«IL FAUT DES TESTS MASSIFS, EN PLUS DE CIBLER CERTAINS CLUSTERS POUR UNE PRISE EN CHARGE PRECOCE»
Répondant à nos questions, l’épidémiologiste, Massamba Diouf, a plaidé pour une massification des tests de Covid19 en plus de cibler certains clusters pour une prise en charge précoce.

Répondant à nos questions, l’épidémiologiste, Massamba Diouf, a plaidé pour une massification des tests de Covid19 en plus de cibler certains clusters pour une prise en charge précoce. Mieux, il estime que les autorités devraient songer à ajouter à l’exigence du port de masque une certaine restriction dans les rassemblements.
«L’AS» : Le gouvernement a pris la décision de durcir le ton en imposant désormais, sous peine d’amende, le port de masque dans les lieux publics. Pensez-vous que c’est cela qui va régler le problème ?
Pr Massamba DIOUF : «Je considère que ces mesures ont tardé à venir. On avait déclaré depuis belle lurette que cette mesure de port obligatoire de masque devait intervenir et qu’il fallait y adosser des sanctions au cas où elle ne serait pas respectée. Et c’est heureux aujourd’hui de constater que le gouvernement s’est rebiffé en voulant justement assujettir des sanctions à cette mesure-là. Le port de masque n’étant pas compliqué, on pourrait conscientiser les populations à se parer systématiquement de masques pour enfin contribuer à réduire la propagation de la maladie. En réalité, la distanciation physique peut d’une certaine manière poser problème, vu le contexte culturel. Mais pour ce qui est du port de masque, on a vu d’éminentes personnalités culturelles ou religieuses mettre leur masque pour montrer aux populations le bon exemple à l’instar de Serigne Mountakha Mbacké et récemment aussi du Khalife des Tidianes Serigne Babacar Sy Mansour. Il faut que les Sénégalais suivent ces exemples. Encore une fois, je suis plus que jamais convaincu que ce port de masque peut contribuer à réduire la propagation de l’épidémie à l’échelle nationale.
Est-ce que vous pensez qu’il est conséquent de lever l’état d’urgence et le couvre-feu et revenir aujourd’hui contrôler l’accès aux plages et les rassemblements publics ?
Je pense que quelque part, la levée de cette mesure d’état d’urgence, notamment le couvre-feu, s’imposait avec acuité. Parce qu’il y avait aussi un état d’urgence économique qui s’imposait et qui devrait nécessairement permettre aux autorités de lever le pied un tout petit peu. Cependant, je reste également plus ou moins convaincu que les rassemblements des populations devraient aussi être réduits du fait des gens qui refusent d’observer scrupuleusement les gestes barrières et le port de masque. On a vu les cérémonies sociales telles que les baptêmes, mariages, cérémonies funéraires qui entraînent des rassemblements au point qu’on peut estimer que s’il n’y a pas de mesures qui accompagnent ce port de masque, il peut y avoir des difficultés à mieux contrôler la propagation du virus. Donc nécessairement, les autorités devraient songer à ajouter à l’exigence du port de masque une certaine restriction dans les rassemblements. On pourrait par exemple dire que les rassemblements non nécessaires qui relèvent des activités de loisirs peuvent quand-même être suspendus.
Que faudrait-il pour stopper l’évolution de la pandémie Covid-19 dans le pays ?
Au départ, on avait une certaine capacité de tests. Et par la suite, on a appris que les tests ont été réduits de façon drastique. Personne ne comprend la pertinence de ce choix-là. Par rapport à la prise en charge, aujourd’hui tous les patients de Covid ne sont pas pris en charge dans les structures hospitalières. C’est vrai, à un moment donné, il y a eu un petit débordement et il fallait réfléchir sur une alternative. C’est normal. Mais pour autant, il ne faudrait pas aller jusqu’à mettre un petit obstacle par rapport à la stratégie de prise en charge précoce qui nous permettrait de limiter le nombre de décès. Prenons l’exemple de la Côte d’Ivoire : elle teste plus que le Sénégal ; elle a plus de cas de Covid et pourtant le Sénégal a plus de morts. Cela pourrait amener à réfléchir sur des questions fondamentales pour aider notre pays. Donc, nous proposons de ne pas fermer les yeux sur les capacités de test. Aujourd’hui, on devrait assister à une vulgarisation des centres de dépistage qui pourraient prendre en charge en amont les cas qui existent au niveau de chaque région. A côté des tests massifs, il faut bien cibler certains clusters pour une prise en charge précoce. Mais aussi,dans la communication, il faut continuer à faire une communication attractive, imagée, dynamique et même tropicalisée.