« EN PROCEDURE PENALE, LE FAIT DE SE TAIRE OU DE GARDER LE SILENCE CONSTITUE UN ASPECT DES DROITS DE LA DEFENSE »
Interpellé sur cette stratégie d’Ousmane Sonko et Adji Sarr, l’enseignant chercheur spécialiste du droit pénal à l’Université de Dakar, Iba Barry Camara, a tenu à préciser que ce silence profite plus à l’accusé qu’a la plaignante

Il faut d’abord préciser que la confrontation n’est pas un acte extraordinaire mais un acte d’instruction. C’est le juge d’instruction qui organise la confrontation dans le cadre de ses prérogatives pour rechercher à établir par la vérité des faits à charge ou bien à décharge la culpabilité ou non de la personne poursuivie. Maintenant, la question qui se pose est de savoir si les personnes confrontées peuvent-elles se taire ou adopter ce qu’on appelle la loi du silence ?
En réalité, en procédure pénale, il faudrait comprendre que l’accusé peut bien ne rien dire et il n’y a absolument rien qu’on peut lui reprocher. Le fait de se taire ou de garder le silence constitue justement un aspect des droits de la défense. Que ce soit entre l’accusé et le juge d’instruction tout simplement ou alors quand il s’agit de confrontation, il appartient à l’accusé de répondre ou de ne pas répondre ou encore de choisir les questions auxquelles, il doit apporter réponse. Tout cela fait partie de la stratégie de la défense et on ne peut absolument pas reprocher à l’accusé son silence ».
«C’EST A LA PLAIGNANTE D’APPORTER LES ELEMENTS QUI PROUVENT LES FAITS QU’ELLE REPROCHE A L’ACCUSE»
« En revanche, la plaignante a intérêt à répondre à toutes les questions permettant au juge de bien mener l’instruction. Donc, c’est plutôt l’accusatrice qui a intérêt à être du côté du juge d’instruction pour apporter les indices et les preuves attestant de la réalité de ce qu’elle reproche à l’accusé. Son silence va profiter à la défense puisque ce n’est pas à l’accusé de prouver sa culpabilité mais plutôt, c’est à la plaignante, l’initiatrice de la plainte d’apporter les éléments qui prouvent les faits qu’elle reproche à l’accusé. Mais, en tout état de cause, même si les deux parties gardent le silence, il appartiendra au juge de tirer toutes les conséquences puisqu’il y’a des silences qu’on appelle bruyantes. Il y a des questions qui appellent une réponse et le fait de garder le silence peut être un indice pour le juge. Car au final, cette confrontation n’est ni pour l’accusé ni pour la plaignante mais pour le juge d’instruction dans le cadre de son instruction ».
«LA SUITE DE CETTE PROCEDURE DEPEND DU JUGE D’INSTRUCTION»
« La suite de cette procédure dépend du juge d’instruction. Mais, traditionnellement, la confrontation constitue l’ultime acte pour que le juge d’instruction prenne une décision. Mais, en tout état de cause, avant la prise d’une ordonnance de renvoi devant une juridiction ou bien de non-lieu, le doyen des juges va d’abord saisir le procureur de la République pour ses derniers réquisitoires. Et c’est après cette étape que e juge d’instruction va clore l’instruction en rendant son ordonnance de non-lieu ou alors de renvoi devant une juridiction ».