«JE PREFERE LE BRUIT DES HAUT-PARLEURS DES DAHIRAS A CELUI DES CANONS DE L’EXTREMISME»
Le vivre ensemble a de beaux jours devant lui si l’on se fie aux propos de Paul Coréa, vice-président de Présence Chrétienne qui estime qu’ils sont des Sénégalais d’abord avant d’être des chrétiens ou des musulmans

Le Rassemblement Islamique du Sénégal (RIS) a organisé samedi une conférence sur le thème : ‘’Le vivre ensemble à l’épreuve des mondes extrêmes, la voix de l’Islam source de valeurs et d’équilibre‘’. A cette occasion, le sociologue et vice-président de Présence chrétienne se veut clair à l’encontre de certains pourfendeurs de la cohésion religieuse dans le pays. A l’en croire, il préfère de loin le bruit des hauts parleurs des ‘’dahiras’’ (associations religieuses confrériques) à celui des canons de l’extrémisme religieux.
Les oiseaux de mauvais augure qui tenteraient de semer la zizanie entre les religions au Sénégal peuvent déchanter. Le vivre ensemble a de beaux jours devant lui si l’on se fie aux propos de Paul Coréa. Le vice-président de Présence Chrétienne, organisation qui fait partie du Conseil du laïcat, a estimé qu’ils sont des Sénégalais d’abord avant d’être des chrétiens ou des musulmans. Se rappelant une anecdote où des étrangers étaient venus chez lui pour lui demander d’intervenir pour arrêter une association religieuse qui faisait une ‘’dahira ‘’en bas de son immeuble, le sociologue a indiqué qu’il a été sans équivoque dans sa réponse : ‘’C’est ça le Sénégal et je préfère le bruit des haut-parleurs des dahiras à celui des canons de l’extrémisme’’, avait-il servi à ces étrangers qui visiblement méconnaissaient encore les réalités du Sénégal. A l’en croire, il y a des consensus forts sur la question du vivre ensemble au Sénégal qui est bel et bien un acquis comme la laïcité à la sénégalaise. Mais il faut essayer, insiste-t-il, de le consolider tous les jours en dépassant les simples slogans parce que c’est toujours un projet à construire en permanence, et il ne faut pas qu’on dorme sur ces acquis. Donnant l’exemple de ce qui s’est passé avec les élèves expulsés à l’institut Jeanne d’ARC, il a affirmé que c’est révélateur des incompréhensions qui peuvent exister.
Restant toujours dans le même sillage, il pense que des difficultés ne peuvent pas manquer sur ces questions, mais les associations religieuses, toutes obédiences confondues, doivent converger pour lutter par exemple contre la pauvreté, la mal gouvernance ou encore la crise des valeurs.
Abondant dans le même sens, le secrétaire général du cade unitaire de l’Islam au Sénégal, Dr Cheikh Guèye, a estimé que le Sénégal est un pays qui se distingue par la cohésion entre les religions. ‘’Les classements qui sont faits par les centres de recherche mettent le Sénégal dans une position de leader dans le fait que l’Islam occupe une place très importante chez les Sénégalais en général et dans l’exceptionnalité du vivre ensemble sénégalais‘’, révèle Dr Guèye.
Insistant néanmoins sur le renforcement des acquis, le chercheur à Enda pense qu’il faut éviter que les réseaux sociaux deviennent des instruments de division et d’offense entre Sénégalais. ‘’Le vivre ensemble est aujourd’hui menacé par de nouveaux phénomènes et de nouvelles idées comme l’extrémisme violent qui n’est pas simplement la particularité de l’Islam’’, prévient-il.
Pour sa part, le conférencier et président du RIS Cheikh Matar Kébé trouve que l’Islam est une religion qui reconnaît et respecte l’identité de l’autre, donnant l’exemple du Pacte de Médine. ‘’Et le vivre ensemble est une situation qui favorise l’unité car les gens peuvent diverger sur les questions religieuses et être ensemble en vivant dans l’harmonie’’, soutient le célèbre prêcheur qui ajoute, pour attirer l’attention, que le monde est aujourd’hui au cœur du choc des civilisations.
Les conflits, renseigne Pr Kébé, ne vont plus être entre pays mais entre obédiences confessionnelles intolérantes. Signalons que les membres du RIS ont organisé cette conférence en prélude à leur congrès qu’ils comptent organiser les 27, 28 et 29 mars.