VIL PROJET AUTOUR DE LA VILLE DE DAKAR
Les langues se délient pour dénoncer la sortie du ministre des Collectivités territoriales qui plaident pour la suppression de la capitale dans sa forme actuelle et de l’ériger en conseil départemental, en conformité avec l’Acte 3 de la décentralisation

Les langues se délient pour dénoncer la sortie du ministre des Collectivités territoriales qui plaident pour la suppression de la ville dans sa forme actuelle et de l’ériger en conseil départemental, en conformité avec l’Acte 3 de la décentralisation. Mais aussi bien des acteurs politiques que des membres de la société civile sont sortis de leur réserve afin que les villes soient maintenues telles qu’elles sont.
«Un autre vil débat sur la Ville.» C’est ainsi que le coordonnateur du Forum civil a réagi à l’annonce du ministre de l’Intérieur, laissant entrevoir une volonté du gouvernement de mettre fin au statut de certaines villes, en l’occurrence Dakar.
Dans une note parvenue à «L’AS», Birahime Seck a fait état de son opposition à un tel projet. «Cette déconstruction politicienne continue de la démocratie et la confiscation irrespectueuse de la souveraineté du peuple sont des manœuvres inacceptables dans un Etat de droit. Les territoires doivent être administrés par des conseils légitimement élus par les populations », a tonné monsieur Seck. Selon lui, au lieu de soulever un tel débat, il était attendu du président de la République de fixer la date des élections territoriales en 2021.
Embouchant la même trompette, Thierno Bocoum a soutenu que les arguments du gouvernement ne sont pas conformes aux dispositions de la loi. «Les arguments avancés par le gouvernement, à travers son porte-parole, pour justifier une éventuelle suppression de la Ville de Dakar, sont contraires au contenu du Code général et des collectivités locales (CGCL).
La base légale invoquée n’est pas conforme aux dispositions de la loi», explique le Président du mouvement AGIR. Effectivement, note-t-il, le Code général des collectivités locales, en son article 1er, dispose : «Dans le respect de l’unité nationale et de l’intégrité du territoire, les collectivités locales de la République sont le département et la commune. » A l’en croire, il est ainsi bien clair que la Ville n’est pas nommément désignée comme une collectivité locale dans l’article 1er.
Cependant, précise-t-il, elle en a le titre. Explications : «L’article 167 dernier alinéa du Code général des collectivités locales est sans équivoque : ‘’La Ville a le statut de commune.’’ Les choses sont simples : la commune étant une collectivité locale (art 1er CGCL), la ville ayant le statut de commune (art 167 CGCL), est par conséquent une collectivité locale.» Il s’y ajoute que nullement il n’a été établi dans le CGCL que la Ville est un département, ajoute l’ancien député de Rewmi. Qui pense que la ville a plutôt le statut de commune comme précisé ci-haut. C’est juste à titre dérogatoire que les attributions dévolues au Conseil départemental par le CGCL sont exercées, le cas échéant, par la Ville si son périmètre correspond au territoire du département (article 28 CGCL), renseigne Thierno Bocoum.
NDIAGA SYLLA : «LE DEPARTEMENT NE SEMBLE PAS CONSTITUER UN ECHELON ADEQUAT POUR LA PLANIFICATION DU DEVELOPPEMENT LOCAL»
En outre, l’expert électoral et ingénieur en gestion du développement urbain, Ndiaga Sylla, s’est aussi invité au débat. Il estime qu’avec l'Acte 3 de la décentralisation, on a voulu confondre la Ville à une Communauté urbaine tout en lui conférant un statut de Commune. Or, dit-il, l'existence de communes de plein exercice et l'absence de tutelle entre les collectivités territoriales rendent absurde une telle option. En vérité, ajoute-t-il, le combat initié en 2014 contre la réforme du mode de scrutin ainsi que la pression exercée par certaines collectivités avaient poussé le Gouvernement à différer la suppression de la Ville qui logiquement devrait devenir un établissement d'intercommunalité. Toujours, d’après Ndiaga Sylla, il reste l'impérieuse nécessité d'aller vers le regroupement et la fusion de plusieurs communes en vue d'ériger des entités viables et compétitives telles que prônées par la réforme de la décentralisation. Il pense d’ailleurs que le département ne semble pas constituer un échelon adéquat pour la planification du développement local, d'où la pertinence de retenir la région en tant qu’échelon intermédiaire avec les pôles territoriaux. «Il faut savoir conduire les réformes en toute rigueur en s'extirpant des logiques de calculs politiciens...Dans tous les cas, les grandes communes garderont l'appellation de ville », a-til conclu.