MACKY SALL FACE A LA COVID-19
Nous ne pourrons faire face à la pandémie que collectivement, mais le comportement de chacun est primordial, car chacun est tributaire des autres. Cela s’appelle une société

“La richesse n’est bien évidemment pas le bien auquel nous aspirons car elle ne nous est utile que pour obtenir autre chose”. Aristote, L’éthique à Nicomaque. Livre I, chapitre 5
L’ECONOMIE SOIGNE LA SANTE
Dans son préambule de 1946 au moment de sa constitution, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) définit la santé comme « un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». A côté de l’enthousiasme suscité à cette époque par cette définition innovante, certains spécialistes l’ont trouvée vague, trop générale, non mesurable, et donc irréaliste. Revenant au modèle biomédical jugé plus pratique, on fit passer la perception de la maladie d’un état à un processus. Ce changement a donné lieu à une nouvelle conception de la santé, non point comme un état, mais comme une entité dynamique de résilience.
En d’autres termes, la santé est devenue une ressource de la vie c’est à dire un moyen d’améliorer une situation fâcheuse. Dès lors, la place prépondérante de la santé dans tout processus de développement n’est plus à démontrer. Les enjeux sanitaires dans certaines conceptions sont considérés comme des questions de sécurité nationale. La riposte conjointe donnée par les ministères de la santé et de l’intérieur par rapport à l’épidémie d’Ébola qui a menacé nos frontières il y’a quelques années, illustre parfaitement cette conception. Mais il faut le dire, Les performances en matière de santé et les performances économiques sont totalement interdépendantes. De fait, le revenu national influence directement le développement des systèmes de santé, notamment via le système d’assurance (CMU par exemple) et les dépenses publiques. Une économie moribonde limite les moyens du secteur de la santé. Un chômage important, des recettes fiscales moindres, ont pour conséquence immédiate un budget santé insuffisant et un déficit des organismes de la sécurité sociale d’où un rationnement en médicaments et en équipements. Par contre une forte croissance économique crée l’emploi et augmente le budget de la santé ainsi que les ressources de la sécurité sociale stimulant ainsi un bon état de santé. L’émergence de maladies mortelles transmissibles telles que la Covid 19 ralentit le développement d’un secteur comme le tourisme, essentiel pour notre pays. Le gouvernement est donc confronté à des choix de politiques difficiles, qui ne peuvent être effectués à la légère.
La solution qui consiste par exemple à financer la santé directement par les patients est inéquitable et peut exposer des populations entières à des dépenses extrêmement lourdes qui entraveraient le développement et ne feraient que perpétuer l’engrenage de la maladie et de la pauvreté. Mais en même temps, si nous convenons que l’amélioration de la performance des systèmes de santé dépend des financements et des investissements, elle doit se garder de peser trop lourdement sur les dépenses et la compétitivité nationales. Le président Macky Sall devait donc trouver les moyens d’assurer cet équilibre délicat entre les contraintes sanitaires et les impératifs économiques, tout en relevant d’autres défis. En tant que décideur ayant des responsabilités publiques, il ne pouvait pas oublier que les choix qu’il opérait dans une sphère affecteraient les situations, les acteurs et les politiques dans d’autres sphères.
En effet, à côté de ses prérogatives régaliennes de défense et contrôle du territoire, de police et de maintien de l‘ordre social qui ne sont pas dépourvues d’incidences économiques, l’État doit, entre autres missions, assurer l’éducation des jeunes, garantir la défense du pays, rendre la justice, aider les entreprises en difficulté, promouvoir l’écologie ect…, jouant ainsi un double rôle de « conservateur-propulsif ». Autrement dit, face aux mutations rapides et surprenantes comme dans le cas de la Covid 19, les agents économiques attendent que l’Etat stratège soit réducteur d’incertitudes et donc qu’il soit chargé de la préparation de l’avenir. Tout en souhaitant une amélioration des systèmes de santé, il ne lui fallait pas sous-estimer l’impact de la santé sur l’économie. L’enjeu étant double, le Président Sall devait réussir à coordonner les politiques de santé et les politiques économiques pour améliorer les résultats sur le plan de la santé. Ce qu’il fit avec éclat, intelligence et efficacité.
