L’ENFER D’HOMMES ET DE FEMMES
La violence conjugale peut être parfois physique ou verbale. Ils sont nombreux, hommes et femmes, qui vivent le cauchemar dans leur vie de couple

Ils sont nombreux à souffrir en silence dans leur foyer. Il ne se passe un seul jour sans qu’une femme ou un homme ne soit confronté à une violence verbale ou physique de leur compagnon. Quelques-uns d’entre eux nous racontent leurs années de galère ou comment leur amour à viré à la haine. Témoignages.
La violence conjugale peut être parfois physique ou verbale. Ils sont nombreux, hommes et femmes, qui vivent le cauchemar dans leur vie de couple. S’ils ne sont pas battus par leurs conjoints, ils sont victimes de violences verbales et même sexuelles à la fois. Une violence qui n’est pas seulement l’apanage des gens défavorisées. Celle-ci s’exerce un peu partout. Il est souvent difficile de lire sur le visage des gens pour savoir qui est violent ou ne l’est pas. Il ressemble à Monsieur tout le monde. Ça peut être votre voisin de palier, l’homme courtois qui rend service dans le quartier. Le séducteur que personne ne résiste. Le cadre dynamique que l’on trouve aimable ou quelqu’un (e) dont la fonction force le respect... Agréables en société, ils sont souvent tortionnaires avec leur conjoint.
J’ai eu le coup de foudre pour lui, mais il a gâché ma vie…
« J’ai connu A. S au lycée. J’étais très jeune et lui aussi. Je l’ai aimé comme une folle et lui également », raconte Mariama S. Jeunes, ils firent toutes les folies de leur âge. Après le lycée, ils se retrouvent à l’université où ils ont continué de filer le parfait amour. Quelques années plus tard, ils se marient. De cette union, 5 enfants sont nés. « Mon mari avait un passé triste. Une enfance malheureuse, car ayant perdu sa mère très tôt. C’était la raison pour laquelle il était trop attaché à moi » confesse Mariama S. De ce fait, dans leur foyer, la séduisante dame occupait la place d’épouse et de mère en même temps. « Nous avons galéré ensemble et avions traversé la période des vaches maigres. Aujourd’hui, nos enfants ont grandi», narre la dame, la soixantaine et toujours séduisante. Et un beau jour, voilà qu’elle découvre l’horreur. Une page qui est venue ensevelir des années de bonheur pour un homme, le seul de sa vie et qui a fait d’elle une femme. Le seul homme qu’elle a connu. « Je n’ai jamais douté de sa fidélité et de son amour pour moi. Jusqu’à ce que je découvre l’existence d’une seconde famille. Comment les hommes peuvent être des traites » confie-t-elle les larmes aux yeux. Elle découvre ainsi que son mari avait une seconde épouse avec un enfant. Quand elle découvre ce pan de la vie de son époux, c’est comme si la terre se dérobait sous ses pieds. Mis face à cette réalité, l’homme perd tout contrôle et frappe violement son épouse qui avait poussé la curiosité à lire ses messages sur son portable. « C’était la première fois qu’il a osé poser la main sur moi. Il m’a frappé violemment et a touché mon œil gauche. Et depuis ce jour, je vis avec ce handicap. Mon chagrin et ma douleur étaient tellement profonds que je ne pouvais plus rester dans cette union. Je l’ai quitté et j’ai demandé le divorce. Actuellement, je vis tranquillement avec mes enfants qui prennent soin de moi. C’est difficile, mais j’apprends à tourner cette page sombre de ma vie pour mieux vivre le présent », confie notre interlocutrice qui s’est résignée à faire son deuil des hommes.
« Mon mari est un soulard, un pervers sexuel. Ma vie est un véritable enfer… »
A 46 ans, Seynabou T avait connu un premier divorce. Une douloureuse séparation si bien qu’elle pensait qu’elle ne vivrait plus avec un homme. Le destin mit sous son chemin un homme. « Je pensais que je pourrais refaire ma vie avec lui. Mais malheureusement, tout a basculé », déroule-t-elle sur ce pan de sa vie chahutée. « Au début, quand on sortait ensemble, c’était le couple parfait. Tout allait à merveille. C’était l’homme idéal, le mari parfait. J’étais la femme la plus heureuse du monde car il m’offrait des cadeaux, m’invitait au resto, m’amenait faire des promenades etc.…. Cet homme était charmant, flatteur, attentionné, sûr de lui et prêt à rendre service. Le bon type que tout le monde adore. Mais malheureusement, il avait un double visage », raconte-t-elle. Deux ans de mariage lui permettent de découvrir le vrai visage de son homme. « Je savais certes qu’il consommait de l’alcool, mais je n’ai jamais pensé que c’était un alcoolique. Plus le temps passait, plus je découvrais ses défauts », narre-t-elle. Mais elle décide de tenir le coup et s’accroche à ce mariage pour sauver son couple. Malheureusement, ce fut l’enfer. « Quand il est ivre, il me force à des relations sexuelles alors que je ne peux supporter l’odeur de l’alcool. Pratiquement toutes les nuits nos voisins viennent nous séparer car il me bat pour coucher avec moi. Et pourtant, quand il n’est pas ivre, il est correct. Parfois, il m’insulte devant tout le monde. Ce qui fait que j’ai même honte de regarder le voisinage en face », raconte-telle. Aujourd’hui, à nouveau divorcée, elle prie de rencontrer l’homme qui lui fera oublier cette vie de misère.
