MAYORO FAYE APPUIE LA DEMANDE DU PDS
L'ancien chargé de communication du parti libéral estime que la tenue de l'élection présidentielle dans un tel climat de crise institutionnelle n'honore pas la République et réclame le report du scrutin

M. Mayoro Faye, membre de la direction du Parti démocratique sénégalais (Pds) se prononce sur la situation nationale, notamment sur l’invalidation de la candidature de Karim Wade. L’ancien chargé de communication du Pds nous donne aussi son avis sur la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire initiée par le groupe Liberté Démocratie et Changement et sur le refus des membres du Conseil constitutionnel de se livrer au jeu de la transparence auquel ils sont appelés par le Parlement. Entretien exclusif !
Le Témoin : Le Pds a déposé une requête pour l‘ouverture d’une commission d’enquête parlementaire sur des faits de corruption présumée au Conseil constitutionnel. Curieusement, des députés de Bby ont appuyé cette demande qui a abouti en moins de 48 heures ! Que répondriez-vous aux politologues et juristes qui disent que cette requête est trop « recevable » pour ne dire trop belle pour être vraie ?
Mayoro Faye : Aujourd’hui, la véritable et principale question doit être de savoir si des accusations aussi sérieuses ne méritent pas d’être élucidées. Ou bien devons-nous faire la politique de l’autruche et fermer les yeux sur cette très grave situation ? Non ! Donc permettez-moi de saluer le patriotisme des groupes parlementaires qui ont décidé de ne pas empêcher l’expression de la vérité. Au contraire, ces honorables députés veulent contribuer à la manifestation de la vérité sur les lourds soupçons pesant sur des membres du Conseil constitutionnel. La lutte contre la corruption, la collusion et les conflits d’intérêts ou toute autre forme de complots sur le dos de la République doit être un impératif, un sacerdoce pour tous quel que soit son statut ou son bord politique. Vous n’êtes pas sans savoir que la gestion du processus électoral par le Conseil constitutionnel a fini d’installer notre pays dans une profonde crise institutionnelle. Je pense que tous les Sénégalais devraient saluer, encourager et appuyer la demande de mise en place de cette commission d’enquête parlementaire initiée par des députés du groupe parlementaire Liberté, Démocratie et Changement. Nous devons tous pousser derrière pour que la machine de la vérité s’allume, puis s’emballe afin que tout éclate ! Notre pays ne mérite pas d’organiser une élection présidentielle dans une situation de suspicion pareille alimentée par des soupçons de corruption et de conflits d’intérêts. Cette affaire doit être tirée au clair. Car, le reste du monde nous regarde, nous observe, nous écoute…
Votre candidat Karim Wade n’est-il pas tombé dans le jeu de la vigilance et de la prudence de ne pas perdre tôt sa nationalité française avant qu’il ne soit électeur et éligible, c’est-à-dire le temps qu’une loi lui garantissait une participation à la présidentielle 2024 soit votée ?
Notre candidat, le président Karim Wade n’est tombé dans aucun jeu si ce n’est le jeu honteux du Conseil constitutionnel et de ses complices à son encontre et à l’encontre de plusieurs autres candidats dits spoliés. Amadou Ba n’a pas le courage de se mesurer à Karim Wade à la présidentielle. C’est pourquoi, il est dans des manœuvres. Je me félicite que cette enquête parlementaire soit élargie aux candidats spoliés à l’occasion du contrôle des parrainages. Parmi eux des fortunes diverses mais toutes préoccupantes. Malgré les efforts qu’ils ont fournis sur le terrain pendant des mois, ils ont été, eux aussi, traités par le Conseil constitutionnel et ses informaticiens avec beaucoup de mépris. Notre pays ne peut pas marcher sur la tête !
Diriez-vous comme beaucoup de militants et sympathisants du Pds que Karim Wade doit retourner au bercail pour mener le combat sur le terrain politique comme dans les années Sopi ?
