FOUNDIOUGNE, UNE COMMUNE A LA RECHERCHE DE SA SPLENDEUR PERDUE
Fondée en 1917, Foundiougne est l’une des plus anciennes communes du Sénégal. Grâce à sa position stratégique sur le Saloum, son port de commerce a joué un rôle de premier plan à l’ère coloniale.

Fondée en 1917, Foundiougne est l’une des plus anciennes communes du Sénégal. Grâce à sa position stratégique sur le Saloum, son port de commerce a joué un rôle de premier plan à l’ère coloniale. En 1940, lors de la bataille de Dakar, le général de Gaulle a utilisé Foundiougne comme point de débarquement discret de ses émissaires clandestins. L’administrateur Marcel Campistron, rallié à la France libre, facilitera leur pénétration et leurs actions de préparation de cette opération dans le territoire. Ville commerciale et historique, Foundiougne a assurément perdu de sa splendeur d’antan pour devenir une ville quelconque…
Et pourtant avec ses énormes potentialités économiques, Foundiougne, pour peu qu’il y ait eu une volonté politique soutenue, aurait pu sortir de sa situation d’une ville sans infrastructure majeure. En effet, l’étranger qui met le pied dans cette ville située dans le Sine Saloum, est frappé par son extrême pauvreté. Même si l’intérieur des maisons est spacieux, celles-ci sont faites de sommaires concessions rustiques. Aucun édifice en hauteur à part la maison du maire qui se distingue des autres par son luxe. Les rues sablonneuses sont désertées par la population à cause d’une chaleur étouffante qui prend possession de la ville dès le matin pour ne laisser place à un peu de tiédeur qu’en début de soirée.
En ce jour de samedi du mois de février, lors de notre passage pour les besoins de la couverture de la coupe du maire, l’impression qui prévaut est que tout Foudiougne s’était réfugié à l’intérieur des concessions où régnait une certaine torpeur qui rendait les humains maussades. Le soleil dardait ses rayons sur les rares personnes qui osaient affronter la canicule. Les arbres qui auraient pu leur offrir leur ombrage sont presque inexistants dans cette ville côtière qui fut l’une des plus vivantes à l’époque coloniale.
Babacar Diamé, maire de Foundiougne depuis 2009 et président du Conseil de surveillance de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC), retrace l’histoire de la commune où a étudié le président de la République Macky Sall. « Foundiougne est une ancienne ville qui était, à l’époque coloniale, le chef-lieu du cercle du Sine et Saloum. Lorsque les colons sont arrivés, il n’y avait pas de routes pour aller à Kaolack. Ils sont alors passés par la mer pour venir à Foundiougne en créant leur propre base. A l’époque, il y avait la commercialisation de l’arachide. Tout le bassin arachidier venait à Foundiougne déposer les arachides. Et le produit était acheminé à Bordeaux. Le port de la commune était le 6ème port de l’Aof » !
Foundiougne pleure son passé florissant
Créée en 1917, Foundiougne a célébré en 2017 ses cent ans d’existence. Par sa position, la ville a connu un développement fulgurant eu égard à ses potentialités. Aujourd’hui, elle polarise 17 collectivités locales. Fort gâtée par la nature, cette presqu’île est ceinturée par la mer et des îles du Gandoul. Hélas, malgré ses potentialités, Foundiougne n’a pu tenir après le départ des colons. Son développement ayant connu un arrêt. Le commerce qui faisait vivre la localité se meurt. Son port régresse au détriment de celui de Kaolack qui a pris le relais. Avec les voies routières construites par les autorités sénégalaises, Foudiougne perd ainsi de son point d’accès par la mer au profit de Kaolack.
Toutefois, le maire estime que, tant bien que mal, les choses commencent à bouger depuis l’accession du président Macky Sall au pouvoir. « Foundiougne est en train de connaitre le développement. Il faut reconnaitre que le président de la République Macky Sall, qui a grandi à Foundiougne et y a fait ses classes de CM1 et de CM2, a conscience des potentialités qui existent dans le département de Foundiougne pour avoir vécu dans ce lieu. Etant né à Fatick, il a grandi à Foundiougne. Il faut aussi reconnaitre qu’avant lui, il y avait des gens qui avaient compris la nécessité d’accompagner Foundiougne. Mais malheureusement, Foundiougne a toujours été laissée en rade », se désole le président du Conseil de surveillance de la Caisse des dépôts et Consignations et maire de la ville. Avant de poursuivre : « Maintenant, depuis 2012, les choses ont effectivement repris. Parce que d’abord, il y a les infrastructures qui ont été créées entre Foundiougne et Passy et entre Keur Ndiaye Wally et Sokone. Vous voyez qu’il y a eu un désenclavement. Le président de la République a considéré qu’il faut aller loin, il est en train de construire un pont d’une longueur de 1,300 km, d’une hauteur de 28 m pour un coût de 42 milliards. Il y a le port de NdakhongaFoundiougne d’un coût de 28 milliards qui va s’ouvrir certainement à la fin de l’année 2020. Il y a aussi la plateforme d’hydrocarbures qui permet de stocker tout le carburant qui va arriver et qui permettra aussi de capter le trafic malien. Parce que les Maliens vont à Dakar pour chercher le carburant. A partir du moment où il y aura la livraison de cette plateforme, les Maliens n’auront plus besoin d’aller jusqu’à Dakar, mais viendront à Foundiougne » confie, résolument optimiste, le maire Babacar Dramé.
