LE CONSEILLER REFERENDAIRE A LA COUR SUPREME EL HADJI BIRAME FAYE SANS INDULGENCE
L e Conseiller référendaire à la Cour Suprême, El Hadji Birame Faye, était chargé de prononcer le Discours d’usage hier, lundi 23 janvier 2023, à la cérémonie de Rentrée solennelle des Cours et Tribunaux (2022- 2023

Le système de santé sénégalais a plusieurs manquements qui ne riment pas avec une prise en charge correcte des citoyens. Chargé de prononcer le Discours d’usage à la cérémonie de Rentrée solennelle des Cours et Tribunaux, avec comme thème la «Protection des usagers dans le système de santé publique», El Hadji Birame Faye, Conseiller référendaire à la Cour suprême, est revenu sur plusieurs pratiques qui gangrènent le système sanitaire.
L e Conseiller référendaire à la Cour Suprême, El Hadji Birame Faye, était chargé de prononcer le Discours d’usage hier, lundi 23 janvier 2023, à la cérémonie de Rentrée solennelle des Cours et Tribunaux (2022- 2023). Abordant le thème, «Protection des usagers dans le système de santé publique», il a été impitoyable avec le système sanitaire. Il n’y est pas allé par quatre chemins pour relever, « qu’il est inadmissible, au 21ème siècle, que des personnes décèdent par manque d’infrastructures hospitalières, d’équipements ou de personnels de santé qualifiés et plus encore en raison de la mauvaise répartition de ces moyens humains et matériels sur le territoire».
Consacrer le thème de réflexion de la Rentrée solennelle des Cours et Tribunaux à la santé est donc, estime-t-il, «un enjeu majeur de société, portant en filigrane des questions de justice sociale éminemment profondes, qui interpellent toutes les sociétés contemporaines». El Hadji Birame Faye d’ajouter ainsi que, «les accidents médicaux ou liés au système de santé qui se multiplient sont les signes cliniques d’une pathologie endémique qui mérite une attention particulière».
Le regard du Conseiller référendaire sur la santé est aussi, «qu’avec la charte du malade placardée sur les murs de tous les hôpitaux, c’est à croire que les usagers ignorent leurs droits, que les services hospitaliers les négligent, et que le paternalisme médical résiste au changement, les soignants se complaisant à maintenir le malade dans l’ignorance». Malgré les efforts consentis par l’Etat, pour mailler le territoire, le résultat positif ne suit pas ; «à défaut d’un bon système d’entretien et de maintenance, les infrastructures qui existent et leurs équipements sont voués à une obsolescence programmée». Et, «pour les habitants de certaines localités, rallier une structure de santé est un calvaire, tandis que le recours à l’expertise étrangère demeure une alternative réservée à une poignée de privilégiés qui ont les moyens ou la chance de bénéficier de la générosité publique, encore que ce soit peine perdue dans certaines situations d’urgence».
El Hadji Birame Faye de constater également que, «le Sénégal est encore loin d’atteindre le ratio personnel de santé par habitant et, le nombre de médecins, qui plus est, pour certaines spécialités, est excessivement faible, sans compter la répartition inégalitaire des ressources humaines sur le territoire national et même entre le public et le privé». A cause de ce sous-effectif, conclut-il, «la charge de travail supportée par le corps médical, est humainement insoutenable. Et cela est source de beaucoup d’erreurs», note Birame Faye.
Dans son diagnostic, le juge de noter également qu’on ne peut manquer de relever ce paradoxe saisissant : «beaucoup de médecins ou autres professionnels de la santé sont au chômage. Et si nos universités offrent des spécialisations dans divers domaines de la médecine, elles accueillent rarement des médecins sénégalais qui, hormis le peu qui bénéficie d’une bourse publique, sont contraints d’y renoncer, faute de moyens».
DES SENEGALAIS RENONCENT AUX SOINS PAR MANQUE DE MOYENS
«Nous savons trop bien que, par manque de moyens, les gens renoncent à se faire soigner ou repoussent la consultation au plus tard possible. Pourtant, chacun a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé. Autrement dit, la pauvreté ou la vulnérabilité ne doit pas constituer un obstacle à l’accès aux soins», se désole-til. A l’analyse, dit El Hadji Birame Faye, «nous avons un système bismarckiens, instituant une protection sociale attachée au statut professionnel, qui bénéficie exclusivement aux agents de l’État et aux salariés du secteur privé formel. Et nonobstant plusieurs politiques publiques, il est encore très éloigné du régime universel «beveridgien». Dès lors, la majeure partie de nos concitoyens n’a aucune couverture sociale».
Dans son discours, il remarque, en outre, une gratuité qui n’existe que de nom. «Il s’avère que les bénéficiaires de gratuité supportent encore des dépenses de frais d’analyse et de médicaments et souffrent d’une certaine forme d’ostracisme. Peu de districts de santé disposent d’un centre de dialyse opérationnel et d’un répertoire contenant les données d’identification précises des patients». Plus encore, «l’accès aux centres ouverts est très limité, parce qu’à défaut de moyens suffisants, ils fonctionnent par cohorte. Imaginons un instant, la situation des insuffisants rénaux, et leurs proches, qui attendent qu’une place se libère pour être éligibles aux soins. L’effectivité des offres de services et l’accessibilité géographique restent les principales barrières pour les détenteurs de la Carte d’égalité des chances, sans oublier leur faible enrôlement dans les mutuelles de santé et les retards de remboursement des frais de prise en charge», s’offusque-t-il.