Les militants et sympathisants du Pds, les mouvements et autres partis politiques alliés ainsi que les Sénégalais tout court sont en droit de souhaiter que notre champion, Karim Wade, qui a été exilé depuis plus de sept ans maintenant revienne parmi eux. Une demande politiquement légitime pour galvaniser davantage nos troupes, intensifier et accélérer le combat pour le triomphe de la vérité, la victoire de la démocratie et de l’Etat de droit. Le Pds qui constitue la locomotive est un très grand parti managé par son Secrétaire général national, le Président Abdoulaye Wade. Malgré le harcèlement et les privations que le Pds a subis durant ces dix dernières années, il a su garder constants sa combativité et son engagement pour le Sénégal. Oui nous souhaitons que les conditions du retour d’exil de Karim Wade soient réunies pour qu’enfin qu’il revienne au pays au grand bonheur des Sénégalais. En lui, la grande Coalition Karim 2024 trouve le profil idéal pour relever les défis multiples, divers et variés qui s’imposent à notre pays.
Ne pensez-vous que, malgré les griefs que vous évoquez, la tenue de l’élection présidentielle soit dans une courbe irréversible ?
Une très bonne question. Vous dites une courbe irréversible ? Non, je ne pense pas du tout. D’ailleurs, nous exigeons le report de l’élection présidentielle pour permettre à la commission d’enquête parlementaire d’édifier les Sénégalais sur les soupçons de corruption et de conflits d’intérêts révélés. Pour permettre également le rétablissement effectif des candidats spoliés dans leurs droits. Les conditions dans lesquelles notre pays est plongé font que le débat sur le report s’est finalement imposé de lui-même. Pour cette élection en vue, il y’a eu de graves dysfonctionnements à tous les niveaux du processus. Au lieu de s’arrêter et de corriger, certains veulent fermer les yeux et faire comme si rien ne s’était passé. Je suis pour le respect du Sénégal et des Sénégalais d’abord avant le respect du calendrier républicain qui peut conduire à une instabilité au Sénégal. Le processus électoral a connu beaucoup de sabotages. Nous devons alors l’assumer ensemble et faire prendre des mesures adaptées conformément à la Constitution en cas de crise institutionnelle. D’ailleurs, je suis étonné d’apprendre que les membres du Conseil constitutionnel évoquent le privilège de juridiction pour ne pas être entendus par la commission d’enquête parlementaire de l’Assemblée nationale. Vous savez, l’institution parlementaire n’agit pas en matière pénale. Mais, de par ses procédures, notamment l’article 48 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale. Cette institution doit aujourd’hui aider le peuple dont elle est l’émanation à être édifié sur les graves accusations formulées dans la gestion des affaires de la République, des affaires publiques. Plus les membres du Conseil constitutionnel se rebiffent, plus ils accentuent la crise institutionnelle qui n’honore pas notre République.
Hier c’était la guerre des communiqués. Après le communiqué du groupe des libéraux, celui de l’Union des magistrats du Sénégal (Ums), il y a eu la réponse du Conseil constitutionnel et ensuite la réplique du groupe parlementaire. Que pensez-vous de tout ça ?
Cette guerre des communiqués, comme vous l’appelez dans l’édition du quotidien « Le Témoin » d’hier, atteste qu’il y a une profonde crise des institutions. Et cette situation interpelle au plus haut niveau la clé de voute des institutions qu’est le président de la République en sa qualité de président du Conseil Supérieur de la Magistrature. Toutefois, l’Assemblée nationale a convoqué les députés pour demain (Ndlr : aujourd’hui mercredi) pour une séance plénière sur la résolution de la commission d’enquête parlementaire sur des faits graves de corruption, de collusion et de conflits d’intérêts qui ont provoqué l’élimination du président Karim Wade et plusieurs autres candidats spoliés à la présidentielle prévue dans 25 jours. Souhaitons que la vérité éclate car la communauté internationale nous observe…