Le premier magistrat de la ville garde espoir que sa localité connaitra le développement avec le port et le pont en cours de réalisation. Foundiougne, c’est aussi un bastion de l’agriculture, du tourisme et de l’élevage. « Nous avons espoir que le pont qui sera livré au mois de mars 2021 permettra de désenclaver complètement la zone Foundiougne-Ziguinchor, Foundiougne-Gambie, Foundiougne-Guinée etc. Ce sera une bonne chose pour le département et, d’une manière générale, pour le pays », s’enthousiasme-t-il. Avec tout cela, la commune verra sa jeunesse profiter de ses potentialités. « L’emploi des jeunes se fait de manière progressive, tous les chantiers qui sont là sont ouverts aux jeunes. Ils sont recrutés mais il y a des métiers spécialisés pour lesquelles il n’y a pas de personnes formées au niveau local. Indépendamment de ça, il y a des entreprises qui sont des prestataires de services dans le cadre de l’exécution du pont. Ce sont des Chinois, mais ils ont des entreprises sénégalaises qui recrutent des agents. Et avec l’ouverture du pont, il y aura encore davantage d’emplois et cela permettra de booster l’économie du pays. Les femmes et les jeunes vont y travailler. La Der est déjà à Foundiougne pour accompagner les femmes », liste encore, entre autres heureuses perspectives, le maie Babacar Dramé.
Le grand combat de la population, l’eau
A 18 heures, le soleil a fini de darder ses rayons sur Foundiougne. Les « Jakarta » font d’incessants va-et-vient. Le jour de notre visite, la finale de la coupe du maire s’est jouée sur un terrain sablonneux sans tribune. Comme dans un gros village, les supporters ont entouré l’aire sablonneuse, criant et gesticulant. Si une des équipes marque, ils entrent dans le terrain pour jubiler. Les autorités sont assises sur des chaises. Il arrive souvent que le ballon se retrouve sur elles. Modou, sur ses 20 printemps, assis à califourchon sur sa moto discute avec une cliente. « Ici, la quasi-totalité des jeunes conduisent des motos Jakarta. Mais, certains aussi vont travailler comme journaliers au port. La vie n’est pas du tout rose. Mais, le grand problème de Foundiougne c’est l’eau. Nous souffrons de ce manque d’eau », répète le jeune homme avant de filer avec sa cliente. Un trentenaire, un bouquin en main, estime que la commune a des potentialités inexploitées. « Le bilan du maire est mitigé. On ne peut pas dire qu’il n’a pas travaillé, mais il reste beaucoup de choses à faire. Faites le tour des quartiers et vous constaterez par vous-même l’état de la pauvreté. Ne pensez pas en voyant ce pont et le port que la vie est nickel ici. Non ! Les lampadaires sont allumés, il n’y a pas longtemps. Ce n’est toute la commune qui est éclairée. Aujourd’hui, notre grand besoin reste l’eau. Je pense que le maire devrait se battre pour ça » a confié le trentenaire qui demande l’anonymat.
Le maire parle de ses réalisations
« En termes d’accompagnement, nous avons besoin de Promovilles, de la responsabilité sociétale d’entreprise parce que la société qui construit le pont doit pouvoir nous permettre d’avoir au moins une voirie. Parce qu’à Foundiougne, il n’y a pas de voies bitumées. Il serait bon que dans l’activité de réalisation du pont, du port et de la plateforme on puisse avoir une voirie intérieure et ensuite accompagner les jeunes. Pour le sport, on a réservé 4 hectares de terrain pour la construction d’un stade départemental multifonctionnel. Nous voulons aussi construire une arène. J’ai un bilan positif à Foundiougne. Je suis maire depuis 2009. Quand je suis venu, il y avait des difficultés en matière d’éclairage, des insuffisances dans l’éducation parce qu’il fallait construire des salles de classe, il y avait un marché hebdomadaire qu’il fallait créer, et c’est fait. Il y a aussi le campement municipal qu’on a mis en place, deux autos taxi qui sont là qui doivent démarrer pour contribuer au désenclavement de la ville, le nouvel hôtel de ville qui a été construit avec une enveloppe d’une valeur de 200 millions en remplacement de l’autre qui était dans un état de délabrement et qui date de 1917. La ville est éclairée. C’est l’eau qui constitue un réel problème à Foundiougne. On n’a jamais eu d’eau potable. L’Etat a créé un forage à Passy Mitiel. Grâce à ce forage, on est alimenté en eau. Je pense que dans les mois à venir cela va desservir Foundiougne » confie, avec un enthousiasme émouvant à voir, le maire Babacar Diamé.