et s’il y a une matière première à moindre cout au Sénégal, c’est bel et bien le tissu « Il y a même des tissus dont le mètre coute moins d’un (01) euro, (650 CFA) se félicite une de nos interlocutrices. A Dakar comme à Paris, on constate que la création africaine est en pleine ébullition ! Avec la mondialisation et l’ère des réseaux sociaux, les stylistes et couturiers sénégalais ont plus d’ouverture sur le monde où ils sont invités lors des grands défilés et foires. Ils sont également très présents sur les réseaux sociaux avec des ventes en ligne.
Pour mieux conquérir le marché mondial et obtenir une reconnaissance internationale, le modèle à la sénégalaise allie la qualité-prix. Comme ce fut le cas à « Sister of Africa », une marque de vêtements portée par Beyoncé et qui propose des tenues traditionnelles ou prêt-à-porter « Made in Africa » à des prix raisonnables.
KÉBÉMER PRET POUR LES LEGISLATIVES
Le matériel destiné à l’organisation des opérations de vote pour les élections législatives du 31 juillet dans le département de Kébémer est ’’fin prêt’’
Kébémer, 22 juil (APS) - Le matériel destiné à l’organisation des opérations de vote pour les élections législatives du 31 juillet dans le département de Kébémer est ’’fin prêt’’, a assuré à l’APS, le préfet dudit département, Abou Sow.
Selon lui, ’’tous les matériels lourds de même que les bulletins’’ ont été ’’déjà réceptionnés’’.
S’agissant des bulletins, le préfet a dit qu’’’une marge de sécurité de dix (10) pour cent est observée’’.
Pour ces élections, ’’des efforts énormes ont été faits’’ par l’administration en quête d’une bonne organisation du scrutin à Kébémer, a le préfet Abou Sow lors d’un entretien avec l’APS.
Interrogé sur les opérations de retrait des cartes d’électeur, M. Sow a regretté ’’les lenteurs’’ notées au sein des différentes commissions de distribution.
La cadence des retraits est ’’ timide’’ a-t-il fait remarquer.
’’Nous sommes en train de mettre en place une stratégie pour inciter les gens à aller retirer leurs cartes’’, a révélé le préfet.
Selon lui, ’’des équipes mobiles, avec sonorisation, seront déployées ainsi que des émissions radiophoniques seront organisées’’ pour convaincre les citoyens à aller retirer leurs cartes d’électeur.
Evoquant, par ailleurs, le déroulement de la campagne dans le département, Abou Sow a loué ’’le calme’’ qui prévaut sur le terrain depuis le début.
’’On touche du bois’’, a dit le préfet. ’’Les gens mènent leurs campagnes de façon calme (...)’’, a t-il dit.
Les meetings et autres réunions publiques sont abandonnés au profit de caravanes.
’’Le rôle des forces publiques, c’est de gérer les situations en cas de rencontre de camps opposés et non de sécuriser leurs caravanes’’, a précisé le Préfet.
’’Nous privilégions le dialogue’’ dans le cadre du comité électoral départemental qui réunit les autorités administratives et les acteurs politiques, a t-il dit.
Il a assuré que ’’l’autorité publique est prête’’ afin que tout le processus électoral se déroule jusqu’à terme et dans le calme.
Fort de 233 centres de vote, englobant quelque 340 bureaux, le département de Kébémer compte une population 128.718 électeurs.
LE VIATIQUE D'UN GRAND CINÉASTE
Cinéma histoires de petites gens, de Djibril Diop Mambety: Les petites gens, c’est important car ce sont les seuls gens conséquents, les seuls gens naïfs, c’est pourquoi le courage leur appartient.
« Les petites gens, c’est important car ce sont les seuls gens conséquents, les seuls gens naïfs, c’est pourquoi le courage leur appartient. Ce sont donc ces gens-là qui n’auront jamais de compte en banque, pour qui tous les matins constituent le même point d’interrogation, ce sont des gens francs… C’est une façon de rendre hommage au courage des enfants de la rue… L’amour des enfants me pousse à défier les vieux, les corrompus et ceux qui sont nantis sans pour autant être nantis d’une âme. » Djibril Diop Mambety, août 1994 (entretien avec Vincent Adatte, Pardo News 10, Festival de Locarno, Suisse, où Le Franc fut montré en première mondiale).
