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KAGUITTE, VILLE MARTYR DU CONFLIT CASAMANÇAIS

Après avoir été quasiment rayé de la carte lors des affrontements entre l’armée et la rébellion en 1992, le village renaît. Pour les habitants qui ont vécu dans leur chair ces terribles événements, l’espoir est là malgré les défis

Idrissa Sané et Seydou Ka et Moussa Sow  |   Publication 24/08/2020

Dans sa concession entourée d’un vaste verger peuplé de manguiers, de citronniers et d’autres arbres fruitiers, Abdoulaye Ndiaye (ne vous fiez pas au nom, il est diola) semble avoir tous les ingrédients du bonheur. La famille est presque au complet sur la véranda en cet après-midi du samedi 8 d’août 2020, l’une des rares journées où il n’y a pas la pluie à cette époque de l’année. Son épouse Aminata Diatta, d’un air un peu timide, est assise sur le perron de la véranda. Leur fils Alassane Ndiaye, teint clair, barbiche en deux jets, enfile ses bottes. Sa sœur lui fait remarquer qu’il fait chaud. « Ça va, j’ai l’habitude de porter des Rangers », répond-il… Pourtant, à l’instar des autres habitants du village, la famille Ndiaye a vécu des années de braise, notamment lors des terribles affrontements entre l’armée et la rébellion en 1992. « Kaguitte fait partie des villages parmi les plus affectés par le conflit », résume Abdoulaye Ndiaye. Le film des évènements est resté vivace dans sa mémoire. « On a tout vu ici avant de fuir. Le village était devenu un champ de bataille, et la population prise au piège entre deux feux. Les militaires et les rebelles se tiraient en s’abritant derrière les murs de nos maisons. Il arrivait que des balles ou des obus percent les murs alors qu’on était à l’intérieur », narre-t-il. Parmi ceux qui tentaient de s’enfuir, beaucoup ont sauté sur des mines anti-personnel. Après plus d’une dizaine d’années d’exil, la famille est revenue se réinstaller au village en 2005. Les exilés de retour ont bénéficié de l’appui de certaines Ong pour la reconstruction de leurs maisons.

Plus de 300 familles sont revenues

À ce jour, plus de trois cents familles sont revenues à Kaguitte, informe Oumar Ndiaye, le chef du village. Le vieux Demba Diatta fait partie des derniers arrivants. Sa nouvelle maison en banco, construite avec l’appui de l’Ong Caritas, est d’ailleurs toujours en chantier. « Lors de la première pluie, le vent m’a beaucoup fatigué. Mais maintenant, après quelques réfections, ça va mieux », dit-il. Torse nu, le corps sec, vêtu d’un simple petit pagne bleu autour des reins, l’homme transpire fortement. Il est en plein travaux dans son verger. Il a planté du manioc et quelques arbres fruitiers. Comme en témoigne son bonnet rouge et noir (couleur de la royauté en pays animiste), l’homme est un personnage important dans sa communauté. Il fait partie des sages de Yutu et est le chef du village de Bouniak, situé juste de l’autre côté du bolong, à la frontière avec la Guinée-Bissau. Aujourd’hui, ce village n’a pas encore retrouvé la quiétude et beaucoup d’habitants ont dû fuir. C’est ainsi que Demba Diatta est venu s’installer à Kaguitte, « le temps que la paix revienne là-bas », dit-il, dans un sourire laissant entrevoir une gencive rouge. Le vieil homme a, lui aussi, reçu son lot de drame du conflit. « Ma deuxième femme a sauté sur une mine et a perdu une jambe », confie-t-il avec détachement. Comme si ce genre de drame faisait partie de l’ordre normal des choses. Ce qui explique peut-être le sourire qu’il continue d’afficher. L’espoir, voilà ce qui permet à ces habitants de tenir.

Le vieux Kakoye Diatta, qui s’était réfugié à Ziguinchor, fait partie des premiers à revenir, deux ans après les évènements de 1992. « Pour nous, la crise est finie », explique ce septuagénaire. Lui aussi garde un souvenir « douloureux » de ces évènements. Trouvé allongé sur son hamac, à l’ombre des manguiers, dans sa vaste concession-verger, au quartier Djiring Esamay (la palmeraie du lion, en diola), il se sent aujourd’hui en parfaite sécurité grâce à la présence de l’armée. Sa femme Safiatou Sané, un simple pagne noué sur la poitrine, confirme. « Il y a la paix, notre principal problème aujourd’hui, c’est l’état de la route », dit-elle. Cette préoccupation est partagée par tous les habitants du village. En plus de la route, Kaguitte n’a encore ni électricité, ni d’eau potable. Un forage a été construit il y a plus de dix ans, mais il n’est toujours pas fonctionnel. Quant à l’électricité, une centrale solaire est en construction avec l’aide de la coopération européenne, mais les populations attendent toujours, avec impatience, sa mise en service. « Ils nous manque ces ingrédients pour avoir une vie normale », note Alassane Ndiaye.

Certains habitants, qui gardent toujours un lien très fort avec Yutu, leur base arrière où tous les rites sont organisés, souhaitent également la construction d’un pont sur le bolong reliant les deux villages et un autre reliant Kasu Sénégal, le seul village éramé (aujourd’hui inhabité) se trouvant sur le territoire sénégalais.

