«POURQUOI LE PEN SENEGAL EVITE UN ENVAHISSEMENT DE L'ASSOCIATION…»
Président du Pen Sénégal, le colonel Moumar Guèye explique dans cet entretien les grands fondements de cette structure dédiée aux gens de la plume mais presque méconnue de ses principaux acteurs. Entretien…

Président du Pen Sénégal, le colonel Moumar Guèye explique dans cet entretien les grands fondements de cette structure dédiée aux gens de la plume mais presque méconnue de ses principaux acteurs. Entretien…
Le Témoin - Mon colonel, pouvez- vous nous présenter de façon succincte le Pen International ?
Colonel Moumar GUEYE - Le sigle P.E.N est un acronyme du mot anglais « pen » (stylo). Il résume les différents métiers de l’écriture : P comme Poets (Poètes), Playwrights (dramaturges) ; E comme Essayists (essayistes), Editors (Éditeurs); N comme Novelists (Nouvellistes), Non-fiction authors. Le PEN a été fondé en 1921 à Londres par Catherine Amy Dawson Scott. C’est une association internationale d’écrivains, apolitique. Elle bénéficie d’un statut de catégorie à l’UNESCO et d’un statut consultatif au Conseil économique et social des Nations Unies. Le PEN, qui a donné naissance à Amnesty International, a pour but de rassembler des écrivains de tout pays attaché aux valeurs de paix, de tolérance et de liberté sans lesquelles la création devient impossible. Présentement, le PEN international est composé de 144 centres, dans 101 pays à travers le monde. C’est une tribune offerte aux écrivains. Il leur offre l’occasion de discuter librement de leur travail et de s’exprimer au nom des écrivains réduits au silence à travers le monde… Il est également ouvert aux poètes, aux romanciers, aux essayistes, aux nouvellistes, aux éditeurs, aux historiens, aux auteurs dramatiques, aux critiques littéraires, aux traducteurs, aux journalistes et aux scénaristes qui partagent, tous, le même intérêt pour le métier et l’art de l’écriture. Ils ont tous comme dénominateur commun leur engagement dans la liberté de s’exprimer librement par le mot écrit…
Vous êtes Président du Pen Sénégal, cependant cette tribune offerte aux gens de la plume est presque méconnue au Sénégal. Qu’est-ce qui explique cela ?
Il convient de rappeler que le Centre PEN Sénégal existait au Sénégal bien avant les indépendances. Il a été successivement présidé par le poète Léopold Sédar Senghor, Ousmane Socé Diop, Birago Diop, Ousmane Sembène, Mbaye Gana Kébé... C’est sous le régime du Président Abdoulaye Wade et la présidence de M. Mbaye Gana Kébé que le 73ème Congrès international du PEN a eu lieu à Dakar du 1er au 10 juillet 2007. L’actuel président de la République, M. Macky Sall, était alors président de l’Assemblée nationale. Ce Congrès a eu un éclatant succès ! Après mon élection en qualité de président du PEN, j’ai fait part au bureau exécutif de ma volonté de ne pas pouvoir diriger une association qui ne serait pas reconnue par les autorités de notre pays. C’est ainsi que le bureau exécutif s’est employé à reconstituer les archives du PEN Sénégal. Malheureusement, après plusieurs mois de recherches au ministère de l’Intérieur en charge des libertés publiques, nous n’avons trouvé aucune trace de document officiel concernant l’existence du Centre PEN Sénégal. En réalité, force était de reconnaître que le PEN Sénégal existait, certes, mais il était tout simplement jumelé à l’Association des écrivains du Sénégal. C’est ainsi que dans l’article 4 du règlement intérieur de l’AES, il est mentionné que « le PEN Sénégal est une cellule de l’Association des Écrivains du Sénégal. Son Président est proposé par le Président de l’AES de même que les membres du bureau. Après ce constat, le Bureau exécutif, en accord avec le Président de l’AES, a décidé de faire du Centre PEN Sénégal une association de plein droit en régularisant son existence en se faisant délivrer un récépissé de déclaration d’association sous le numéro 0 1 9 1 5 7 / M I N T / D G A T / DLP/DLAPA/BA du 30 janvier 2019. C’est ainsi que le PEN Sénégal a été « recréé » à Dakar, conformément aux dispositions du code des obligations civiles et commerciales. Il répond au statut d’une association à but non lucratif dénommée PEN SÉNÉGAL. L’association est reconnue par le PEN INTERNATIONAL et le Gouvernement du Sénégal. Sa durée est illimitée et son siège installé à Kër Birago Gu Bees. Il faut préciser que le PEN Sénégal est une association apolitique. Il bénéficie d’un statut de catégorie à l’UNESCO et d’un statut consultatif aux Nations Unies. Le PEN Sénégal a pour but de rassembler des écrivains attachés aux valeurs de paix, de tolérance et de liberté, sans lesquelles la création devient impossible. Il contribue également à favoriser la liberté d’expression et de circulation des écrivains.
La structure est ouverte aux journalistes. Mais qu’est-ce qui a été fait dans ce sens ?
Effectivement le PEN est également ouvert aux journalistes, mais des dispositions strictes ont été prises par le Bureau exécutif du Sénégal qui a mis en place un comité de validation des adhésions, ceci pour éviter un envahissement de l’association par des prétendus candidats dont le profil et les qualités déclarés ne seraient pas conformes aux exigences du PEN Sénégal.
Quelle opportunité les hommes de médias pourraient ils tirer de l’association que vous dirigez ?
Il convient de noter que la liberté d’expression est une condition fondamentale pour tous ceux qui partagent le métier de l’écriture et la création. Je voudrais rappeler aux candidats du PEN que la plume d’un écrivain ou d’un journaliste constitue parfois une arme redoutable et dangereuse. Elle peut mettre en péril la paix et la cohésion sociale dans un pays. C’est la raison pour laquelle, écrivains et journalistes doivent faire usage de leur plume à bon escient et avec sagesse. Ils doivent respecter l’éthique et la déontologie régissant leur profession. La plume de l’écrivain ou du journaliste ne doit être ni irresponsable ni génératrice de propos discourtois ou diffamatoires! L’écrivain et le journaliste se doivent de respecter leur mission d’éveilleurs de conscience citoyenne, d’éducateurs des peuples, de lanceurs d’alerte et de défenseurs des acquis fondamentaux de la démocratie. Voilà pourquoi, l’énoncé des règles immuables de défense de la liberté d’expression adoptée par le PEN ne doit nullement soustraire l’écrivain et le journaliste à l’obligation qui leur est faite de se soumettre impérativement aux lois et règlements de la République, en matière de communication. L’un et l’autre doivent certes jouir de la liberté d’expression, mais ils doivent éviter les excès et les dérives, de nature à mettre en péril l’unité nationale, la cohésion sociale, la sécurité de notre peuple et la paix dans notre pays! Wolof Ndiaye a dit : «xam lépp, wax lépp baaxul ! » (Connaître tout et raconter tout est une mauvaise chose).
Le président Macky Sall a publié un essai intitulé « Le Sénégal au cœur ». À ce titre, pourrait-il adhérer au PEN Sénégal?
Oui, je pense que l’essayiste Macky Sall pourrait parfaitement adhérer au PEN Sénégal dans la catégorie des membres d’honneur. Bien entendu, aucune activité politique ne sera acceptée au sein de l’association.
Faut-il pour tout adhérent être membre de l’Association des écrivains du Sénégal ?
Pas forcément ! En principe tous les membres de l’AES sont membres du PEN Sénégal, mais tous les membres du PEN Sénégal ne sont pas forcément membres de l’AES.