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Par M. SYLLA

LA TOUTE DERNIERE LEÇON DE KHADIDIATOU GOUDIABY

En regardant ton corps enseveli, j’ai retenu que ton être ne se réduit pas à cela seulement. Tu n’es pas qu’un corps. Je te voyais en intelligence dans la classe et c’est ce qui demeure vrai

M. Sylla  |   Publication 15/09/2020

« Sans avoir honte de le clamer, disons au monde que nous te pleurons du dedans et du dehors »

Lamine Ndiaye, Départ, p. 80. Je manque de mot pour dire mon mal. Oui, j’ai mal en apprenant la triste nouvelle qui ne devrait jamais tomber et qui paralysa pendant toute la journée du samedi 09 novembre le lycée d’Oulampane.

Tu venais à peine d’arriver dans ce lycée où je suis affecté pour mon premier poste comme professeur. C’est à mon réveil au matin de ce samedi que je fus informé que le lycée était en deuil. J’aurais aimé que la chose se limite là. Mais, de la mort du ‘’on’’, la chose se précise davantage : c’est une élève de la TL2A.

Dans une posture si inconfortable qui fut la mienne, je dus développer un paravent psychologique appelé par Mélanie Klein : déni de réalité. Je connais toutes les filles de ma classe ; elles ne sont pas nombreuses. Je ne voulais penser à aucune d’elles. Me voilà devant le fait par une approche des plus apaisées de la part du Proviseur Touré. Khadidiatou Goudiaby s’en est allée !

Avec ce décès, je me vois dans une situation qu’aucun mot ne saurait traduire fidèlement. C’est là l’épreuve de la mort à la deuxième personne comme l’a indiqué Jankélévitch. Avec une parole toujours calme et juste, un regard pur et une posture respectueuse, tu ne pouvais pas rester invisible dans ton coin. C’est ta personnalité qui me marqua d’abord. Et quand tu parlas pour la première fois en me posant une question pour laquelle je te disais que nous chercherions ensemble la réponse, j’ai décelé en toi un bel esprit. En pensant à tout ce qui aurait pu constituer les chapitres de notre vie de classe durant cette année qui ne fait que commencer, je ne peux pas dire que la vie ne vaut rien, mais j’ose soutenir qu’elle ne vaut pas grand-chose. Ma chère Khadidiatou Goudiaby, je me suis isolé dans ma chambre pour te pleurer. J’ai fait de mon mieux pour résister à l’appel du cœur qui tire les larmes des yeux, mais c’est cela aussi la vérité. Ne sois point surprise, de là où tu es maintenant, de me voir à terre alors qu’il y a quelques jours je vous parlais de la profonde leçon des Stoïciens de la Grèce antique selon laquelle : il nous faut accepter les choses telles qu’elles arrivent. Je vous ai même parlé de la perte d’êtres chers.

Pour cette école philosophique, la naissance est un don gratuit ; ce qui amène à considérer la mort comme le retrait avec la même gratuité ce don contingent qu’est la vie. Le vendredi, je t’avais remis Esquisses de certitudes de Mamadou Ndione en te demandant de le lire pour après venir, dans quelques jours, nous en faire une lecture expliquée. Le livre m’a plu et je voulais faire de toi la trans-metteuse de son contenu à tes condisciples. C’est ici le lieu de mesurer l’extrême fragilité de cette vie. Justement, ce même vendredi, je vous avais donné rendez-vous pour un cours le samedi soir de 16h à 18h. Tu fus celle qui acquiesça de la tête pour stabiliser l’heure du démarrage sur 16h 00mn pour le lendemain. En te fixant du regard, j’étais loin de m’imaginer que c’était la dernière fois que nos regards se croisaient en cette vie si précaire et instable.

Ma chère Khadidiatou Goudiaby, ton départ m’a livré un précieux enseignement en écho à ce propos de Montaigne : « Il est incertain où la mort nous attende : attendons la partout […] le savoir mourir nous affranchit de toute sujétion et contrainte : il n’y a rien de mal en la vie pour celui qui a bien compris que la privation de la vie n’est pas un mal ». C’est de la haute sagesse. Mais comment s’y attendre surtout à l’endroit de ceux qui comptent pour nous ? On n’est jamais familier avec la mort. Son avènement bouleverse le tissu social et impose aux vivants un nouveau type de rapport avec le vécu. Chaque perte garde le sceau de sa particularité et devient une expérience unique.