À cheval entre le Sénégal et la Guinée-Bissau

Lors de la guerre de libération contre les Portugais, beaucoup de Bissau-Guinéens s’étaient réfugiés à Kaguitte. Ironie de l’histoire, après les affrontements de 1992, beaucoup d’habitants du village ont fait le chemin inverse pour aller se réfugier en Guinée-Bissau. Certains sont revenus, d’autres sont restés. « Je pense que certains ne reviendront jamais parce qu’ils ont acquis là-bas une situation sociale qu’ils n’avaient pas ici », relève Oumar Ndiaye, chef du village de Kaguitte. D’ethnie éramé, lui-même s’était réfugié en Guinée-Bissau, mais il est revenu moins d’un an après l’attaque. « C’était trop dur pour nous ; on avait laissé tous nos biens derrière nous », raconte-t-il. Comme c’est le cas un peu partout en Afrique de l’Ouest, la notion de frontière est très artificielle pour ces populations à cheval entre les deux pays. Ainsi, chaque jour, des personnes traversent la frontière pour venir s’approvisionner à Kaguitte. Beaucoup d’enfants éramés sont aussi inscrits à l’école du village. « Tous les jours ils traversent le bolong à bord d’une pirogue pour venir à l’école », informe Ibrahima Sambou, prof de mathématiques et de sciences de la vie et de la terre dans l’établissement depuis dix ans. C’est aussi par Kaguitte que transite l’essentiel de la production d’anacarde avant d’être acheminée au port de Ziguinchor par la route. En effet, Kassu est l’une des plus importantes zones de production d’anacarde de la région.

À Kaguitte, la vie reprend progressivement son cours normal. Les rizières sont à nouveau investies. Au Cem (Collège d’enseignement moyen), le samedi 8 août 2020, on n’a pas trouvé d’élèves parce que c’est le week-end ; mais « les cours fonctionnent normalement », renseigne Ibrahima Sambou, le prof de Maths-Svt. En dehors des désagréments évoqués plus haut, pour la population, le plus important est là : la sécurité. Nous avons pu le constater. Nous avions des appréhensions au départ de Ziguinchor. Mais une fois à Nyassia, le capitaine Diop, commandant du camp, nous rassure. « La zone est sécurisée ; nous avons des positions sur tout le chemin », dit-il, nous précisant les poches dans lesquelles il ne faudrait pas s’aventurer. En plus de son excellente connaissance du terrain, le capitaine connaît bien les us et coutumes de la localité où il a passé plus de 25 ans. Comme promis, nous rencontrons ses hommes en cours de route. À peine roulons-nous 30 mn, nous atteignons un positionnement militaire. Le Commandant Sonko confirme les renseignements fournis par son supérieur. Nous poursuivons le chemin sans encombre jusqu’à Kaguitte. Pour plus de sécurité, le Sergent-chef Médoune Fall, commandant de la base de Kaguitte, nous accompagne personnellement jusqu’au bord du bolong d’où l’on peut apercevoir Bouniak (toujours instable), Kassu Sénégal aujourd’hui inhabité, Yutu et Efok. Peut-être qu’un jour, l’équipe du « Soleil » se rendra à Yutu, un village mythique encore ancré dans la pure tradition.

Un Eldorado où « coulaient le lait et le miel » 

En diola, Kaguitte signifie paille. « C’est un endroit où l’on venait chercher de la paille pour les toitures des cases », explique le vieux Kakoye Diatta. Mais, au lieu de servir de refuge paisible pour ses habitants, la « paille » a littéralement pris feu le 1er septembre 1992. Ce jour-là, aux environs de 17h30mn, « Atika », la branche armée du Mfdc (Mouvement des forces démocratiques de la Casamance), enterre le cessez-le-feu en s’attaquant à l’armée sénégalaise, notamment à Kaguitte, situé dans l’arrondissement de Nyassia (département de Ziguinchor). Le village devient un champ de bataille. Pris au piège entre deux feux, la population est contrainte à l’exil. Comme le confirment les témoignages recueillis sur place, beaucoup de personnes vont sauter sur les mines. Avant ces terribles évènements, Kaguitte était une sorte d’Eldorado où « coulaient le lait et le miel », écrit le journaliste Amadou Ndiaye dans son ouvrage intitulé « Conflits armés et résilience : Dans l’univers des femmes de Kaguitte » publié chez Edilivre en 2019.

Très actives dans le secteur de la teinture et de la transformation, des ressortissantes du village, qui étaient à Ziguinchor, avaient appuyé, il y a quelques années, l’installation d’une unité de production de savon à Kaguitte. « C’était une très belle initiative parce que cela nous avait permis d’avoir des revenus », se rappelle Aminata Diatta, regrettant que l’activité soit actuellement à l’arrêt. Son fils Alassane Ndiaye confirme : « J’aimerai bien que cette unité redémarre parce que tous les habitants du village y trouvaient leur compte ». Par ailleurs, les femmes du village aimeraient bien pouvoir pratiquer le maraîchage. « Nous avons un périmètre, mais il n’est pas clôturé. En plus, nous n’avons pas le matériel nécessaire », se désole Aminata Diatta, sollicitant un appui dans ce sens.

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