«LA TRANSMISSION RAPIDE DES VIRUS EPIDEMIQUES EST DUE A L’ACTION DE L’HOMME»
Selon Abdoul Kane, la destruction de la nature et de l’écosystème par l’homme a pu faciliter le rapprochement de ce dernier avec l’animal qui lui transmet plus facilement les virus contagieux

La destruction de la nature et de l’écosystème par l’homme a pu faciliter le rapprochement de ce dernier avec l’animal qui lui transmet plus facilement les virus contagieux. D’où les épidémies devenues plus fréquentes car favorisées par la technologie et l’interconnexion au niveau mondial.
Des épidémies ! On n’en a toujours vécu partout à travers le monde, et depuis… l’Antiquité. Parce que naturellement, les microbes ont toujours été là. Ils sont là, et continueront à exister. sauf que les épidémies avaient leurs…camps de cantonnement. Comme le virus du moyen orient qui, même s’il a pu engendrer des milliers de morts avec une létalité à 30%, était resté cantonné en terre asiatique. C’était un virus très mortel, mais dont la propagation était minime. Ce, contrairement à la covid-19 avec un faible taux de mortalité situé entre 2 et 3%, mais avec une propension plus que rapide. en effet, et comme l’explique le scientifique, Pr Abdoul Kane, dans l’émission « Quatrième de couverture », si aujourd’hui on a des épidémies de plus en plus fréquentes et plus virulentes, c’est parce que nous l’avons créé en détruisant la nature et l’écosystème. et que le dérangement de l’environnement joue un rôle essentiel dans la survenue des épidémies. « Les humains ont détruit l’équivalent d’une superficie qui est celle de l’Afrique tout entière. On a su créer cette destruction, et on a pu mettre en contact direct l’homme et le monde l’animal.
Or deux tiers (2/3) des épidémies sont dues aux zoonoses ; ce qui est lié à la contamination avec les animaux. C’est le cas du Vih Sida, de l’épidémie Ebola et de beaucoup d’autres épidémies. Aujourd’hui, dit-il, l’homme carnivore est en train de faire un élevage intensif. D’où ce contact direct entre l’humain et l’animal devenu de plus en plus rapproché. Nous avons donc des virus qui vont quitter le monde animal pour se rapprocher de l’homme parce que ne pouvant plus se mettre dans la nature. C’est l’homme qui l’a créé avec le bouleversement climatique, des choses qui vont avec la prolifération et la mutation des virus. Et lorsqu’un virus passe de l’animal à l’être humain, il peut muter et devenir plus résistant. On comprend pourquoi on a pu avoir le VIH sida, le virus à fièvre hémorragique Ebola, et des virus respiratoires tels que le Sars-Cov 1 et 2… » a fait remarquer l’auteur de la « Vie sur un fil ». Qui souligne que « le virus a toujours été là, mais il lui manquait un support. Et c’est la technologie qui a fait que les virus sont devenus viraux. Cette pandémie n’était pas surprenante. Il faut que l’humanité comprenne que cette chose dramatique que nous vivons aujourd’hui est le fruit de la main de l’homme.
Et malheureusement, c’est quelque chose de possible parce que nous avons bouleversé nos écosystèmes, facilité la transmission du virus de l’animal à l’homme, une transmission 1000 fois plus rapide. Aussi, l’interconnexion entre les différentes populations du monde fait que les virus ont voyagé très vite et ont fait une propension plus rapide. Déjà, le virus de la Covid-19 est né en Chine où on trouve des gens d’horizons divers. Et rapidement, il a fait des ravages à travers le monde ».
