LE CINQ MAJEUR DE PASTEF POUR LA PRESIDENTIELLE
Retour sur le profil des personnalités dont pourrait émerger le plan B de Pastef. Même si le parti soutient urbi et orbi qu’il n’a ni plan B, ni plan C ni plan B, mais un seul plan A à savoir Ousmane Sonko

Après avoir perdu vendredi dernier la bataille devant la Cour Suprême qui statuait sur le refus de la Direction générale des Élections (DGE) d’octroyer au leader de Pastef, Ousmane Sonko, ses fiches de parrainage, ses avocats poursuivent le combat. Ils feront face, ce jeudi 12 octobre, aux juges du tribunal d’instance de Ziguinchor pour être édifiés sur le sort de leur client sur l’affaire concernant sa radiation des listes électorales. Pour parer à toute éventualité, Ousmane Sonko a délégué cinq responsables de son parti pour être candidates à la candidature. Le Témoin revient sur le profil de ces cinq majeurs dont pourrait émerger le plan B de Pastef. Ce même si ce parti soutient urbi et orbi qu’il n’a ni plan B, ni plan C ni plan B mais un seul plan A à savoir Ousmane Sonko.
El Malick Ndiaye, « le patron de la Com »
Même s’il n’a rejoint le Pastef qu’en 2017, soit trois ans après sa création, cela ne fait pas pour autant de lui un militant de second plan. Au contraire, El Malick Ndiaye fait partie des grandes figures de ce principal parti de l’opposition grâce à ses qualités d’homme engagé qui croit aux valeurs qui fondent Pastef. C’est cet engagement qui lui a valu sa nomination au poste très stratégique de secrétaire national à la communication. Une fonction qu’il assure avec beaucoup de professionnalisme quand il s’agit de défendre les causes du Pastef et, surtout, de son leader. Il s’est forgé ce talent d’orateur durant les années qu’il a passées aux côtés du professeur Ibrahima Fall, candidat malheureux à la présidentielle de 2012. Lequel l’avait surnommé «le patriote» en reconnaissance à son attachement aux principes qui fondent un Etat de droit. C’est pourquoi, El Malick Ndiaye se présente comme un farouche défenseur de la justice et de la démocratie. Après le retrait du professeur Ibrahima Fall de la scène politique, il va poursuivre son combat dans les rangs des «Patriotes» avec l’objectif de porter leur leader Ousmane Sonko à la magistrature suprême. Choisi parmi les cinq personnes susceptibles de défendre les couleurs de ce parti à la prochaine présidentielle pour le cas où le maire de Ziguinchor serait définitivement recalé, El Malick Ndiaye estime toutefois qu’un plan B de Pastef n’est pas à l’ordre du jour.
Âgé de 40 ans et titulaire d’un master 2 en affaires et commerce international, il n’a jamais occupé de responsabilité au niveau de l’État, mais a servi douze ans dans le domaine du transport maritime et logistique. Au plan politique, après avoir favorisé l’implantation du Pastef à Linguère, sa ville d’origine, il y est choisi candidat à la présidence du conseil départemental. Il s’était classé deuxième avec 16500 voix lors des dernières élections locales. Ce bon score réalisé dans un département qui constitue le fief de l’ancien ministre de l’Intérieur Aly Ngouille Ndiaye, également candidat à la présidentielle, lui vaut d’être choisi pour diriger la liste majoritaire de Yaw/Wallu dans le département lors des élections législatives. Toutefois, à cause d’ennuis judiciaires avec le régime en place, il n’a pu réussir la percée espérée. En liberté provisoire depuis le mois de juillet suite à son arrestation pour appel à l’insurrection et diffusion de fausses nouvelles, El Malick Ndiaye porte avec dignité un bracelet électronique au pied. Même si cela ne le gêne aucunement et n’entame en rien son engagement politique, cette mise sous bracelet électronique pourrait constituer une entrave pour battre campagne à l’intérieur du pays au cas où il constituerait l’alternative, pour ne pas dire le plan B, du Pastef à la prochaine élection présidentielle.