En dehors des privilégiés qui disposent du dvd édité autrefois par feu la Médiathèque des trois mondes (M3M) et de ceux qui ont accès à la Médiathèque Afrique (dans les bibliothèques des Instituts français), il n’était pas possible de voir les deux derniers films de Djibril Diop Mambety depuis la sortie groupée de ces films le 6 octobre 1999 sous le titre « Histoires de petites gens ». Leur ressortie le 6 juillet 2022 en copies restaurées est donc un événement, tant ces magnifiques gestes de cinéma de chacun 45 minutes proposent à la fois une esthétique et une vision d’une féconde originalité.
Ce devait être une trilogie, mais la mort a malheureusement emporté Djibril le 23 juillet 1998, alors qu’il était en train d’achever le montage de La Petite vendeuse de soleil. Le troisième film devait lui aussi avoir des enfants comme principaux protagonistes. Il se serait appelé L’Apprenti voleur ou bien, selon d’autres sources, La Casseuse de pierres, mais son titre comme son contenu dépendaient de ce que deviendrait La Petite vendeuse de soleil. Dans une interview incluse dans le dvd de la M3M, Djibril annonce qu’il s’agirait d’une petite fille voulant subtiliser de l’argent de sa mère pour acheter des bonbons à déguster avec sa copine, mais le porte-monnaie de sa mère n’a pas de monnaie : il n’y a qu’un billet. Elle le prend. « Son malheur est qu’elle ne peut pas rendre l’argent », conclut Djibril qui ajoute : « Les oiseaux n’ont pas besoin d’argent ». Rester des enfants face à l’argent : c’est en effet la trame des Histoires de petites gens. Dans Le Franc, au titre si ouvert, Marigo gagne à la loterie nationale, mais son approche poétique du monde fait qu’il est avant tout prêt à jouer pour les enfants et à partager avec eux son imaginaire et ses illusions.
Dans La Petite vendeuse de soleil, malgré son handicap et le fait d’être une fille, Sili veut aider sa grand-mère en vendant des journaux. Elle partage l’argent gagné avec les pauvres et danse avec ses amies. Sur le modèle des enfants, les gens francs sont des artistes généreux. C’est ce viatique que nous lègue Djibril Diop Mambety.
Le Franc
Marigo, qui ressemble beaucoup à Mambety, n’a plus son congoma, un piano à doigts monté sur une caisse de résonance : sa logeuse lui a confisqué car il ne paye pas son loyer. Un billet de loterie gagnant serait le moyen de le récupérer, mais il l’a collé sur sa porte. Sa dérive à travers Dakar, trimbalant sa porte pour le décoller, le conduit vers la mer. Le mirage du billet gagnant, dans un monde qui ne respecte ni l’homme ni son environnement, ne peut qu’être un vertige vers autre chose et se perdre dans les eaux. Face au pouvoir de l’argent, « l’homme franc » n’a pour dernier recours que la dérision, le rêve et la sérénité. Mambety ravive notre place de spectateur et c’est en cela que ce film dépasse sa propre histoire.
Labyrinthe de visages, de regards, d’objets, d’images paradoxales et métaphoriques, Le Franc est un désordre que nous cherchons à décoder : ce travail est la condition d’une vision libre, la construction d’un nouvel ordre dont l’équilibre n’est pas la simple représentation de la réalité mais une nouvelle compréhension. Chacun relie à sa façon les éléments du puzzle défilant sur l’écran. Parce que ce langage cinématographique est un artifice et jamais une fin en soi, parce qu’il puise ses « histoires de petites gens » dans l’expérience quotidienne des « gens francs », ce corps à corps avec l’image s’apparente à une autodérision tragicomique dont la poésie touche au coeur et force à l’émotion. Le montage morcelle cycliquement cette énonciation bourrée de paradoxes et souligne une image très libre proche du jaillissement lyrique. Ce foisonnement métaphorique où l’écran finit par ne plus représenter que l’imaginaire de Marigo construit un regard qui cherche ni plus ni moins à réinventer le cinéma : « C’est un choix à faire : soit être très populaire et parler simplement aux gens, soit chercher et trouver un langage africain, excluant le bavardage et s’intéressant davantage à l’image et au son », disait Djibril.
