«ON NE PEUT PAS SE CACHER, LE SÉNÉGAL EST FAVORI DE CETTE CAN»
Agent de joueurs, mentor de Didier Drogba, Thierno Seydi est en Egypte pour suivre la 32e CAN, comme il le faut depuis 1998, répond à nos questions sur le football africain et sur les Lions

LE CAIRE, Egypte – Agent de joueurs, mentor de Didier Drogba, Thierno est en Egypte pour suivre la 32e Coupe d’Afrique des nations (CAN), comme il le faut depuis 1998. A cette occasion, nous l’avons interpellé sur un certain nombre de questions sur le football africain et sur le Sénégal. Analysant le passage de la CAN de 16 à 24 équipes, il dit ne pas être «personnellement convaincu». «Il me semble que 16 équipes, c’était déjà bien. Parce qu’en termes logistiques, tout le monde n’a pas la même capacité que l’Egypte. La preuve, le Cameroun a été obligé de se désister à la dernière minute, parce qu’on a changé les règles du jeu, alors que tout était déjà calé. Parce que ce n’est pas une chose facile pour tout pays organisateur», indique-t-il.
CAN à 24 : «Le niveau technique va baisser
Le passage à 24 pays, pour lui, «c’est le spectacle qui en pâtit. Déjà qu’à 16, il y avait des équipes qui étaient là juste pour être là. A 24, on va voir de grosses différences en termes de qualité de jeu, de niveau, etc. On aurait donc pu rester à 16. Le seul bémol que je mets, c’est qu’à 24, on permet à de petites nations du football africain de goûter à cette grand-messe du foot africain. Par contre, le fait est que beaucoup de pays ne seront plus en mesure d’organiser. Parce que tous les pays ont des priorités dans le domaine de l’éducation, de la santé, du social, etc. A 24, le champ est réduit en termes de pays capables d’accueillir la CAN», soutient Thierno Seydi. Comme beaucoup d’observateurs, il est d’avis que la CAF a juste voulu suivre l’effet de mode, étant donné que l’UEFA en Europe est passée à un Euro à 24. «Forcément, tout le monde a fait cette déduction. On a vu que la FIFA a voulu imposer au Qatar un Mondial 2022 à 48 pays, mais ils ont refusé. Car, on ne change pas les règles en plein jeu. Je pense que, raisonnablement, on aurait pu rester à une CAN à 16 équipes. Surtout qu’avec cette évolution, le niveau technique va baisser», s’inquiète-t-il.
«Si on joue sur notre valeur…»
N’empêche, il estime que dès qu’on arrivera au second tour, «les grandes nations du foot africain vont se retrouver». «C’est à partir de ce moment qu’on pourra juger du niveau réel de cette CAN», ajoute-t-il en plaçant le Sénégal en favori, en dépit de la défaite concédée face à l’Algérie jeudi. «Si cette défaite est un mal pour un bien. Elle permet à cette équipe du Sénégal de se remettre en cause et de savoir que rien n’est gagné d’avance. Parce qu’on s’est un peu vu trop beau, trop vite. C’est une bonne piqûre de rappel», avance Thierno Seydi qui se veut cependant clair : «On ne peut pas se cacher. Le Sénégal est favori de cette CAN. Quand on regarde cette équipe, en valeur intrinsèque, individuellement, c’est l’une des équipes les plus complètes». «Maintenant, ajoute-t-il, si l’équipe n’arrive pas à jouer, comme cela a été le cas contre l’Algérie, la question il faudra la poser à l’entraîneur. On est un favori et tous les spécialistes avertis le savent. On doit aller gagner cette CAN. Et c’est bien de le dire, mais il faut qu’on se donne les moyens d’y arriver». Et, selon lui, «le chemin pour y arriver dépend des résultats. Mais pour gagner une CAN, il faut battre tout le monde. Il n’y a pas de calcul où d’équipe à éviter ou d’adversaire idéal. Aujourd’hui, on a un groupe qui peut faire face à n’importe quelle équipe présente dans cette CAN. Si on joue sur notre valeur, si l’équipe tourne bien, on ne doit pas avoir de soucis. Maintenant, le fameux problème du Sénégal, c’est le mental. On a cette sorte de serpent qui revient».
«Sadio a passé un cap, il sait qu’il peut être comme un Eto’o, un Drogba»
Seydi d’argumenter: «Voyez contre la Tanzanie, en première mi-temps, le match était plié, on devait être à 3 ou 4 à 0. On gagne 2 à 0, mais il aurait suffi que la Tanzanie mette un but avant ou dans le dernier quart d’heure pour qu’on se mette en difficulté. Il faut qu’on apprenne à tuer un match. Ce mal est tellement récurrent dans notre football, que je ne sais pas quoi faire. Parce qu’on a des joueurs qui jouent à un certain niveau. Face à un gros, ça ne pardonnera pas ce genre de raté. Et on a pu le vérifier contre l’Algérie qui nous a piégés. D’où la nécessité d’être rigoureux, vigilants et réalistes à chaque match dans la gestion». Par ailleurs, l’observateur avertit que «même si Sadio Mané n’a pas été étincelant contre l’Algérie, il a bien franchi un palier. Il n’est plus le joueur qu’il était l’année dernière. Dans sa tête, il a passé un cap. Il a compris et à pris conscience qu’il est un leader. Il sait qu’il peut être ce leader qui va tirer l’équipe vers le haut, comme a pu l’être un Samuel Eto’o avec le Cameroun et un Didier Drogba avec la Côte d’Ivoire».