Bassirou Diomaye Faye, « l’ami et numéro 2 d’Ousmane Sonko »
C’est celui qui ressemble le plus à Ousmane Sonko aussi bien dans le parcours que le tempérament. Le secrétaire général et numéro 2 du Pastef est en prison depuis le 14 avril 2023 à la suite de la publication d’un post sur les réseaux sociaux où il critiquait le comportement de certains magistrats. Il a été arrêté sur son lieu de travail même. Et une fois devant les policiers de la DIC, il a assumé tous ses propos. Cette tête bien faite, titulaire d’une maîtrise en droit obtenue en 2004, avait le choix entre la magistrature et les impôts et domaines lorsqu’il a réussi au très sélectif concours d’entrée à l’ENA (Ecole nationale d’Administration). Finalement, il a opté pour les impôts et domaines. C’est dans cette régie financière qu’il fait connaissance avec Ousmane Sonko qui devient un de ses meilleurs amis. Militant engagé et dévoué, sous ses dehors calmes et posés, Bassirou Diomaye Faye a été de tous les combats du Pastef. Et lorsqu’il s’en prend au président Macky Sall dans sa volonté de barrer la route à son leader, il ne met pas de gants. «Nous sommes 125 millions 899 mille fois plus déterminés que lui pour lui emboîter le pas» avait-il déclaré. Ce combat politique qu’il mène de façon résolue est un legs hérité de son grand-père, qui avait pris part à la première guerre mondiale de 14-18, et de son père, un militant chevronné du PS.
Mais le fils de Ndiaganiao ne défend pas seulement les causes de son parti, il est aussi avocat de toute personne qui subit une injustice. C’est pourquoi les populations de Ndengler le portent toujours dans leurs cœurs depuis qu’il s’est résolument engagé dans leur lutte pour défendre leurs terres spoliées. C’est avec la même hargne qu’il a accompli ses charges de responsable des revendications du syndicat des travailleurs des impôts et domaines. Ce cadre de l’État, coriace dans l’adversité, subversif et parfois même arrogant est pourtant, selon ses proches, bourré d’humour. Toujours dans les liens de la détention, il est pourtant en pole position pour être la botte secrète de Sonko en cas de inéligibilité définitive du leader de Pastef. Mais, poursuivi pour les mêmes charges que son leader à part celles relatives au vol à savoir l’appel à l’insurrection, l’association de malfaiteurs, l’atteinte à la sûreté de l’État entre autres, cela pourrait compromettre ses chances de devenir le plan B de Pastef et d’Ousmane Sonko.
Birame Souleye Diop, « l’incarnation de la légitimite populaire »
Si le choix du plan B de Ousmane Sonko devait se jouer sur la seule aune de la légitimité politique, Biram Souleye Diop n’aurait pas de concurrents au sein du Pastef. En effet, le natif de Thiès est le seul parmi les cinq désignés à être en même temps maire et député. Ce, depuis qu’il a été élu avec brio maire de la commune de Thiès Nord lors des dernières élections municipales. En plus de cette brillante percée dans la capitale du Rail, il dirige le groupe parlementaire de la coalition Yewwi Askan Wi, la plus grande de l’opposition. Cette confiance placée en lui est la récompense d’un long combat qu’il a engagé à côté de ses camarades de parti avec qui il partage les mêmes convictions politiques. Cadre incontesté du Pastef, Birame Souleye l’est aussi dans l’administration fiscale. Après son DEA en droit, il réussit au concours de l’ENA avec comme option les Impôts et Domaines. C’est de là que sont parties ses relations avec Ousmane Sonko. Nommé Administrateur général du Pastef, il gère tous les secrets du parti avec sérieux et discrétion. Brave et imperturbable, Birame se fait remarquer par son discours va-t’en guerre. Une nervosité qui lui est souvent reprochée et qui lui a valu de subir à deux reprises les foudres du régime. Placé une fois placé en garde à vue du fait de ses écarts de langage, il avait fini en toute humilité par reconnaître son erreur et présenter ses excuses publiquement. Enquêteur fiscal chevronné, ses collègues de travail le présentent comme quelqu’un d’incorruptible, dévoué et qui a une parfaite maîtrise des dossiers administratifs. A l’Assemblée nationale, il se fait distinguer par la pertinence de ses interventions. Très connu à Thiès depuis sa jeunesse, ville pleine d’enjeux pour la course au palais de la République, Birame Souley Diop a réussi à y faire mordre la poussière à la mouvance présidentielle qui, depuis, lors éprouve toutes les difficultés pour reconquérir ce bastion. Ses chances de devenir la botte secrète de Sonko restent intactes.