Rectifier sur le fil
D’après ce médecin-écrivain, les virus, durant l’époque médiévale, ont toujours voyagé en chameau, cheval ou bateau, mais aujourd’hui c’est fait à grande vitesse. En 48 heures, on peut disséminer un virus sur la planète entière. il invite ainsi à rectifier le tir, « sinon on pourrait avoir ce genre d’épidémies plus fréquemment ». Parole d’un expert médical qui reste convaincu que les épidémies ont un volet biomédical, mais surtout un volet sociétal, culturel, politique, idéologique et économique. « Parler d’une épidémie quelle qu’elle soit, c’est parler de la politique au sens large, de comment la cité a été tenue jusqu’ici », dixit le praticien de la santé. d’où son dernier opus, « les eaux noires » qui prend comme prétexte la fièvre hémorragique ebola, mais qui retrace les similitudes dans les différentes épidémies qui ont secoué le monde. un livre qui, selon l’auteur, n’est que la continuité de ses ouvrages à savoir :« la vie sur un fil » qui parle des écarts de ce qui se passe dans la médecine, et « l’éthique, le soignant et la société » qui vient décrire une autre réalité de ce qui se passe dans le milieu hospitalier notamment le comportement du personnel soignant. « Il y a une vraie continuité entre les trois ouvrages. Je parle souvent d’une réalité médicale, mais je pense que la médecine c’est aussi un regard sur la société, l’idéologie et la politique de façon générale. Lorsque je décrivais l’hôpital public dans « la vie sur un fil », j’ai voulu décrire la société de façon générale. Puisque c’est l’idéologie et le regard de la société qui vont déterminer à quoi ressemblent nos hôpitaux.
Et critiquer les hôpitaux, c’est de les rappeler qu’ils doivent y avoir plus d’humanité. « L’Ethique, le soignant la société » est allé dans la même direction, mais c’est un essai qui met un peu plus les choses en place. Quant au roman, « Les eaux noires », « j’ai pris comme prétexte la fièvre hémorragique Ebola pour parler des similitudes qui existent dans toutes les épidémies qu’on a vécues. Pour moi, les épidémies ont un volet biomédical, mais surtout un volet sociétal, culturel, politique, idéologique et économique. Parler d’une épidémie quelle qu’elle soit, c’est parler de la politique au sens large, de comment la cité a été tenue jusqu’ici », a-t-il affirmé.
La question des funérailles se pose toujours
et de poursuivre : « Dans les eaux noires, il y a des similitudes qu’il a pu avoir entre l’épidémie à virus Ebola et les autres épidémies qui ont concerné certains pays africains et les autres épidémies telle que la grippe espagnole qui a fait beaucoup de morts dans le monde, et près de 3 millions en Afrique. Entre les épidémies qui ont secoué l’Afrique occidentale française durant la période coloniale, et la peste noire qui date du 13 e au 14 e siècle, Il y a quelque chose d’extraordinaire dans la réaction humaine vis-à-vis des épidémies. C’est notre relation à notre société, la façon dont nous conduisons les choses qui va déterminer notre comportement au niveau des épidémies. La médecine a certes évolué du point de vue biomédical, mais on se rend compte qu’il y a exactement les mêmes mécanismes.
La stigmatisation est toujours là. La question des funérailles se pose toujours. La question du rapport à l’autre et les violences communautaires. Toutes ces questions-là ont quasiment traversé toutes les épidémies. Cette épidémie qu’elle s’appelle grippe espagnole choléra, peste noire dans l’Europe médiévale. Qu’elle s’appelle Ebola ou coronavirus, vous retrouverez les mêmes ingrédients même s’il y a des différences. Il y a de terribles similitudes qui nous rappellent ce que nous sommes : c’est-à-dire des êtres humains qui ont beaucoup de failles par rapport à leur comportement et à l’humanité ».
Cet expert médical reste convaincu que si l’histoire continue ainsi de bégayer c’est parce que les hommes n’apprennent pas de l’histoire, et qu’ils n’ont pas su tirer les bonnes leçons. D’où la philosophie de ses écrits avec des thèmes qui touchent la société et la politique en général, et qui invitent à se mirer, à se regarder pour, dit-il, voir ce qui est bon et faire le diagnostic et le bon choix afin d’apporter des solutions à des problèmes. en tout cas, tout ce qui est décrit dans son roman, « les eaux noires » à travers l’épidémie ebola est en train d’être vécu avec le coronavirus ! Et dire que les épidémies seront plus fréquentes et plus virulentes… dans surtout des pays avec des systèmes de santé plus que fragilisés.