SILENCE, ON PIQUE !
Pendant que l’opposition perd son immunité, le gouvernement, de son côté, gagne également en immunité. Seulement, si le mot reste le même, il ne désigne pas la même chose, selon que l’on appartienne à l’un ou à l’autre camp

Au départ, une histoire de massage. À l’arrivée, une histoire d’agression sexuelle. Entre les deux, le complot politique comme ligne de défense. En ces temps de Covid-19, ce qui aurait dû rester dans les pages et autre rubriques faits-divers de la presse, a explosé dans l’espace médiatique sénégalais, voire au-delà. Impossible d’échapper à cette histoire dont l’épilogue ne sera pas pour demain, sans faire valoir des talents inexistants de voyante.
Inutile de revenir sur les faits en question dont les derniers développements font aussi matière à commentaires. La première vague de défense a été portée par des femmes du pouvoir ou faisant partie de la coalition au pouvoir : les honorables députées Yéya Diallo, Sira Ndiaye, Adji Mbergane Kanouté, l’Administratrice générale du Fongip, Thérèse Faye Diouf, pour ne citer que celles-ci. Des femmes qui montent au créneau pour débattre face aux « Patriotes» sur un fait dont la victime présumée est aussi une jeune femme.
La stratégie est déroulée et la machine est enclenchée. Pour clore cette première série, une deuxième vague de défense, uniquement des hommes, cette fois, prend le relais: les ministres Abdou Latif Coulibaly et Seydou Gueye, le Vice-Président de l’Assemblée nationale, l’honorable Abdou Mbow, pour ne citer que ceux-là. La guerre communicationnelle auprès de l’opinion n’est pas près de s’arrêter. Qui pour porter l’estocade ?
La question est posée. Pendant que l’opposition perd son immunité, le gouvernement, de son côté, gagne également en immunité. Seulement, si le mot reste le même, il ne désigne pas la même chose, selon que l’on appartienne à l’un ou à l’autre camp. Selon la définition, l’immunité est « le droit de bénéficier d’une dérogation à la loi commune» et d’un point de vue médical, il s’agit d’«un ensemble de mécanismes de défense d’un organisme contre les éléments étrangers à l’organisme, en particulier les agents infectieux (virus, bactéries, parasites) ».
Pour tous, cependant, cela reste une question de privilège. Et après s’être vu retirer son immunité, justement, l’un bande les muscles, pendant que l’autre se fait piquer le muscle. Les bras dénudés des premiers vaccinés ont fait le tour de toutes les plateformes médiatiques, en photos ou en vidéos : silence, on pique ! La République se fait vacciner. Des images de sensibilisation avec un seul slogan : « vaccinons-nous contre la Covid-19 ».
Le Président a semblé avoir pris au mot cette boutade sortie des micros-trottoirs qui exigeait de lui, qu’il se fasse vacciner d’abord. Seulement, les images ne montrent pas si la Première dame en a fait de même ; la question est posée. Aussi. En attendant, les ministres, les députés et autres autorités de la République se sont prêtés bien volontiers à cet exercice « républicain». D’ailleurs, le Président menace. En cas de refus, le peuple sera privé de vaccin. Certains ont vite réagi et brandissent leur solidarité vis-à-vis de ce peuple qui n’a pas reçu sa dose car après les autorités gouvernementales et administratives, à qui le tour ?
D’ores et déjà, le corps enseignant réclame ses doses. Au risque de fâcher ce médecin qui lance un cri du cœur et appelle à l’équité pour ce droit au vaccin dont devraient bénéficier les personnes dites à risque, surtout si l’on sait que « le vaccin utilisé actuellement, ne confère une immunité solide contre les formes sévères de la maladie, que 28 jours après la deuxième dose, à 79% de ceux qui seront vaccinés. C’est à dire qu’ils ne sont protégés que 2 mois après le début de leur vaccination », dixit Dr Boubacar Signaté. Un appel entendu par l’ancien ministre des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement et actuel maire de Thiadiaye, Me Oumar Youm, qui a lui aussi refusé de prendre sa dose de vaccin contre la Covid-19.
Motif invoqué : « l’équité sociale et la clause de conscience. Un argument partagé par l’ancien député Cheikhou Oumar Sy qui déclare : « on devient extrêmement généreux avec l’argent des contribuables qui tirent le diable par la queue », parlant des effets secondaires du vaccin. Pendant ce temps, d’autres effets secondaires sont attendus, après la levée de l’immunité parlementaire du chef de file des «Patriotes».