Le PRES pour la résilience C’est ainsi qu’avant même le premier cas de covid-19 déclaré au Sénégal, il a mis en place un Programme de Résilience Economique et Sociale (PRES) afin de renforcer notre système de santé et soutenir les ménages, la diaspora, les entreprises et leurs salariés, qui sera complété dans un second temps par un Plan de Relance de l’ Economie Nationale post Covid-19 (PREN), une continuité du Programme de résilience économique et social (PRES) et qui vise une relance immédiate de l’économie nationale Le programme de Résilience Economique et Sociale (PRES) est décliné en quatre axes :
Premièrement, le soutien au secteur de la santé à hauteur de 64,4 milliards FCFA, pour couvrir toutes les dépenses liées à la riposte contre la COVID-19.
Deuxièmement, le renforcement de la résilience sociale des populations.
Troisièmement, la sauvegarde de la stabilité macroéconomique et financière par un soutien au secteur privé pour un maintien des emplois à travers un programme d’injection de liquidités assorti de mesures fiscales et douanières.
Et quatrièmement, assurer l’approvisionnement régulier du pays en hydrocarbures, produits médicaux, pharmaceutiques, et denrées de première nécessité. L’ensemble des dépenses liées à la mise en œuvre du Programme de résilience économique et sociale devant être couvertes par le Fonds de Riposte contre les effets de la COVID-19, FORCE-COVID19, doté de mille milliards de FCFA, financé par l’Etat et des donations volontaires. Incontestablement et malgré les vives critiques d’une partie de l’opposition, l’ensemble de ces quatre objectifs a été atteint.
LE PREN POUR LA RELANCE
Quant au PREN, le président Sall l’a articulé autour de deux piliers essentiels : le soutien à l’investissement et le soutien à la consommation, en ciblant des secteurs comme le tourisme, la Pêche, l’industrie pharmaceutique, le numérique, l’agro- industrie, l’agriculture, les Btp. Ce programme de relance de l’économie nationale post COVID-19, soutient aussi les initiatives créatives développées dans le cadre de la lutte contre la pandémie et la promotion de l’industrie pharmaceutique nationale. Parallèlement les services du Ministère du Plan et de la Coopération ont travaillé sur l’ajustement du deuxième Plan d’actions prioritaire (PAP 2) du PSE en tenant compte des nouvelles priorités et pour assurer dans le court et moyen terme une relance durable de l’économie nationale. «Les priorités se feront autour de la souveraineté alimentaire, pharmaceutique, sanitaire, mais autour, également, de l’industrialisation de l’équité sociale et territoriale, du renforcement du secteur de l’éducation et de la santé avec les réformes qui doivent les accompagner, mais également les secteurs émergents comme l’économie numérique », dixit le Président de la République.
Poursuivre et adapter les réformes et projets du PSE, renforcer nos politiques d’équité territoriale et consolider le processus d’industrialisation entamé dans les Parcs industriels et les Zones économiques spéciales dont les Agropoles, tels sont les objectifs visés par le PREN, telle est sa vocation. Mais s’il y’a une leçon à tirer de la pandémie COVID-19, c’est qu’elle a révélé des points de vulnérabilités potentielles, qui exposeraient le pays à des pénuries en cas de rupture de fret ou de rétention de certains produits par les pays exportateurs pour satisfaire leurs propres besoins. Il en est ainsi de l’agriculture et de l’industrie pharmaceutique, entre autres. La grande leçon à tirer de la crise du coronavirus est donc bien celle de compter d’abord et avant tout sur soi-même.
