«LE COMBAT N’EST NI FINANCIER, NI TECHNOLOGIQUE, NI SANITAIRE, IL EST EMINEMMENT HUMAIN»
Moustapha Guirassy est rassurant. Il va bien, il est bien pris en charge. Il observe le tissu médical, ses forces, ses faiblesses mais aussi l’engagement de toute une corporation médicale.

En pleine controverse sur la nature du Covid-19 à se répandre sans discrimination de classe, de race, de couleur, de croyance, l’annonce publique de Moustapha Guirassy de son test positif au virus a sonné comme un réveil brusque d’une population qui avait encore du mal à appréhender le réel. Après des milliers de commentaires sur sa page «Facebook», l’homme, aujourd’hui hospitalisé à Diamniadio, a été interrogé par «L’As» sur son quotidien, son environnement, ses questionnements personnels ou philosophiques, et sur les leçons que les Sénégalaise devront, en étant dans le «Temps du Monde», tirer pour toujours en faire partie.
Moustapha Guirassy est rassurant. Il va bien, il est bien pris en charge. Il observe le tissu médical, ses forces, ses faiblesses mais aussi l’engagement de toute une corporation médicale. De l’hôpital où il est, il constate : «Je vois l’importance de la chaîne de logistique, comme le nettoiement, la restauration, la sécurité, l’évacuation des équipements de protection, la gestion des déchets médicaux, et la question cruciale d’une bonne communication». Il demeure optimiste, si l’on sait s’accaparer du combat : «Le combat n’est pas financier. Il n’est pas technologique. Il n’est pas sanitaire. Il est éminemment humain. C’est la capacité de l’homme à s’organiser, à organiser ses forces. C’est là tout l’enjeu de la supplychain. La chaîne d’approvisionnement qu’il faut maîtriser pour venir à bout de cette pandémie. C’est une autre dimension importante».
Comment a-t-il ressenti l’annonce de sa positivité au Covid-19, de retour d’un séjour en Europe ? «Il y a quelques jours encore je pensais que le Covid 19 était une «affaire» réservée aux autres. Une affaire qu’on n’entend qu’à la télé, qu’on ne lit que dans les journaux. Comme beaucoup de cadres africains, je n’étais pas suffisamment pas dans le Globe. Je voyais les problèmes de là où j’étais seulement. Quand ils me touchaient directement, je pouvais alors me mobiliser pour les contrer. Mais lorsqu’ils étaient au-delà de mes frontières d’intérêt immédiat, je baissais les bras. Je ne me sentais pas menacé. La lutte pour le climat, la protection de l’environnement, les questions migratoires, les questions de génétique biologique, les enjeux liés à l’intelligence artificielle, bref... autant de thèmes alimentant le débat public porté par certains acteurs de la société civile, pour la plupart non Africains, que je n’abordais que superficiellement. Se battre pour ces questions sous nos cieux est encore synonyme d’anachronisme et de déphasage avec les «réalités» des populations ».
Moustapha Guirassy nous dit qu’Il faut aller boire à la source de la vie et de l’amour dans la quête permanente du juste milieu qu’imposent la sagesse, le détachement et l’assentiment à la solidarité aux autres. Les mots : consciences, résilience, empathie. Il a l’occasion depuis son lit d’hôpital, entre deux promenades, de réfléchir sur l’avenir et le sien aussi. «Il est temps d’afficher la grandeur spirituelle d’une nation, d’un continent pour construire des cultures alternatives et métissées conjuguant à la fois le passé et le futur, le local et le global, la tradition et la modernité, l’ici et l’ailleurs, le secret et son élucidation, la création personnelle et l’inscription communautaire...
Le Covid 19 m’a permis aujourd’hui de mieux apprécier le caractère planétaire des enjeux. Chaque humain est concerné au premier chef. Irresponsabilité ne peut être plus grande que de laisser ces questions aux autres. Surtout pas aux politiques qui sont généralement plus préoccupés par le présent que l’avenir. C’est à l’aune de la capacité des dirigeants politiques à critiquer l’existant que l’appréciation se fait. Très rarement sur leur capacité à anticiper sur les enjeux du futur surtout ceux globaux», indique l’ancien ministre de la Communication. Il teste au contact de l’information, lit, se documente, se projette. «Aujourd’hui avec cette crise, c’est le marché et la démocratie qui vont certainement connaître de profondes mutations» . N’est-il intéressant pas de noter comment la dictature en Chine a réussi à stopper l’avancée de ce fléau sur son sol ? Serait-elle efficace si le système était comme en Europe ou en Amérique démocratique ?
Moustapha Guirassy a de l’espoir cependant en un sursaut de toute l’humanité. «L’empathie retrouve toute sa place. Et les secteurs les plus importants seront les secteurs à empathie : éducation, santé, alimentation et les dirigeants qui vont gouverner le monde seront ceux qui mettront en avant l’empathie et l’humain au centre. Le Covid est un fléau certes, mais il est aussi un remède si l’on sait lire les messages qu’il envoie», affirme le manager de l’IAM. La spiritualité de l’homme n’est jamais loin de ses questionnements. C’est un signe Divin aussi : « Avec le Covid 19, c’est L’homme qui redécouvre les vertus de l’humilité et la grandeur de Dieu. Le Covid19, c’est la fin de l’homodeus. C’est le retour de l’homme. Le vrai. Celui longtemps attendu!!! ».