La base de ce langage de rupture est la parodie, art de superposition ou de contrepoint. Le Franc groupe des éléments hétérogènes majeurs dans l’expérience urbaine du rapport des petites gens à l’argent : la dévaluation et la loterie nationale, les ruines du marché Kermel (ravagé par un incendie en 1994), les tas d’ordures et les gratte-ciel des grandes banques. Leur association simule un vide que les visages en gros plan des passagers du bus dakarois vient remplir et un désordre que les reflets du soleil sur les vagues ramène à l’équilibre. Une scène du film en annonce la teneur : le nain Langouste propose à Marigo d’aller déjeuner et choisit pour y manger un stand de la rue. Il applique le slogan : « Il y a dévaluation : consommez africain ! »
L’image est penchée et la diagonale dessinée par la chaussée évoque la précarité de leur situation, cette précarité qui touche l’Afrique toute entière. Acculé, sans instrument, Marigo s’en remet à la loterie : les petites gens n’ont plus que les jeux de hasard comme espoir de survie. Le retour à l’équilibre ne se fera pas par la simple représentation de la réalité. Chez Djibril Diop Mambety, la musique relie les plans en un cycle vital. Le saxo jazzy d’Issa Cissoko illustre le « rêve d’une Afrique libre et grande » de Yaadikone et mêle ses accents à l’appel à la prière du muezzin ; Aminata Fall (« la Mahalia Jackson du Sénégal », chanteuse de blues qui avait joué Tante Oumi dans Touki Bouki, la mégère vociférante qui harcelait Mory et Anta) entonne In the morning, d’abord en s’esclaffant devant la folie montante de Marigo, puis en lui proposant de reprendre le congoma lorsqu’elle finit par avoir pitié de lui, et sa voix a cappella se mêle au vent et aux buffles pour l’accompagner au milieu des ordures plastiques de toutes les couleurs ; le jeu du congoma de Marigo (interprété par Madieye Masamba Dieye, un musicien de talent) relie les plans en une sorte de symphonie baroque, voix d’une solitude intérieure, inquiète et dérisoire.
Le film est dédié au générique « à tous les musiciens du monde », et spécialement à Robert Fonseca, musicien du Cap Vert dont on entend les mélodies blues morna, et à Billy Congoma, musicien mort peu de temps après l’achèvement de Hyènes, dans lequel il avait joué. Il avait rendu populaire le goumbe qu’on entend dans tout le film (un rythme fortement improvisé qui a ses racines au Cap Vert et en Guinée-Bissau mais est aussi construit sur du mbalax).[1] Cette extrême sensibilité pour le son, Djibril Diop Mambety la tire de son enfance : « J’ai grandi à Colobane où il y avait un cinéma en plein air appelé l’ABC. Nous avions huit ans et n’avions pas le droit d’y aller parce que c’était dangereux. Mais nous nous échappions et y allions quand même. Comme nous n’avions pas d’argent pour acheter un billet, nous écoutions les films de l’extérieur. C’était surtout des westerns et des films hindous. Peut-être est-ce le fait d’avoir entendu tant de films avant de ne les avoir vus qui me fait attacher tant d’importance au son dans mes films. » La dérive de Marigo le conduit à la mer, ligne plane par excellence, source de vie, mouvement des origines où viendra se mêler l’affiche représentant le héros de son enfance, Yaadikoone Ndiaye, « défenseur des faibles et des enfants », « notre Robin des bois », dit Marigo à l’employée de la Loterie nationale.
La boucle de la vie se referme. Le rythme cyclique et répétitif, le burlesque du personnage, des images hyperboliques et une musique unifiant les plans placent le spectateur dans une catharsis, cette distanciation artistique qui permet de transformer les émotions en autonomie de pensée. En dépit des apparences, Le Franc débouche davantage sur une unité que sur un vertige. Marigo pleure et rit, emporté par son délire, comme assommé par les vagues. Il comprend de tout son corps dégingandé les forces auxquelles il est soumis. Il communie avec la force qui anime l’univers. Il ne domine pas la nature mais participe aux grandes forces naturelles. Le billet de loterie paraît finalement bien dérisoire quand l’ironie des eaux vient le coller au front de Marigo car le propos n’est plus le rêve de richesse qu’il avait pu représenter durant le film mais la symbolique de la vie et de l’ordre du monde.
La Petite vendeuse de soleil
La femme que la police arrête avant même le générique de La petite vendeuse de soleil s’écrie derrière les grilles : « Je suis une princesse et on m’appelle une voleuse ! » C’est l’aube. L’image se fixe après le titre pour jouer sur les diagonales d’un immeuble, d’une rue, d’un bidonville tandis qu’un homme chante a capella. Avant même que Sili, la jeune handicapée, n’arrive dans le champ avec ses béquilles, le ton est donné : ce film sera la prise de parole des exclus et cette parole est oblique, contraire aux schémas dominants. Les petites gens, ce sont ce casseur de pierres dont la caméra fixe le visage et les mains alors qu’un bulldozer passe devant une maison en construction et que des sportifs s’entraînent en courant derrière lui, ou bien Babou, ce jeune homme qui prend Sili sur le dos pour l’installer sur sa charrette et l’emmener au centre-ville de Dakar : une contre-plongée sur les deux jeunes et la tête du cheval marque une boucle de 35 ans de cinéma africain, une révérence au Borom Sarret d’Ousmane Sembène.