Pour parer à de telles éventualités et en tenant compte du fait que la Covid-19 est encore là pour un certain temps, le Chef de l’Etat a décidé de faire vivre l’économie toutes précautions sanitaires prises. C’est ainsi qu’il a fait adopter lors du Conseil présidentiel tenu le 29 Septembre 2020 le Programme d’Actions Prioritaires ajusté et accéléré (PAP2a), un processus d’ajustement et d’accélération du PAP du PSE 2. Il s’agit pour le Président de la République de donner une sur-priorité à la souveraineté alimentaire (agriculture, élevage et pêche), pharmaceutique et sanitaire, et de booster en même temps l’industrialisation de l’économie, le numérique, le tourisme, le logement, en favorisant davantage l’équité territoriale et l’inclusion sociale. Parallèlement, les projets stratégiques des infrastructures et de l’énergie seront poursuivis.
Pour son financement d’ici 2023, le PAP2arequiert un montant de 14 712 milliards de francs cfa dont le tiers (4770 milliards) est attendu du secteur privé local et étranger. On peut raisonnablement et en toute objectivité s’attendre à un succès de ces plans de résilience et de relance de l’économie nationale surtout si le privé national s’empare des décisions et des opportunités contenues dans le PRES et le PREN de manière coordonnée et complémentaire au sein de de leurs entreprises, pour aboutir à une meilleure appropriation de celles-ci par les acteurs concernés au niveau national. D’autant plus qu’après analyse des conséquences économiques de cette crise mondiale, il faut dire qu’avec la baisse prévisible des investissements directs étrangers (IDE) en Afrique, il y’a des opportunités à saisir par le privé national pour s’affranchir de la dépendance et mettre en chantier la vision du Président de la République « liggéeyal Ellek », notamment dans son volet agricole et industriel. Mais à l’évidence, les efforts internes ne suffiront pas pour amortir le choc de la crise et relancer la croissance économique. « Il nous faut plus de capacités financières » comme l’a rappelé le Président Sall lors de son discours devant le patronat français dont il était l’invité le 27 Juillet à Paris à la Rencontre des Entrepreneurs de France. Et c’est pour cette raison qu’il a lancé un plaidoyer pour un allègement conséquent de la dette publique africaine et un réarrangement de la dette privée selon des modalités à convenir afin de permettre à nos pays de disposer d’espaces budgétaires qui seront entièrement consacrés à la riposte sanitaire, à la résilience économique et sociale, et à la sauvegarde de l’emploi. L’adoption par le G20 d’un moratoire sur le service de la dette jusqu’à la fin de l’année 2020 est un succès personnel du Chef de l’Etat
Il arrive souvent que malgré la survenance de crises qui peuvent être multiformes, rien ne se produise du côté de la sphère décisionnelle. Les situations de non-décision, d’indécision et même de déni sont légion dans le monde face à la Covid-19. De fait la complexité du processus décisionnel tient à ses diverses temporalités et son intelligence suppose d’examiner comment s’effectue la mise en œuvre des choix opérés et comment se présentent les relations entre le décideur en l’occurrence le président Sall et l’opinion. En décideur rationnel, le président Sall pour définir la solution optimale et arbitrer entre les avantages et inconvénients associés au choix d’une option, a procédé à l’inventaire des solutions disponibles avant de nous proposer le PRES pour la résilience et le PREN pour la relance de l’économie. Cette attitude réaliste, postule un décideur soucieux de résoudre un problème en faisant face à de multiples contraintes. Aujourd’hui, rien n’est plus urgent que de maîtriser les deux tsunamis, sanitaire et économique qui s’abattent sur notre pays. Nous ne pourrons faire face à la pandémie que collectivement, mais le comportement de chacun est primordial, car chacun est tributaire des autres. Cela s’appelle une société. C’est cette primauté de la solidarité sociétale que le fondateur du positivisme A. Compte a eu le grand mérite de souligner, en proposant l’idée d’« unité sociocratique ».