Abass Fall, « le leader incontesté de Dakar »
C’est en partie grâce à sa détermination et son travail permanent sur le terrain que le Pastef s’est imposé à Dakar. Pourtant, Abass Fall n’en est pas un membre fondateur. Mais à force d’abnégation, il a fini par faire adhérer des milliers de Dakarois au projet de ce parti jusqu’à s’imposer comme une valeur sûre de Pastef à Dakar. Auparavant, c’est-à-dire avant de prendre la carte des « Patriotes », il avait milité dans le Mouvement des Patriotes pour le Développement (MPD) du ministre Aliou Sow. Membre de la Fédération des Ecoles Privées d’Enseignement Supérieur (FEPES), dont il est le vice-président, Abass a été de tous les grands combats du Pastef. Du moins depuis qu’il a intégré cette formation en 2017. D’ailleurs, vu son poids dans la capitale, beaucoup voyaient en lui le potentiel futur maire de Dakar.
Mais pour des raisons de stratégie politique, son mentor, Ousmane Sonko, pour multiplier les chances de la coalition Yaw, a soutenu avec détermination la candidature de Barthélémy Dias. Une fois la victoire acquise, Abass s’est vu logiquement attribuer le poste de premier adjoint au maire de la capitale. Après quoi l’actuel maire a poignardé dans le dos le principal artisan de son élection. Pis, au sein du conseil municipal de Dakar, prenant prétexte du respect de la parité, il a manœuvré pour écarter Abass Fall de ce poste au profit de Ngoné Mbengue de Taxawu Sénégal. Sanction ou pas, Abass Fall n’en a cure. Il minimise la décision et déclare que c’est un non-événement.
Pour lui, la seule bataille qui vaille est celle de la candidature de Ousmane Sonko et de la libération des détenus politiques. Dans cet élan, il a toujours mobilisé les militants devant le domicile de Sonko pour l’accompagner à chaque fois qu’il devait se rendre au tribunal. D’ailleurs lui-même a été interpellé et poursuivi pour association de malfaiteurs, menaces de voie de fait, violences dans le dossier opposant Ousmane Sonko et Adji Sarr avant d’être libéré plus tard. Élu député à l’Assemblée nationale, il joue pleinement son rôle de parlementaire et ne rate jamais le pouvoir dans ses prises de parole. Farouche défenseur d’Ousmane Sonko, ce titulaire d’une maîtrise en anglais pourrait, pourquoi pas, être la pièce de rechange de son leader à l’élection présidentielle de 2024.
Guy Marius Sagna, « le «baobab » que rien n’ébranle »
Son nom «Guy», si on le lit en Ouolof, renvoie au gigantesque et mystérieux arbre qu’est le baobab. Hasard ou pas de toute façon Guy Marius Sagna est l’incarnation du courage, de la témérité, de la bravoure voire du stoïcisme. Né en 1979, il s’est fait un nom à travers le mouvement Front pour une révolution Anti-impérialiste, Populaire et Panafricaine (Frapp France Dégage). Activiste de renommée, le trublion Guy est dans tous les combats aussi bien politiques que sociaux. Défenseur infatigable des personnes victimes d’oppression, ses combats dépassent nos frontières. La lutte anti-impérialiste, le départ des bases militaires étrangères, le refus des APE et le CFA... sont au cœur de ses préoccupations. Au Sénégal, il s’implique dans toutes les causes, des plus justes aux plus improbables. Cet engagement lui vaut d’être le recordman des arrestations puisqu’il aurait été interpelé une quarantaine de fois. On se rappelle encore le défi qu’il avait lancé au régime de descendre dans la rue si la hausse sur le prix de l’électricité est maintenue. Il avait réussi de façon spectaculaire en novembre 2019 à marcher de la place de l’indépendance jusqu’aux grilles du palais présidentiel.
Parmi les catégories de la population qu’il défend le plus, les détenus qu’il a eu à côtoyer en prison. Il se fait l’écho de leur moindre mouvement d’humeur, de leur plus petite altercation avec les matons, de leurs multiples grèves de la faim. Très proche de Ousmane Sonko, «le baobab» s’est toujours érigé en bouclier pour le protéger même lorsque les hommes de tenue ont voulu l’extirper de son véhicule pour le déposer au tribunal. Les prisonniers aussi ne sont pas en reste puisqu’il ne cesse de dénoncer leurs conditions de détention qu’il juge à l’encontre du respect des droits humains. Élu député dans la circonscription du leader de Pastef, Guy Marius Sagna poursuit son combat à l’Assemblée nationale en usant de son éloquence et d’un style qui impose qu’on lui prête attention. Actuellement en tournée en Europe pour sensibiliser et mobiliser la Diaspora en vue de la prochaine élection présidentielle, Guy est déjà dans les habits d’un futur candidat en précampagne. Dans l’éventualité de l’inéligibilité de Sonko, son nom est de plus en plus cité comme étant le meilleur profil pour être le plan B du leader de Pastef.