Les petites gens, ce sont aussi la grand-mère aveugle de Sili, qui chante a capella des litanies pour mendier, et que le montage vient ressaisir en cycle. Mambéty n’a pas son pareil pour saisir les visages, ni pour utiliser le décor pour inscrire une idée : les méandres de la route, les frigidaires alignés, les horizontales du trafic routier… Sili mendie. Des garçons vendeurs de journaux houspillent un culde-jatte en chaise roulante. Mais Sili, qui tend régulièrement sa béquille pour dire « en avant », ne se laisse pas abattre : « ce que les garçons peuvent faire, une fille peut le faire ! » En un plan sidérant de détermination, elle dispose la pile de Soleil, quotidien de Dakar – sur sa tête et pour signer le registre, dessine un soleil…
Cette crête extrême entre le mièvreux et le magnifique va nous accompagner tout le film : sans cesse, Mambéty risque ce qui, en d’autres mains, pourrait devenir compassé ou prétentieux. Et, par le jeu des métaphores visuelles et musicales, par cette autre musique qu’est le montage et le déplacement dans l’image, par les ambivalences du récit marquant son écriture de rupture et de parodie, il évite l’emphase pour jouer l’hyperbole : il ose l’impossible, la chance qu’offre le destin quand on sait le saisir. Un homme achète bon prix tous les journaux de Sili qui va pouvoir faire la fête avec ses amis ! Ce conte de fée n’est jamais factice car Mambéty sait se saisir du vide pour le remplir d’une réalité oscillant entre rire et tragique : ce sont les détails de la vie qui font la différence, ce chaton mort au bord de la route, ce large panoramique sur la gare routière, les pieds de Sili au son des bruits des rues de Dakar, ce slogan d’Air Afrique proposant sur un pont la liaison Afrique-Europe… En fusionnant ainsi des éléments hétérogènes, il simule le désordre pour faire apparaître ce que Sili impose : l’énergie de sa ténacité. Elle rabroue le policier étonné de lui voir tant d’argent et qui l’emmène au poste.
La princesse du début chante derrière sa grille, devant des panneaux d’interdiction de stationner… « Il y a un espoir pour ce pays ! », dit le bienfaiteur de Sili (feu Cheikh Ngaido Ba) : leur résolution rendra aux femmes leur liberté. Car de ce foisonnement d’images, de ce débordement de sens, ne peut que sourdre une liberté qu’on ne peut embrigader. Parlons grand-mère : Mambéty n’a jamais cessé de le dire, comme dans ce court-métrage sur le tournage de Yaaba : « Grand-mère vengera l’enfant que l’on met à genoux ».
Dernier hommage, ultime métaphore, Sili achète un parasol pour la protéger du soleil – respect de son chant comme de son âge, respect de sa Parole que le monde doit entendre, car elle « vengera » l’Afrique… Les enfants peuvent danser, Sili a déjà inversé le rapport : elle a cessé de mendier et commence à donner ; elle choisit la chance en gardant 13 Soleils plutôt que les 25 qu’on lui propose… « Pourquoi Sud se vend-il mieux que le Soleil ? » Journal du peuple ou journal du pouvoir ? Sili a sa conception de la politique : « Je continuerai de vendre le Soleil, comme ça le gouvernement sera plus proche du peuple ! »
Mais que pourra la politique face au psychisme meurtri ? La princesse est devenue folle. Comme dans Le Franc, le film penche vers la mer, source de vie, mouvement des origines. Le jazz de Wasis Diop accompagne les bateaux du port, mais lorsqu’il s’agit de regarder le monde à la jumelle, leurs sirènes et le jazz égrainent les menaces. Car les garçons ont rattrapé Sili et jettent une de ses béquilles à la mer. Elle contera à son sauveur l’histoire de Leuk le lièvre. Clarté de la fable. Et les journaux lui feront écho avec leur page de titre : « L’Afrique est sortie de la zone franc ».
Dernière parodie, dernière boutade. Mambéty semble lancer, comme Sony Labou Tansi : « Je ne suis pas à développer mais à prendre ou à laisser ». C’est dans la mer que l’homme franc pourra puiser la dérision, le rêve et la sérénité. Les enfants s’écartent lorsque son ami Bouba prend Sili sans béquilles sur les épaules. Le voilà, le legs de Mambéty, une idée simple : la victoire est détermination. Il peut conclure son viatique : « Ainsi ce conte se jette à la mer », que Sili complète : « Le premier qui le respire ira au paradis »