QUAND DES MAGISTRATS TROQUENT LEUR TOGE CONTRE LA POLITIQUE
Malgré les rappels à l’ordre de la Cour des comptes et de l’UMS, ils sont aujourd’hui trois magistrats à mettre en veilleuse leur carrière dans la justice pour faire allégeance au pouvoir

Si les fonctionnaires ont toujours fait de la politique, il en a souvent été autrement, en ce qui concerne le corps spécifique des magistrats. D’ailleurs, pour ces derniers, la loi est sans équivoque. Abdou Fouta Diakhoumpa déclare : ‘’La loi l’interdit formellement. Mais comme celui qui sanctionne y trouve son compte, il ne va pas sanctionner. Il appartient au président de la République de les rappeler à l’ordre, à défaut de les radier. Mais il ne le fera pas, parce que ça l’arrange.’’
S’y ajoute le fait que certains de ces magistrats n’ont pas du tout le profil de l’emploi auquel ils ont été promus. Il en est ainsi d’Omar Boun Khatab, nommé récemment à la tête de l’entreprise de transport public Dakar Dem Dikk. C’est du moins la conviction d’Abdou Fouta Diop. D’ailleurs, concernant ce dernier, l’Union des magistrats sénégalais avait fait un communiqué en janvier 2016 pour fustiger son attitude. Aux termes de l’article 14 du statut des magistrats, rappelait l’organisation, ‘’les magistrats, même en position de détachement, n’ont pas le droit d’adhérer à un parti politique et toute manifestation politique leur est interdite’’.
En conséquence, les camarades de Souleymane Téliko affirmaient sans ambigüité : ‘’De tels agissements, en plus de constituer une violation des valeurs et principes qui fondent la justice, portent gravement atteinte à l’image de notre corps.’’
L’UMS invitait ainsi l’actuel DG de Dakar Dem Dikk à ‘’mettre fin à de telles activités et à se conformer, en toutes circonstances, à l’obligation de neutralité, gage de l’autorité et de légitimité du magistrat’’.
Bien avant, la Cour des comptes, également, s’était fendue d’un communiqué pour rappeler à l’ordre les siens récalcitrants. Elle disait : ‘’Ces comportements violent le statut des magistrats et le serment des collègues concernés.’’
En effet, ajoutait la note, ‘’avant d’entrer en fonction, les magistrats de la cour jurent ‘de bien et loyalement remplir les fonctions de magistrat, de les exercer en toute impartialité, dans le respect de la Constitution et des lois de la République, de garder scrupuleusement le secret des délibérations et des votes, de ne prendre aucune position publique, de ne donner aucune consultation à titre privé ou public sur les questions relevant de la compétence de la juridiction et d’observer en toute réserve l’honneur et la dignité que ces fonctions imposent’’.
Aussi, le comité de juridiction de la Cour des comptes citait l’article 10 de la loi organique n°99-73 du 17 février 1999, portant statut des magistrats de la Cour des comptes qui dispose que : ‘’Les membres de la Cour des comptes sont tenus au secret professionnel. Ils doivent, en toute circonstance, faire preuve de la réserve, de l’honnêteté, de la dignité qui découlent de leurs serments et de leurs fonctions.’’
Il leur est également interdit, suivant les dispositions de la loi organique n°99-73 précitée, ‘’toute activité, démonstration ou prise de position politique ou syndicale’’.
Mais toutes ces invites sont tombées dans l’oreille de sourds. Aujourd’hui plus que jamais, MM Sylla, Dieng et Sall poursuivent, en toute impunité, leur carrière politique. Alors qu’Amadou Lamine Dieng est maire de la commune de Wakh Ngouna depuis 2014 ; Sylla et Sall visent à trôner à la tête des mairies de Louga et de Mbour.