LE DECALAGE EST ENORME ENTRE LE DISCOURS DE MACKY SALL ET LES FAITS
Le député Decroix descend le chef de l'Etat après sa déclaration sur le dialogue

Le député Mamadou Diop Decroix a réagi par rapport aux propos tenus sur le dialogue par le chef de l’Etat, Macky Sall. Selon lui, il y a un grand écart entre les déclarations du leader de l’Alliance pour la république (Apr) et les faits.
Les propos tenus par le Président Macky Sall sur le dialogue, au Musée des Civilisations Noires le 11 décembre dernier, sont loin de la réalité. C’est ce qu’affirme Mamadou Diop Decroix dans une note parvenue hier à «L’As». «Le président de la République a prononcé le 11 décembre 2020 au Musée des Civilisations Noires, un discours aux allures triomphalistes, consacré au dialogue politique au Sénégal. Après l’avoir lu, je me suis posé la question de savoir si l’opposition et le Président de la République parlent du même dialogue.
Dans le dialogue dont il parle je le cite : ‘’Sur 27 points en discussion, 25 ont déjà trouvé un consensus’’. Et, cerise sur le gâteau, ‘’les points posés par l’opposition ont été intégralement pris en charge’’ (c’est moi qui souligne) et les 2 points restants sont mineurs, pas dans leur contenu mais parce qu’il n’a pas voulu diviser (sic) l’opposition sur la question du chef de l’opposition. Sur la question relevant du chef de l’Etat à la fois président de parti politique, il considère qu’il n’y avait pas sens à séparer les deux», explique le député folliste.
Parlant en sa qualité de porte-parole des partis politiques présents à la salle des banquets du palais de la République, le 28 mai 2019, Mamadou Diop Decroix affirme la main sur le cœur que le décalage est énorme entre le discours de Macky Sall et les faits.
Pis, souligne-t-il, aucune des nombreuses commissions qui ont travaillé pendant de longs mois n’a remis son rapport. «En effet, hormis la commission politique qui n’a remis qu’un rapport d’étape, aucune autre n’a rédigé son rapport», dit-il. Pour étayer son argumentaire, il fait quelques rappels dans son texte.
Selon lui, l’opposition s’est unanimement prononcée pour une Haute Autorité en charge des élections en lieu et place du ministre de l’Intérieur, mais cette revendication, fondamentale, ne figure même pas dans son énumération. «Toute l’opposition regroupée dans le Front de résistance nationale (FRN) avait inscrit dans sa plateforme la restitution de leurs droits civils et politiques à Karim Meïssa Wade et à Khalifa Ababacar Sall après avoir exigé la libération de l’un et le retour de l’autre dans sa famille. Ce point n’a pas été évoqué dans le propos du président de la République.
La question du parrainage à la présidentielle qui avait permis d’éliminer une vingtaine de candidats parmi les plus sérieux n’est toujours par résolue. Elle ne figure pas dans son énumération. Dans cet ordre d’idées, l’introduction du bulletin unique bruyamment revendiquée par l’opposition de l’époque aujourd’hui aux affaires, a été écartée par les plénipotentiaires du pouvoir», ajoute Decroix.
Le parlementaire poursuit : «L’audit et l’évaluation du processus électoral et du fichier électoral sur pièce et sur place depuis la refonte de 2016, jusqu’à la présidentielle de 2019 n’ont toujours pas encore démarré. C’est à cet audit qu’étaient référés les points relatifs au parrainage pour l’élection présidentielle, la caution pour les élections locales, le bulletin unique, les autorités en charge des élections.
D’autres questions tout aussi importantes pour notre système démocratique si sérieusement malmené n’ont pas été évoquées par le président de la République comme celle de la décentralisation en attente au sein de la commission décentralisation et territorialisation des politiques publiques. On avait déjà eu un avant-goût, dans cette commission, de la controverse en cours aujourd’hui sur la Ville de Dakar. En effet, des proches du pouvoir commençaient à plaider pour un statut spécial de Dakar sous-entendant la nomination par décret de l’Autorité qui devrait diriger la Ville. Cette proposition avait suscité une réaction d’indignation de notre parti à l’époque».
D’après le député, la mise en place d’un cadre normatif de l’action politique et citoyenne (renforcer les droits fondamentaux des citoyens et les libertés des acteurs politiques) reste également en l’état. Il en est de même, si l’on se fie à Decroix, de la question du rôle et de la place de la justice dans le processus électoral. « Le Président semble si fier de désigner ses nouveaux alliés anciennement dans l’opposition présents dans la salle comme la preuve irréfutable du succès de son dialogue. Il y a là deux points essentiels à retenir. D’abord cette conception des rapports entre opposition et pouvoir est une véritable catastrophe démocratique. Ensuite le Président a tranché définitivement le débat sur le double dialogue. En conséquence de ce qui précède le dialogue dont parle le Président de la République n’est pas celui auquel l’opposition a pris part », regrette-t-il.µ