LA CONSTANCE MÉDIATIQUE DE WADE
Si le Sénégal a enregistré, de 1886 à 1960, la parution de 121 titres, avec 68 publications entre 1914 et 1960, des journaux de parti comme « Sopi » et « Takussan », lancés par l’ancien chef de l’État continuent de marquer des esprits

« Takusan » et « Sopi » sont deux journaux qui continuent de marquer la mémoire collective en raison de la particularité de leur ligne éditoriale dans un contexte de domination des médias d’État. Lancés par l’ancien Chef de l’État, Me Abdoulaye Wade, ils ont servi de rempart contre la pensée unique, selon les explications de leurs animateurs. Le Sg du Pds avait fait appel à des journalistes de renom, pour animer, en premier, « Takusan », dont le tirage est passé de 15.000 exemplaires à ses débuts en 1983, à 30.000 exemplaires en 1984. Le journal fait long feu à cause de positions divergentes entre la rédaction et le patron. « Le pouvoir, qui avait recruté un certain nombre des anciens journalistes de « Takusan », était pressé de faire le vide autour de Wade», raconte un ancien de « Takusan », le journaliste sociologue Pathé Mbodj.
Dans la mouvance de cette publication, le Président Wade opère une restructuration et lance, en 1985, le journal « Sopi ». Il fait appel à des journalistes qui restent engagés et continuent à donner la parole à l’opposition. Mamadou Oumar Ndiaye, journaliste et membre du Bureau politique du Pds, Mouhamed Bachir Diop, et quelques cadres du Pds dont Khoureyssi Ba, Jean Paul Diaz et Cheikh Sadibou Fall font partie de la nouvelle équipe rédactionnelle.
En replongeant dans ce passé, le journaliste Serigne Mour Diop souligne que cette expérience n’a jamais émoussé leur détermination à rester des journalistes libres. « Je considère qu’un journal de parti constitue la meilleure école. La rédaction ne regorgeait que de journalistes qui se sont imposés par la rigueur, le respect de l’éthique et de la déontologie. Wade n’avait aucune main mise sur nous », explique M. Diop, selon qui c’est un contenu innovant et de qualité qui avait été proposé aux lecteurs.
Pathé Mbodj indique, dans cette foulée, que Me Abdoulaye Wade ne pouvait pas aller à contresens de la philosophie qu’il défendait. « Il n’y a jamais eu de tiraillements entre lui et nous. Wade aime la contradiction. Il nous fallait juste argumenter notre désaccord pour qu’il revoit sa position. Il ne pouvait pas d’ailleurs imposer une idéologie dominante alors qu’il dénonçait l’uniformisme. Il a été constant et logique dans sa démarche », dit-il. En 1990, une grande partie de la rédaction est licenciée par Me Ousmane Ngom, suite à une révolte pour non-paiement de salaires. « Sopi » subit le même sort que « Takusan ». Mais, ces journaux vont renaître sous un autre format, en 2000, au lendemain de l’alternance.