« Ma femme m’a traité d’impuissant sexuel devant ma mère … »
Pour ce jeune de 32 ans, I. Diallo, sa femme l’a insulté de mère devant sa maman et ses sœurs en le traitant d’impuissant sexuel qui n’est même pas capable d’engrosser une femme. Un marqueur au front de cet homme qui peine à oublier cette phrase de son épouse. Et pourtant, il lui a donné une fille. Lasse certainement d’attendre d’être à nouveau en grossesse, elle a sorti cette monstruosité qui semait le doute dans les esprits. « Maintenant, nous nous sommes séparés à cause de son manque de respect vis-à-vis de moi et de mes parents. Je ne sais comment expliquer son comportement et son arrogance. Je ne sais pas si c’est par jalousie, si c’est par impolitesse. Mais ses propos m’ont fait mal et je ne peux plus vivre avec elle », fait savoir I. Diallo qui se remémore de cette agression verbale qui lui a pourri la vie.
Ma femme a un amant, elle ne s’occupe plus de moi, je suis comme un étranger dans ma propre maison… »
Après 6 ans de mariage, Mamadou P découvre que son épouse a un amant et mène sa vie comme elle l’entend sans se soucier de lui. « Elle ne se cache plus. Elle fait des appels vidéo avec lui sur WhatsApp et elle n’hésite pas à sortir avec lui la nuit. Je vis comme un étranger dans ma propre maison », confesse-t-il. Mamadou P a vu sa femme changer du jour au lendemain sans qu’il ne perçoive les raisons de ce changement. « Nous avions deux enfants, mais son comportement me dérangeait. Ne voulant pas que nos enfants grandissent dans un tel environnement, j’ai pris la décision de la quitter et de refaire ma vie avec une femme exemplaire qui pourrait éduquer mes enfants », fait-il savoir s’interrogeant sur l’évolution de la société sénégalaise dont les valeurs sont en passe d’être en lambeaux.
VIOLENCES CONJUGALES : 9245 cas répertoriés de janvier à octobre 2019 dont 1206 viols
Les chiffres de la violence conjugale démontrent un phénomène en constante hausse. Rien qu’entre janvier et octobre 2019, 9245 cas ont été répertoriés dont 1206 viols. Des chiffres effarants fournis par l’Association des juristes sénégalaises (AJS) posent la problématique d’un fléau qui pourtant commence à être défloré par la gente féminine surtout à travers les boutiques de droit installées un peu partout à travers le pays.
Selon l’Association des juristes sénégalais (Ajs), en deux ans (2018-2019), les statistiques n’ont fait que grimper. Pour l’année 2018, l’Association avait recensé 6289 cas de violence basée sur le genre (Vbg) enregistrés dans les boutiques de droit dont 1425 cas de viol. De janvier à octobre 2019, « 9245 cas » ont été répertoriés dans les différentes boutiques de violence basée sur le genre (Vbg) dont « 1206 cas de viols ». Et lors de la journée mondiale contre les violences faites aux femmes, célébrée partout dans le monde le 25 novembre 2020, le comité de lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles avait dénombré entre le mois de mars et d’octobre, 45 cas de violences basées sur le genre. Une situation très inquiétante et qui demande de corser les mesures, notamment la loi sur la criminalisation du viol et de la pédophilie. Selon la chargée de communication de l’Association des juristes sénégalaises, Mme Amy Sakho, « l’état des lieux concernant les violences faites aux femmes et aux hommes est très difficile à faire parce que l’impact de la covid19 ne permet de réactualiser les chiffres. Les violences répertoriées étaient physiques, verbales ou morales. « Mais aujourd’hui avec la Covid 19, les violences notées sont économiques et physiques. Cette situation s’explique dans la mesure où les facteurs aggravants sont les pertes de revenus. Les femmes avaient l’habitude de faire de petits commerces et de travailler pour se prendre en charge et faire leurs dépenses quotidiennes sans même demander aux maris.
Pratiquement beaucoup de charges étaient sur le dos des femmes. Mais l’avènement de la Covid a tout fait basculer, et beaucoup de femmes sont obligées de vivre au dépend de leur mari, ce qui fait qu’elles subissent des violences économiques dans la mesure où le mari refuse parfois de donner la dépense quotidienne ou bien ne participe pas aux charges du foyer » souligne Amy Sakho. La chargée de communication de l’AJS ajoute « toute cette situation est purement une violence purement économique. Alors que le code de la famille nous dit carrément que c’est le mari qui a l’obligation d’entretenir sa femme et ses enfants. « Dans 7 régions, nous avons ouvert des centres d’assistance qu’on appelle les boutiques de droit.
A Dakar il y a ces boutiques de droit précisément à Pikine, à la Medina. Il y en aussi à Thiès, Kaolack, Ziguinchor, Kolda Sédhiou et Kébémer. La hausse des violences conjugales s’explique parce que les femmes ont maintenant le courage de dénoncer car elles savent qu’elles pourront être accompagnées par l’Association des femmes juristes du Sénégal (AJS) à travers ces boutiques de droit » informe Mme Sakho.