L’invitation de Montaigne consistant à apprivoiser la mort devient de ce fait un vœu pieux que le vécu concret peine à intégrer. On ne s’habitue jamais à quelque chose qui n’advient que pour déconcerter. Tout acte courageux face à ce drame de l’existence doit revenir à hurler qu’on ne saurait « pardonner la mort à la mort », pour reprendre Kamel Daoud. C’est terrible d’être lucide face à cet échec de la vie qui rend prétentieuse, mais non moins inutile, toute entreprise qu’on voudrait grandiose par-delà le temps présent. La mort nous assiège de partout et tout le temps.

Ma chère Khadidiatou Goudiaby, tu as été d’un naturel attachant qui accroche les cœurs. Sans être sûr d’être dans le vrai, je voyais en toi l’un des apprenants qui étaient appelés à me marquer à vie comme je le fus pour mon professeur de Philosophie de la classe de terminale, il y a 10 ans. En regardant ton corps enseveli, j’ai retenu que ton être ne se réduit pas à cela seulement. Tu n’es pas qu’un corps. Je te voyais en intelligence dans la classe et c’est ce qui demeure vrai.

u es toujours avec nous dans cette salle 5 du lycée en parlant de Philosophie. Je vous parlais de ce mot qu’Homère, le premier écrivain, a mis dans la bouche d’Hélène qui causa la perte de Troie : « Le fils de Priam pense me posséder. Vaine illusion ». Aujourd’hui, nous aimerions t’entendre par delà le tombeau nous dire : La mort pense me posséder. Vaine illusion. Elle n’étreint que mon ombre. Le professeur Ousseynou Kane me conforte quand je lis sous sa plume : « le corps n’est que vanité, poussière qui retournera à la poussière ». Car quelque chose qui lui est supérieur n’épouse pas le néant. Sur la représentation de l’après-mort, je suis plus du côté de Platon que de celui d’Epicure. Je crois à la survie de ce principe immatériel qu’héberge le corps pour le temps d’une vie. Ton départ si brusque indique qu’il y a des êtres dont la vie est d’instruire les autres sur la brièveté de toute existence terrestre.

 Ma chère Khadidiatou Goudiaby, j’ai aussi pensé à tes camarades de classe qui verront toujours ta place inoccupée et l’évitement de prononcer ton nom comme le signe de te garder dans le silence de nos cœurs. Tu es une absente qui brille d’ores et déjà de par cette présence autre qui n’est que le privilège de quelques-uns sur terre. Tu vas beaucoup nous manquer. Nous t’avons confiée à tes mânes dans ce coin de terre du village de tes pères pour ton sommeil éternel. J’ai aussi vu la manifestation authentique de l’humanisme chez tes pères.

Face à la montée de la logique capitaliste qui promeut l’oubli de l’humain, cet élan de compassion dans ce village reculé de Bougoutoub est le témoignage éloquent du sens de l’humain qui habite encore quelques cœurs. L’administration du lycée, tes camarades et le corps professoral ont tenu à être là jusqu’à l’ultime poignée de sable qui fend les cœurs les plus stoïques. En voyant l’étroitesse de la paroi de cette tombe prête à accueillir ton corps, pour tenir sur mes pieds, j’ai pensé à ces vers de Victor Hugo : « le tombeau qui sur les morts se ferme / Ouvre le firmament / Et que ce qu’ici-bas nous prenons pour le terme / Est le commencement ». J’ai vu le Proviseur Touré arborer sa toge de maître ès-qualité pour inviter un groupe de tes camarades venus t’accompagner à se pencher sur le « que sommes-nous ? » qui pourrait aider à répondre en un jour moins funeste à la question « qui sommes nous ? ».

En tant qu’un amoureux des écrits de Pascal, le Proviseur nous voit comme des roseaux qui ont la chance de disposer ce qu’Anaxagore a déjà désigné sous le poétique nom de Lumière Naturelle. Et cela nous oblige à continuer la tâche quelque peu ingrate, mais toujours exaltante qu’est l’exercice de la pensée. Ta disparition a causé l’émoi dans ce lieu consacré à la pensée. Ce lundi, j’ai eu toutes les difficultés du monde à dérouler correctement mon enseignement. Mes prises de paroles ont été entrecoupées de longs silences pour retenir les larmes.

La triste plainte de tes camarades se lisait sur tous les visages. Et je n’étais pas plus outillé pour les aider à tenir le coup. Je fais mien ce lumineux propos de mon aimable professeur, O. Kane : « En vérité nous sommes une communauté d’esprits et chaque fois que l’un d’entre nous meurt c’est à l’évidence une partie de l’esprit qui s’en va. Mais à supposer que l’âme ne soit pas immortelle, l’esprit lui-même ne meurt jamais ». Ma très chère Khadidiatou, tu vivras au-delà du voile du grand sommeil. Sois dans la lumière qui nous transcende et qui éclaire nos vies.

Ton professeur de Philosophie,

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