UN SIGNAL FORT POUR LE REGIME
Ce qui devrait être une simple affaire politico-judiciaire s’est traduit à un embrasement généralisé plongeant le pays à feu et à sang.

Les violentes manifestations constatées hier dans le pays doivent être décryptées de façon lucide par les autorités. Les actes de vandalisme et autres pillages ciblés doivent renseigner sur un ras-le-bol généralisé et une désillusion sur l’actuel système de gouvernance.
Ce qui devrait être une simple affaire politico-judiciaire s’est traduit à un embrasement généralisé plongeant le pays à feu et à sang. Au-delà de l’affaire « Sonko-Adji Sarr », l’ampleur et la violence des manifestations partout dans le pays révèlent une certaine colère des populations qui, apparemment, semblent en profiter pour régler d’autres comptes avec leurs dirigeants. Ainsi, l’arrestation de l’opposant Sonko sonne comme un catalyseur. On peut se demander si le gouvernement n’est pas en train de récolter les fruits de ses mauvaises politiques. Tout au moins son échec en ce qui concerne sa politique d’emploi, d’éducation, de sécurité intérieure, entre autres.
En effet, les pillages ciblés et autres saccages renseignent sur le niveau de désolation des populations mais également sur la mentalité des jeunes qui étaient en première ligne lors des affrontements avec les forces de l’ordre. Tout cela peut également laisser entrevoir une impopularité du Président Macky Sall à qui d’ailleurs il est prêté à tort ou à raison une volonté de briguer un troisième mandat présidentiel. Quoi qu’il en soit, les manifestations notées ces derniers jours constituent un signal fort à décrypter par le chef de l’Etat et qui doit l’obliger à revoir ses différents plans ainsi que sa façon de gouverner à trois ans de la fin de son règne. Pour l’heure, face à cette crise cuisante, le gouvernement ne compte pas céder. Tout porte à croire qu’il va continuer le bras de fer avec les manifestants. Le ministre de l’Intérieur a indiqué hier que toutes les dispositions seront prises pour que force reste à la loi. Pendant ce temps, il est difficile et pratiquement impossible de faire régner l’ordre dans le pays. Les jeunes ont de ce fait tenu tête aux forces de l’ordre débordées dans beaucoup de localités.
ENQUETE CONTRE LES AUTEURS DE VIOLENCES
Dans un communiqué parvenu à «L’AS », hier, le gouvernement a dénoncé une violation flagrante de l’état de catastrophe sanitaire proclamé le 20 février 2021.Non sans regretter les actes de vandalisme et de violence, ayant malheureusement conduit à une mort d’homme en la personne de Cheikh Ibrahima COLY. Le gouvernement a ainsi présenté ses condoléances et exprimé sa compassion à la famille de la victime.
Selon les autorités, une enquête a été diligentée pour déterminer les circonstances du décès. Le gouvernement dit par ailleurs condamner fermement les actes de violence, les pillages et destructions de biens publics et privés et exprime sa solidarité aux personnes physiques et morales impactées par ces actes, «dont les instigateurs, auteurs et complices seront recherchés et poursuivis conformément à la loi ». En outre, le gouvernement met en garde contre la couverture tendancieuse des événements par certains médias, de nature à attiser la haine et la violence. Avant de préciser qu’il continuera à prendre toutes les dispositions nécessaires au maintien de l’ordre public conformément aux lois et règlements en vigueur.
En définitive, il faut relever que depuis son arrivée au pouvoir, le président de la République a eu à gérer à plusieurs reprises des situations similaires après les arrestations de Karim Wade et de Khalifa Sall. Le régime avait réussi à l’époque à faire taire toutes les résistances et à restaurer l’ordre. Juste qu’avec Ousmane Sonko, la résistance semble plus tenace et plus générale. Loin de faire semblant de minimiser ce qui se passe, le gouvernement gagnerait à analyser la situation avec lucidité et jouer la carte de l’apaisement. Ces manifestations laissent entrevoir également que le message antifrançais de certains activistes ont eu leur effet. Il a été d’ailleurs mal décrypté par les jeunes manifestants qui semblent éprouver aujourd’hui de la haine pour l’ancienne puissance coloniale. Et tout ça devrait être analysé par les différentes forces vives de la nation.